L’humeur de la semaine

Le déficit interdit.

Le déficit interdit.

C’est certainement LA révolution économique (du moins en apparence) de l’actuelle législature, à savoir l’interdiction constitutionnelle du déficit budgétaire en France. Malheureusement, et comme souvent dans l’histoire économico-politique française, cette révolution n’est qu’apparente et relève plus de la communication politique que de la crédibilité économique. Tout d’abord, si elle votée, cette réforme ne s’appliquera qu’à l’horizon 2012. D’ores et déjà, il est donc clair que les dirigeants actuels du pays n’auront pas à gérer cette « révolution » apparente, à moins qu’ils soient tous reconduits au pouvoir en 2012. En outre, au-delà du choc des mots, la réalité de cette annonce est beaucoup moins percutante qu’on pourrait le penser. Enfin, avant de se fixer un objectif ambitieux, il faut s’en donner les moyens. Et, à l’instar des politiques pratiquées depuis vingt cinq ans dans l’Hexagone, ce n’est certainement pas les mesures de colmatages de brèches annoncées dernièrement qui permettront d’atteindre l’équilibre budgétaire. Pour y parvenir, il faut au contraire agir en amont des déficits, c’est-à-dire au niveau du fonctionnement des administrations publiques. Et ce, notamment, en introduisant des règles d’efficacité économique qui font qu’une dépense n’est engagée que si son efficacité économique et/ou sociale est prouvée. En outre, cette révolution doit également passer par un système de péréquation des dépenses qui permettrait de réallouer les fonds d’une administration en excédent vers une administration en déficit plutôt que de forcer la première à dépenser des fonds dont elle n’a plus besoin et à condition que ces sommes soit réallouées de façon efficace. Autrement dit, il suffirait d’introduire simplement un peu de bon sens et d’optimisation des dépenses dans les administrations publiques pour que ces dernières atteignent rapidement et durablement l’équilibre.

Une croissance mystérieuse.

Une croissance mystérieuse.

Il faut le reconnaître, nous n’avions pas anticipé que la croissance du PIB français atteindrait 0,6 % au premier trimestre 2008. Notre prévision d’une augmentation de seulement 0,3 % n’a donc pas été validée. Et le fait que le consensus prévoyait également une croissance faible à 0,4 % n’est évidemment pas suffisant pour nous réconforter. En fait, face à ce décalage, deux types de comportement sont possibles. Soit celui du profil bas et du retournement de veste, via une révision fortement haussière de notre prévision de croissance pour 2008 ; soit celui de la franchise qui nous impose de souligner que les comptes nationaux du premier trimestre nous paraissent mystérieux et nous amènent à appeler à la prudence : Non ! Madame Lagarde, ne criez pas victoire trop vite. Certes, à l’instar de la mauvaise fois de certains prévisionnistes qui, n’ayant pas anticipé la résistance de la croissance américaine au cours des derniers trimestres, ont annoncé que les chiffres étaient faux, nous pourrions également apparaître mauvais perdants. Pourtant, tel n’est pas notre cas. En effet, nous n’avons d’autres choix que d’accepter les chiffres de l’INSEE et de les considérer comme vrais. Néanmoins, il est également de notre devoir de souligner certaines anomalies dans les comptes nationaux français du premier trimestre. Voilà pourquoi nous sommes malheureusement contraints de maintenir notre scénario d’une croissance molle, c’est-à-dire inférieure à 1,8 % cette année et d’un taux de chômage qui continuera d’augmenter au cours des prochains trimestres. Après la magie des comptes nationaux du premier trimestre, il faudra donc bien redescendre sur terre…

En mai, fais ce qu’il te plait.

En mai, fais ce qu’il te plait.

Ce dicton populaire bien connu a rarement été aussi juste qu’en ce mois de mai 2008. Non parce qu’il correspond au quarantième anniversaire de mai 68. Non parce que le printemps semble enfin arriver dans le ciel hexagonale. Non parce que les investisseurs boursiers semblent également retrouver quelque espoir. Mais surtout parce que le nombre de jours travaillés risque d’être l’un des plus faibles de l’histoire française récente. Il s’agit d’ailleurs peut-être là d’un aperçu de ce qui attend l’économie française à l’horizon des quinze prochaines années. A savoir, de moins en moins d’industrie, de services aux entreprises, de recherche de pointe et aussi de moins en moins de travail. «En échange », la France aura droit à de plus en plus de loisirs, de tourisme, de services à la personne… Bref, la France deviendra un géant Disneyland où le mois de mai durera toute l’année. Peut-être idyllique pour certains, il faut néanmoins savoir que moins un pays travaille, moins son PIB augmente et plus le pouvoir d’achat se dégrade. Au cours des vingt dernières années, la France est d’ailleurs l’un des seuls pays au monde où le volume d’heures travaillées a baissé (- 8 %). Or, sur la même période, ce dernier agrégat a augmenté de 42 % aux Etats-Unis. Coïncidence qui n’en est pas une, toujours sur ces vingt années, l’écart de croissance entre la France et les Etats-Unis atteint 50 % (de moins pour nous bien entendu), soit le même écart que celui observé en matière de volume d’heures travaillées. Nous retrouvons là l’une des règles de base de l’économie et plus globalement de la vie : on n’a que ce que l’on mérite. Mais comme le dit la chanson : chacun fait ce qui lui plaît, surtout au mois de mai…

France et zone euro : le plongeon.

France et zone euro : le plongeon.

Il y a parfois des prévisions qu’on souhaiterait ne pas voir se réaliser. Ainsi, il y a un an, alors qu’à l’instar des dirigeants politiques, le consensus des prévisionnistes annonçait une croissance française d’environ 2,3 %, nous paraissions bien pessimistes avec nos 1,8 %, soit seulement 0,1 point de moins que la réalité. Depuis six mois, bis repetita : nous annonçons une croissance de 1,4 % pour cette année et le gouvernement s’est entêté à maintenir sa prévision de 2 à 2,5 % pour finalement la ramener dans une fourchette de 1,7 % à 2 %. Malheureusement, de nouveaux ajustements baissiers risquent de s’imposer dans les prochains mois. C’est du moins ce que laissent envisager les dernières publications statistiques qui sont décidemment cinglantes. D’où une question : comment les équipes de Sarkozy-Fillon vont-elles rebondir ? Si la rupture n’a pas eu lieu il y a un an, ce n’est évidemment pas maintenant qu’elle se produira. Il faudra donc composer avec des déficits publics et une dette publique de plus en plus élevés. Pour relancer la machine, nous n’aurons d’autre choix que d’attendre des soutiens de l’extérieur, qu’il s’agisse de la croissance américaine, de la baisse de l’euro ou encore du recul du prix du baril. En d’autres termes : 2008 est fichue, 2009 peut encore être sauvée de justesse mais ce n’est vraiment qu’en 2010 que le ciel français se dégagera. Du moins, si tout va bien…

Le G7 ne sert décidemment plus à grand chose.

Le G7 ne sert décidemment plus à grand chose.

Lors du sommet économique et financier du G7 dernier, une surprise de taille s’est produite : pour l’une des rares fois depuis le début des années 90, les dirigeants économiques et monétaires des soi-disant sept pays les plus riches de la planète ont osé l’impensable : rédiger un communiqué officiel faisant état de leur inquiétude quant à l’évolution excessive des devises internationales… Dans un premier temps, les marchés des changes ont réagi positivement en stoppant la nouvelle tendance baissière de l’euro/dollar. En deux jours, ce dernier est ainsi passé de 1,59 dollar pour un euro à 1,57. Malheureusement, cette accalmie n’a été que de courte durée. En effet, les membres du G7 ont beau essayer de sauver les apparences, leur impuissance est criante. Et pour cause : tant que la BCE ne baissera pas ses taux, les marchés auront des raisons objectives de spéculer à la hausse sur l’euro, et ce tant contre le dollar mais aussi dernièrement contre la livre sterling. Cette situation ne fait d’ailleurs que refléter la triste réalité entre une Réserve fédérale et une Banque d’Angleterre qui réagissent et essaient d’éviter le pire et une BCE qui refuse toujours de voir le ralentissement de la zone euro, ignore les risques qui pèsent sur les banques eurolandaises et, par là même, sur la stabilité financière et l’activité économique. Plus globalement, il est malheureusement clair qu’à l’instar du FMI, le G7 ne représente plus grand chose et n’a surtout plus beaucoup de moyens d’action. Il n’est finalement que l’un des derniers avatars d’anciennes puissances, désormais en déclin, qui n’arrivent même pas à se mettre d’accord pour éviter de sombrer dans la récession, au grand dam des marchés et dans un contexte où les pays émergents continuent sur leur lancée.

La Chine, tout feu tout flamme…

La Chine, tout feu tout flamme…

Alors que la flamme des jeux olympiques de Pékin passe de pays en pays et de fiasco en fiasco, la Chine, imperturbable, continue son bonhomme de chemin, défiant les règles usuelles de l’économie, de la finance et de la géopolitique. Ainsi, alors que l’ensemble des pays développés connaissent un ralentissement économique marqué, la Chine continue de croître à des rythmes supérieurs à 10 % en dépit du souhait de ses propres dirigeants de calmer la machine. En d’autres termes, alors que les pays occidentaux cherchent par tous les moyens à doper les chiffres de croissance, la Chine essaie de les limiter, en vain. Plus globalement, il faut d’ailleurs souligner qu’au-delà de la Chine, cette déconnexion d’avec la croissance du monde développé concerne l’ensemble des pays dits émergents. Si bien qu’au total, ces derniers ont réalisé 60 % de la croissance mondiale en 2006, 65 % en 2007 et certainement 68 % cette année. En fait, si ce découplage est une première pour le monde émergent dans sa globalité, il n’est pas nouveau pour l’économie chinoise. Ainsi, que ce soit lors de la récession américaine de 1991, de la crise asiatique de 1998 ou encore de la baisse d’activité de 2001 aux Etats-Unis, la Chine n’a quasiment rien senti, continuant de croître sur des rythmes de 9 % à 12 %.

D’une bulle à l’autre…

D’une bulle à l’autre…

A l’instar de la spéculation qui fait partie intégrante de la vie des marchés financiers, les phénomènes de bulles et réciproquement de krach sont inévitables. Ils correspondent simplement au fait que la vie économique et financière est incertaine et que les investisseurs sont mus par ce que Keynes appelait les animal spirits, c’est-à-dire les instincts animaux qui font que, dans le doute, le mimétisme est préféré à la rationalité économique. Vouloir lutter contre les bulles serait donc par définition voué à l’échec, à moins de vouloir fermer les marchés financiers. Dans la mesure où ce dernier cas de figure paraît peu probable et surtout peu souhaitable, le travail des économistes et analystes consiste alors à identifier ces bulles et, autant que faire se peut, à essayer de prévoir leur dégonflement et le cas échéant l’ampleur et la brutalité de ce dernier. En fait, sans remonter à la bulle de la tulipe hollandaise du 17ème siècle, il est possible d’observer que, généralement, les bulles s’enchaînent les unes aux autres, avec plus ou moins de conséquences néfastes. Ainsi, à la bulle immobilière américaine de la fin des années 80 et du début des années 90 a succédé la bulle des pays émergents qui a très vite éclaté pour donner ensuite naissance à la bulle internet, qui a, elle-même, été suivie par une nouvelle bulle immobilière qui est donc en train de se dégonfler depuis 2006, ce qui a immédiatement donné naissance à une autre bulle sur les matières premières…

France : de mal en pis…

France : de mal en pis…

Encore une semaine difficile pour l’économie française : si la confiance des industriels a miraculeusement augmenté, celle des entreprises dans les services a poursuivi son plongeon, la confiance des ménages en a fait de même et le déficit public a atteint 2,7 % du PIB, se dirigeant tranquillement vers la barre des 3 % pour 2008. Plus les mois passent, plus l’équation s’annonce donc difficile pour nos dirigeants politiques mais aussi pour l’ensemble des citoyens français qui continuent donc de broyer du noir. Pour être encore plus clair : la France va prendre la présidence de l’Union européenne en juillet prochain avec une triple casquette bien peu réjouissante : une des plus mauvaises performances de croissance de la zone euro, un déficit public qui atteindra de nouveau la frontière de Maastricht et une dette publique qui dépassera de presque dix points son niveau autorisé par le pacte de stabilité. Une question se pose alors : l’adversité incitera-t-elle les dirigeants français à engager (enfin !) la France sur le chemin de la modernisation économique ou bien, au contraire, constituera-t-elle un frein à l’avènement des réformes structurelles tant annoncées et tant oubliées ? La réponse n’est pas encore claire mais, malheureusement, il faut reconnaître que la deuxième solution ne cesse de gagner du terrain…

Fed-BCE : il y a bien un pilote dans l’avion, nous attendons le copilote.

Fed-BCE : il y a bien un pilote dans l’avion, nous attendons le copilote.

La Fed baisse ses taux sans “obéir” aux souhaits des marchés. Elle confirme ainsi qu’elle est prête à tout faire pour éviter une forte récession, mais aussi qu’elle sait garder son sang-froid. Autrement dit : il y a bien un pilote dans l’avion qui évitera le crash. En revanche, les bourses mondiales restent fragiles. Et pour cause : il n’y a toujours pas de copilote ou du moins il reste les yeux rivés sur la jauge d’inflation sans se rendre compte que l’altitude chute dangereusement. Dès lors, à partir du moment où la BCE réalisera que la croissance eurolandaise est en train de s’écrouler et que les banques eurolandaises sont au moins autant fragilisées que leurs homologues américaines, elle baissera son taux refi, en juin selon nous. Les investisseurs internationaux pourront alors être vraiment rassurés. Ils atténueront donc leur comportement de spéculation sur les matières premières et sur l’euro pour revenir à leur métier de base : l’investissement boursier. Le fond du trou est donc bien en train d’être atteint sur le front de la croissance américaine et des marchés boursiers. En revanche, il ne sera touché qu’en fin d’année voire en 2009 en matière de croissance eurolandaise. La triste expérience de 2002-2003 (rebond américain et plongeon eurolandais) est donc en train de se répéter.

Réformer sans rigueur mais avec vigueur !

Réformer sans rigueur mais avec vigueur !

Les élections municipales passées, le gouvernement français n’a désormais plus d’excuses (à compter que les municipales en fussent une) pour ne pas s’engager (enfin !) dans la rupture tant annoncée et pour l’instant largement oubliée. Certes, quelques réformettes ont bien été menées, mais leur impact sur la croissance structurelle de l’économie française reste particulièrement faible et/ou ont été obtenues aux prix de concessions fort coûteuses. Faut-il pour autant engager à présent une phase de rigueur ? Certainement pas. Ce serait suicidaire. Non seulement pour la cote de popularité des dirigeants français, mais surtout pour l’économie hexagonale. Déjà particulièrement affaiblie, cette dernière ne s’en remettrait pas et sa croissance tomberait vers les 1 %. Ce qui ne manquerait évidemment pas d’aggraver le pessimisme des ménages, mais aussi des entreprises, faisant peser de graves risques sur la stabilité sociale du pays. Bien loin de ce triste scénario (qui n’est certes pas impossible), nous soutenons qu’il est tout à fait envisageable de réformer en profondeur l’économie française sans rigueur mais au contraire en relançant cette dernière. Car il est clair que, sans relance, la croissance ne repartira pas de sitôt. Explications…