L’humeur de la semaine

Mad Off !

Mad Off !

Depuis l’été 2007 et le début de la crise des subprimes, on pensait avoir tout vu : refus des banques de se prêter entre elles sur le marchés interbancaire, plongeon boursier, pertes abyssales de certaines institutions financières, écroulement du billet vert, baril à 150 dollars, blé à 13 dollars le boisseau, hausse des taux directeurs de la BCE en pleine récession eurolandaise, faillite de Bear Stearns puis de Lehman Brothers, panique des particuliers allant retirer leurs liquidités aux guichets de certaines banques, plan de sauvetage bancaire refusé par le Congrès américain, avènement d’une récession mondiale, voire d’une déflation planétaire. Mais non ! Nous n’avions pas tout vu. Ainsi, cerise (empoisonnée) sur le gâteau des horreurs économiques et financières des années 2007-2008, la plus grande fraude de l’histoire contemporaine vient d’être découverte. Elle porte sur un montant d’environ 50 milliards de dollars et fonctionne depuis près de vingt ans. En fait, ce que l’on appelle désormais l’affaire Madoff synthétise parfaitement les tenants et les aboutissants de la crise financière. En effet, cette dernière a pour origine principale un aveuglement collectif et presque généralisé. Celui de croire ou de laisser croire que l’on pouvait cumuler fort rendement et risque faible. Et ce, que ce soit au travers d’une mathématisation extrême des produits financiers ou tout simplement par le biais d’un abus de confiance en des personnes tellement intelligentes et/ou tellement respectées qu’elles en devenaient intouchables. C’est peut-être là que résidera la vertu de cette crise. Car désormais, du moins pendant un certain temps, les investisseurs, les banques et les épargnants vont devoir retrouver quelques règles de bon sens, réduire leur appétence en termes de rendements, mieux gérer le risque et finalement favoriser une meilleure connexion entre les variables financières et les fondamentaux économiques. « Bernie » avait donc peut-être un nom prémonitoire : la finance Mad (folle) se trouve dorénavant en position Off…

Le yoyo boursier n’en finit plus…

Le yoyo boursier n’en finit plus…

Depuis un peu plus de deux mois, le Cac 40 est devenu une véritable girouette : – 23,9 % du 1er au 27 octobre, + 20,3 % au cours des six jours suivants, – 21,9 % du 5 au 21 novembre, + 13,2 % la semaine suivante, – 8,4 % ensuite et enfin + 4,5 % la semaine dernière. Lorsqu’en septembre dernier, nous écrivions que les amateurs des montagnes russes seraient gâtés sur les marchés boursiers, nous étions loin d’imaginer que la volatilité de ces derniers serait si forte. Et pour cause : depuis la faillite de Lehman Brothers et la panique qui en a découlé, les investisseurs et autres intervenants sur les marchés ont perdu tous leurs repères. Si bien que leur horizon de placement s’est considérablement réduit. En effet, celui-ci ne se mesure plus en mois (comme le voudrait le fonctionnement normal des marchés boursiers), ni en semaines, ni même en jours, mais en heures. Dès lors, toute nouvelle économique, financière ou politique donne lieu à une sur-réaction extrême dans une proportion rarement rencontrée. La raison de court-termisme viscéral est malheureusement simple : ayant perdu tous leurs repères depuis le 15 septembre, évoluant dans un brouillard complet, les investisseurs n’ont plus la possibilité matérielle de se projeter dans un avenir qui dépasse la semaine. Dès lors, ils naviguent à vue, en espérant ne pas tomber sur un récif inattendu. Le problème réside dans le fait qu’un tel comportement revient à fragiliser l’ensemble des acteurs économiques et financiers, d’où un nouvel épaississement du brouillard and the beat goes on… Une question angoissante se pose alors : quand et comment allons nous sortir de ce cercle pernicieux ?

Une leçon de sang-froid

Une leçon de sang-froid

Les ménages sont formidables. Qu’ils soient américains, allemands ou français, ils refusent de céder au pessimisme et indiquent une légère amélioration de leur moral dans les enquêtes de conjoncture menées auprès d’eux. Certes, aux Etats-Unis, un effet Obama a certainement joué permettant par là même aux Américains de retrouver quelques couleurs. A l’inverse, que ce soit en Allemagne et en France, aucun effet de ce genre n’est observable, même s’il est vrai que les Français pourraient trouver satisfaction à voir leur Président mis en valeur sur la scène internationale lors de la crise financière. Toujours est-il que dans un contexte d’augmentation du chômage, de morosité exacerbée des entreprises, l’augmentation du moral des ménages a de quoi surprendre. Ainsi, après avoir augmenté de deux points en octobre, l’indice de confiance des ménages français en a gagné 3 en novembre, retrouvant un « plus haut » depuis mai 2008. Plus globalement, ce retour de l’espoir tranche avec l’effondrement du moral des chefs d’entreprise. En novembre, ce dernier a ainsi atteint un plus bas depuis octobre 1993. Pis, les perspectives générales de production des industriels français ont atteint un plus bas historique, jamais rencontré depuis la création de l’enquête INSEE dans l’industrie en 1976… Une question s’impose alors : les ménages français sont-ils sont prozac ou bien sont-ce les chefs d’entreprise, les investisseurs financiers et les hommes politiques qui ont sombré dans un comportement dépressif et suicidaire ? En fait, la réalité est certainement entre les deux…

La BCE a encore du pain sur la planche

Enfin ! Il aura donc fallu attendre l’aggravation historique de la récession dans la zone euro pour que la BCE se décide à voir la réalité en face et à agir avec vigueur. Dans ce cadre, la baisse du taux refi de 75 points de base aujourd’hui constitue assurément une bonne nouvelle. Pour autant, il n’y a aucunement de quoi sauter au plafond. Et ce pour au moins trois grandes raisons. Aussi, nous anticipons que la BCE continuera de se faire violence et baissera son taux refi à 1,75 % d’ici le printemps prochain, ce qui constituera un plus bas historique depuis la création de la BCE. L’euro baissera alors sous les 1,20 dollar et la croissance eurolandaise pourra progressivement repartir à partir de l’été-automne 2009. Mieux vaut tard que jamais.

Euroland : la récession et après ?

Euroland : la récession et après ?

De mal en pis. Après être entrée en récession dès le printemps 2008, soit bien avant la panique bancaire et boursière de septembre-octobre, la zone euro ne présente aucun signe de redémarrage à court terme. Ainsi, après avoir déjà plongé de 31,6 points entre l’été 2007 et octobre 2008, l’indice de sentiment économique calculé par la Commission Européenne pour l’ensemble de l’Euroland en a encore perdu 5,1 sur le seul mois de novembre. Avec un niveau de 74,9, cet indicateur avancé de la croissance eurolandaise atteint ainsi un plus bas depuis août 1993. Dans ce cadre, le glissement annuel du PIB de la zone euro devrait passer de 2,1 % au premier trimestre 2008 à – 0,7 % au quatrième trimestre 2008 ou, au plus tard, au premier trimestre 2009. Selon toute vraisemblance, les autorités monétaires et politiques devraient enfin réagir. C’est du moins ce que laissent penser les déclarations des responsables de la BCE et les annonces des principaux gouvernements de la zone. Dans ce cadre, la BCE devrait abaisser son taux refi à 2 % au plus vite, l’euro devrait se stabiliser autour des 1,20 dollar et des plans de relance budgétaire devraient être mis en place dans l’ensemble des pays de la zone d’ici le début 2009. La question est alors de savoir si toutes ces démarches seront suffisantes et surtout efficaces…

A quand le retour de la fièvre acheteuse ?

Ah qu’elle paraît loin la fièvre acheteuse dont faisait preuve les ménages français il n’y a encore pas si longtemps… Après la bonne surprise de septembre, la morosité a donc malheureusement repris le dessus en octobre sur le front de la consommation française. En fait, dans un contexte de crise financière et de forte incertitude notamment en matière d’emploi, les consommateurs français n’ont eu d’autres choix que de déposer les armes en octobre. Et compte tenu de la poursuite de la sinistrose, une évolution similaire devrait d’ailleurs s’observer en novembre. Néanmoins, il ne nous paraît pas opportun de sombrer dans le pessimisme, notamment grâce à la baisse des prix énergétiques et de l’ensemble des matières premières et au recul des taux d’intérêt. Notre prévision d’évolution de la consommation hexagonale est la suivante : un mois de novembre encore mou, des fêtes de fin d’année et des soldes d’hiver de bonne facture mais sans plus, puis une traversée du désert jusqu’a l’été, qui devrait d’ailleurs marquer la fin de la récession française.

Bush + Trichet : les « Bushet » de l’année.

Bush + Trichet : les « Bushet » de l’année.

Comme chaque fin d’année, les rédactions des grands journaux de la planète phosphorent pour décerner le titre d’homme de l’année. Ce dernier n’est pas forcément un bienfaiteur de l’humanité mais est généralement celui qui a le plus marqué les esprits de par ses actions. Ainsi, en 2001, les deux hommes qui reçurent ce « prix » furent George Bush et Ben Laden, pour les tristes raisons que nous savons. L’an passé, le Financial Times décerna ce titre à Jean-Claude Trichet pour avoir refusé de baisser ses taux d’intérêt et avoir annoncé avant tout le monde que l’hyperinflation était à nos portes et allait déferler sur l’Euroland en 2008. Pour cette année, nous leur conseillons de nommer un nouveau duo, en l’occurrence le charismatique George W. Bush et le formidable Jean-Claude Trichet. En effet, par leur clairvoyance et leur professionnalisme, ces deux personnalités ont permis à l’année 2008 d’être l’une des plus exceptionnelles en matière de catastrophe économique et financière. Et si George Bush va rejoindre son ranch en janvier prochain et ne nous gratifiera plus de sa maestria, le mandat de l’ami Jean-Claude ne se termine qu’en 2011. Il aura donc encore le loisir de nous dispenser ses bienfaits et peut-être même de devenir pour une troisième fois l’homme de l’année…

BCE et BoE : Adieu le monétarisme.

BCE et BoE : Adieu le monétarisme.

Sans surprise, la BCE a donc abaissé son taux refi de 0,5 point. Avec un niveau de 3,25 %, celui-ci retrouve donc un niveau relativement accommodant. Il aura donc fallu attendre la baisse du PIB eurolandais au deuxième trimestre, une crise financière sans précédent et la confirmation que la zone euro est engagée dans sa plus grave récession depuis 1993 pour que la BCE comprenne la gravité de la situation. Mieux vaut tard que jamais, pourrait-on dire. Si ce n’est que, compte tenu d’un délai de six à neuf mois entre la baisse des taux et son impact sur l’activité, la zone euro est déjà condamnée à vivre dans la récession jusqu’à l’été 2009. Cela constituera donc une récession de plus d’un an, du jamais vu depuis le second choc pétrolier. En outre, si certains pensent encore que la baisse des taux directeurs de la BCE va permettre de relancer le crédit à tout va et, avec lui, les excès de la bulle immobilière, il faut bien leur signaler qu’actuellement, la BCE n’a plus le choix : si elle ne continue pas de baisser le taux refi, elle engagera la zone euro dans une déflation, qui est, rappelons-le, le pire des maux en économie. Espérons donc simplement que la BCE ne retrouvera pas ses vieux démons monétaristes et qu’elle fera bien tout pour sortir l’Euroland de la léthargie. Si tel est le cas, alors peut-être qu’après avoir lancé stoptrichet.com en juin dernier, nous lancerons yestrichet.com. C’est tout le mal que nous pouvons souhaiter à notre pauvre zone euro qui s’apprête à vivre une période bien difficile.

L’Oncle Sam fait de la résistance et l’Euroland plonge.

L’Oncle Sam fait de la résistance et l’Euroland plonge.

Pour le cinquième trimestre consécutif, l’économie américaine a encore évité le marasme que la grande majorité des prévisionnistes et observateurs économiques lui annoncent depuis l’été 2007. Certes, avec une baisse du PIB de 0,3 % au troisième trimestre 2008, il n’y a évidemment pas de quoi sauter au plafond. Ceci dit, n’oublions pas que ce chiffre est mesuré en rythme annualisé, ce qui signifie que d’un trimestre sur l’autre, le PIB américain n’a reculé que de 0,06 %. Compte tenu d’un acquis de croissance de 1,6 % au sortir du troisième trimestre et en dépit d’une probable baisse du PIB d’environ 1 % en rythme annualisé au quatrième trimestre, le PIB devrait tout de même afficher une progression annuelle moyenne d’environ 1,5 % cette année, soit tout de même 1 point de plus que les prévisions consensuelles d’il y a encore quelques semaines. Quant à 2009, en dépit d’un acquis fin 2008 proche de zéro, la croissance devrait également franchir, voire dépasser la barre des 1,5 %. A l’inverse, comme l’a encore montré l’effondrement de l’indice de sentiment économique de l’ensemble de la zone euro en octobre (à un plus bas depuis novembre 1993), la zone euro est bien engagée depuis le deuxième trimestre dernier et au moins jusqu’au début 2009 dans une récession analogue à celles de 1975 et de 1993.

Les chiens aboient et les ménages français consomment…

Les chiens aboient et les ménages français consomment…

C’est impressionnant. Alors que les marchés financiers internationaux et leurs acteurs paniquent, alors que les gouvernements de la planète s’affolent, alors que les chefs d’entreprise broient du noir et tandis que les « meilleurs » économistes et analystes du monde se sont lancés dans une surenchère de pessimisme, les ménages français continuent de consommer. Certes, un point ne fait pas une tendance et l’augmentation de 0,6 % de la consommation en produits manufacturés dans l’Hexagone en septembre constitue certainement un dernier baroud d’honneur avant une période difficile. Néanmoins, dans un contexte aussi noir qu’aujourd’hui, cette petite lumière prend une dimension colossale. En effet, à côté de la crise financière la plus grave depuis 1929, les économies française et mondiale vont pouvoir bénéficier d’évolutions très favorables. A commencer par le plongeon des cours du baril et de nombreuses matières premières. Cette baisse va évidemment permettre d’améliorer le pouvoir d’achat et de relancer des dépenses qui étaient antérieurement détruites par la flambée des prix alimentaires et énergétiques. Dans le même temps, la baisse des taux d’intérêt passée et à venir, mais aussi, pour nous Eurolandais, la baisse de l’euro vont permettre de soutenir l’activité à partir du printemps 2009. Enfin, même s’il n’est pas parfait, le plan de soutien des banques va permettre à ces dernières de refaire progressivement leur vrai métier, à savoir le financement de l’économie. Autrement dit, après une croissance d’environ 0,9 % cette année, l’économie française commencera à redémarrer à partir du printemps-été prochain.