Zone euro, Allemagne, France : la croissance en danger.

Les semaines se suivent et se ressemblent pour la conjoncture économique de la zone euro, de l’Allemagne et de la France : c’est malheureusement de mal en pis.

En effet, si la baisse de la croissance du premier trimestre 2018 a été perçue par certains comme un accident de parcours, la forte baisse des indicateurs avancés depuis quatre mois et surtout celle de mai confirment notre prévision d’un ralentissement durable de la croissance des deux côtés du Rhin et à l’échelle de l’UEM.

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Zone euro : les indicateurs Markit de plus en plus bas.

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Sources : Eurostat, Markit, ACDEFI

Ainsi, en mai, les indices Markit des directeurs d’achat de la zone euro ont continué leur dégringolade. Dans l’industrie, l’indice Markit a ainsi perdu 0,7 point, ce qui porte sa chute à 5,1 points depuis janvier dernier. Avec un niveau actuel de 55,5, il atteint un plus bas depuis février 2017.

Dans les services, la sanction est encore plus lourde, puisque l’indice Markit correspondant a perdu 0,8 point en mai et 4,1 points au cours des quatre derniers mois. Surtout, il retombe à un niveau de 53,9, un plancher depuis janvier 2017.

Conséquence logique de ces évolutions, l’indice Markit « composite » a perdu 1 point sur le seul mois de mai et 4,7 points en quatre mois.

Avec un niveau de 54,1, il se situe à un plus bas depuis novembre 2016 et montre que le glissement annuel du PIB de la zone euro devrait rapidement retomber sous 1,5 %, contre 2,5 % au premier trimestre 2018 et 2,9 % au cours du quatrième trimestre 2017. C’est dire l’ampleur et la rapidité de la décélération.

De plus, ces enquêtes ont été menées avant la nouvelle crise politique italienne qui menace directement la stabilité politique, économique et financière de l’UEM.

La croissance eurolandaise devrait rapidement retomber sous 1,5 %.

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Sources : Eurostat, Markit, ACDEFI

Le plus troublant, ou plutôt le plus agaçant, réside dans le fait que, dans le même temps, les indicateurs avancés de l’économie américaine ont continué de se redresser. A commencer par les indicateurs Markit des directeurs d’achat.

Et pendant ce temps, la croissance américaine se redresse encore…

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Sources : BEA, Markit, ACDEFI

En mai, ces derniers ont ainsi gagné 0,1 point dans l’industrie et 1,1 point dans les services. Avec des niveaux de respectivement 56,6 et 55,7, ils atteignent désormais des plus hauts depuis juillet 2014 et février 2018.

Comme le montre le graphique ci-avant, ces évolutions indiquent que le glissement annuel du PIB américain pourrait dépasser les 3 % d’ici l’été prochain. De quoi accroître encore l’écart avec la zone euro et alimenter la dépréciation de l’euro/dollar.

Pour ne rien arranger, la zone euro ne peut même plus compter sur son moteur habituel, en l’occurrence l’économie allemande. En effet, en mai, les indicateurs Markit relatifs à l’économie germanique ont continué leur plongeon entamé depuis le début 2018.

Allemagne : l’industrie au plus bas depuis février 2017 et les services depuis septembre 2016.

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Sources : Destatis, Markit, ACDEFI

Les chiffres sont sans appel. Dans l’industrie tout d’abord : – 1,3 point sur un mois et – 6,5 depuis décembre. Avec un niveau, certes encore appréciable de 56,8, cet indicateur avancé de la production industrielle retombe à un plus bas depuis février 2017.

Dans les services, l’inquiétude monte encore d’un cran, puisque l’indice Markit a perdu 0,9 point en mai, et 5,2 points depuis janvier. Il atteint désormais seulement 52,1, un plancher depuis septembre 2016.

Et, malheureusement, l’évolution des indices IFO a continué d’enfoncer le clou de la morosité. Certes, l’indice du climat des affaires a gagné 0,1 point en mai à 102,2. Cependant, il accuse toujours une baisse de 3 points au cours des quatre derniers mois.

Cette forte diminution confirme que le ralentissement de la croissance allemande du premier trimestre 2018 va se poursuivre au cours des trimestres suivants.

Et ce d’autant que l’indice IFO des perspectives d’activité a continué de reculer en mai.

Après une forte chute depuis décembre, l’indice IFO du climat des affaires s’est stabilisé en mai.

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Sources : Destatis, IFO, ACDEFI

Ainsi, après avoir déjà baissé de 1,3 point en avril, cet indicateur avancé de la croissance allemande en a encore perdu 0,2 en mai. Il enregistre ainsi un sixième mois consécutif de baisse, soit un plongeon total de 5,4 points.

Sa corrélation avec le glissement annuel du PIB allemand montre que ce dernier pourrait passer sous les 2 % d’ici le troisième trimestre 2018.

L’indice IFO des perspectives d’activité annonce une croissance allemande inférieure à 2 % pour les prochains trimestres.

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Sources : Destatis, IFO, ACDEFI

Bien entendu, l’économie française n’a pas réussi à inverser la tendance. Bien au contraire. Ainsi, après avoir déjà reculé de 4 points de janvier à avril, l’indice INSEE du climat des affaires en a encore perdus 2 en mai.

Avec un niveau de 106,2, il atteint désormais un plus bas depuis mai 2017 et montre que le glissement annuel du PIB français devrait rapidement retrouver la barre de 1,5 %, contre 2,5 % au quatrième trimestre 2017.

L’indice INSEE du climat des affaires annonce une nouvelle forte baisse de la croissance française.

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Sources : INSEE, ACDEFI

La perspective laissée par les indices Markit des directeurs d’achat est encore plus sombre. Certes, l’indice relatif à l’industrie a regagné 1,4 point en avril-mai, mais après en avoir perdus 5,1 au cours des trois mois précédents.

Beaucoup plus problématique, l’indice Markit « services » a continué de s’effondrer : – 3,1 points en mai et – 6,1 points depuis décembre dernier. Avec un niveau de 54,3, il atteint un plancher depuis janvier 2017.

Des évolutions qui annoncent un glissement annuel du PIB français proche de 1 % d’ici la fin de l’été prochain.

Les indices Markit voient plutôt la croissance française vers 1 % d’ici le troisième trimestre 2018.

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Sources : INSEE, Markit, ACDEFI

Avant même cette triste conjecture, le taux de chômage français mesuré par l’INSEE a déjà repris le chemin de la hausse au cours du premier trimestre 2018, atteignant 9,2 % contre 9,0 % au cours du trimestre précédent.

Pour ne rien arranger, l’indice INSEE du climat de l’emploi est reparti à la baisse en mai. Avec un niveau de 107,4, il atteint un plancher depuis août 2017 et indique que la remontée du chômage du premier trimestre 2018 est malheureusement appelée à se poursuivre.

Marc Touati