Confinement, déconfinement, reconfinement, « confinement assoupli » qui ne doit « surtout pas être assimilé à un déconfinement »… A l’évidence, les revirements incessants des dirigeants politiques français ont de quoi donner le tournis.
Et ce d’autant que les mesures annoncées pour les deux prochains mois relèvent presque du sketch comique.
Citons par exemple l’ouverture des stations de ski mais pas des remontées mécaniques. Les mots employés par le premier ministre Jean Castex pour préciser cette décision valent leur pesant d’or « il sera loisible à chacun de se rendre dans ces stations pour profiter de l’air pur de nos belles montagnes, des commerces – hors bars et restaurants – qui seront ouverts. Simplement, toutes les remontées mécaniques et les équipements collectifs seront fermés au public ». Il fallait quand même oser !
Pareillement, les commerces « non-essentiels » peuvent désormais ouvrir, mais avec un client pour 8 mètres carrés, contre 4 mètres carrés précédemment. Préparez vos doubles décimètres. Quant aux commerces de plus de 400 mètres carrés, c’est encore plus fort puisqu’un système de comptage des clients devra être instauré à l’entrée de chaque magasin pour garantir le respect de la jauge à l’intérieur du magasin.
En outre, pour Noël et le Jour de l’an, Jean Castex souligne qu’il sera « impératif » de limiter le nombre de convives, mais qu’il « n’est pas question que ces fêtes familiales se privent de la présence des aînés, notamment des grands-parents ». Et de préciser que le gouvernement allait « regarder ce que font tous les pays européens afin d’essayer d’en tirer quelques enseignements utiles quant à une éventuelle jauge à respecter ».
Non ! Vous ne rêvez, voilà où notre société en est arrivée ! Le problème c’est qu’avec de telles mesures aussi farfelues les unes que les autres, les humoristes vont bientôt se retrouver au chômage, car, pour faire rire, ils n’ont désormais plus rien à ajouter aux déclarations abracadabrantesques des dirigeants politiques français.
Mais, malheureusement, bien loin des parties de rigolades, les grands perdants de ces atermoiements sont encore et toujours l’économie française, ses entreprises, ses artisans, ses professionnels, ses salariés et ses citoyens au sens large.
Les dernières enquêtes de conjoncture sont d’ailleurs formelles : tandis qu’outre-Rhin, l’industrie affiche un dynamisme impressionnant, permettant à l’ensemble de l’économie allemande de résister, tandis que la croissance américaine rebondit fortement et durablement, l’économie française s’effondre et replonge dans la récession. Et ce, tant dans l’industrie que dans les services.
Les conséquences en termes d’emplois, de chômage et de déficits publics seront catastrophiques. D’ores et déjà et anticipant ces tristes résultats, l’indice INSEE de confiance des ménages a fortement chuté en novembre, enfonçant son plancher de la première vague épidémique du printemps 2020 et atteignant un plus bas depuis décembre 2018 et les émeutes des « gilets jeunes ».
Autrement dit, pour les Français, le deuxième confinement est pire que le premier. Et pour cause : particulièrement fragilisés tant d’un point de vue sanitaire que financier et psychologique, ceux-ci n’ont plus la force d’affronter un nouvel arrêt, même partiel, de l’économie.
Pour autant, ne tombons pas dans la facilité de laisser croire que cette situation dramatique ne serait que le produit de la pandémie. En effet, si l’économie française est l’une des plus affectées de la planète par la pandémie, c’est aussi et surtout à cause des multiples erreurs stratégiques des dirigeants politiques français depuis 40 ans.
Tout a commencé en 1981. A l’époque, en pleine récession mondiale, les Mitterrand, Mauroy, Attali et consorts voulaient nous faire croire que tout irait mieux en augmentant massivement la dépense et la dette publiques. Quelle erreur stratégique ! Car, après avoir été ouverte par facilité, la « boîte de pandore » n’a, comme son nom l’indique, jamais été refermée.
Ainsi, en dépit du bon sens, tous les dirigeants suivants ont continué dans cette même voie catastrophique. Si bien que la dette publique est passée de 20 % du PIB en 1980 à 100 % dès 2017, 114 % actuellement et bientôt 125 %. Dans le même temps, la France est devenue numéro un mondial en matière de poids des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques dans le PIB, avec des poids de respectivement 48 % et 56 %. Et ce, avant même la pandémie, qui va évidemment aggraver la situation.
Pour ne rien arranger, les dirigeants politiques français ont choisi de favoriser une économie désindustrialisée qui resterait compétitive comme par magie. Conséquence logique de cette triple « fuite en avant » (dette publique exorbitante, flambée des impôts, désindustrialisation) autant inefficace que suicidaire, la croissance structurelle de l’économie française est tombée de 2,5 % à 0,9 %. Quant au nombre de chômeurs, il a fortement augmenté, battant record sur record.
Face à ce triste panorama, la pandémie de coronavirus est donc simplement venue enfoncer le clou. En plus d’être humainement dramatique, elle a donc mis en relief nos fragilités et nos erreurs stratégiques passées. Dénoncer une telle situation n’est pas du « french bashing ». Loin s’en faut. Notre but est au contraire de réveiller les esprits de nos dirigeants pour qu’ils prennent enfin les bonnes décisions.
Et si, jusqu’à présent, nous avons souvent prêché dans le désert, espérons qu’un jour prochain (le plus rapidement possible), tous nos efforts paieront et que, ce faisant, notre « formidable France » retrouvera sa force, son panache et sa cohésion.
Marc Touati