Comme nous l’annonçons depuis plusieurs mois, la volatilité s’est non seulement installée sur les marchés financiers, mais ne cesse de s’intensifier. Ainsi, au gré des déclarations de Donald Trump, des sondages sur l’issue des élections présidentielles françaises, ou encore des annonces du FMI sur l’état de l’économie grecque, les marchés passent de l’euphorie à la déprime et réciproquement. Une fois encore, il est donc indispensable de garder la tête froide et de faire ses prévisions sur la base des fondamentaux économiques. Ainsi, au regard de ces derniers, il ne fait aucun doute que les marchés boursiers et obligataires sont surévalués et que des ajustements baissiers sur les cours des actions et haussiers sur les taux des obligations d’Etat vont se produire dans les prochains mois. Et ce d’autant que l’instabilité politique va rester forte. D’ores et déjà, les taux des obligations des Etats eurolandais ont fortement augmenté au cours des derniers mois, une tension qui s’intensifie depuis quelques semaines. Il n’y a donc plus de doute : le krach obligataire a bien commencé dans la zone euro et ne manquera pas de s’intensifier au cours des prochains mois. Avec un premier test majeur : les élections législatives néerlandaises du 15 mars. Si l’extrême droite l’emporte et a fortiori si elle peut former un gouvernement (ce qui n’est pour le moment pas envisagé), les marchés obligataires mais aussi boursiers devraient connaître de fortes secousses.
Zone euro et Etats-Unis : l’inflation revient, mais la croissance ne flambe pas.
Pendant que la France s’enfonce dans une crise politique dangereuse, le retour de l’inflation se confirme un peu partout dans la zone euro, mais la croissance y reste modérée. Ainsi, en janvier, le glissement annuel des prix à la consommation a atteint 1,9 %, un plus haut depuis juillet 2013. Dans la zone euro, avec un niveau de 1,8 %, l’inflation atteint un sommet depuis février 2013. En France aussi, l’inflation poursuit sa remontée, mais avec un niveau de seulement 1,4 % en janvier, qui constitue néanmoins un plus haut depuis novembre 2012. Malheureusement, cette « reflation » française s’accompagne d’une augmentation du taux chômage, qui a atteint 9,6 % en décembre. Un niveau à comparer aux 9,5 % de la zone euro et surtout aux 4,8 % du Royaume-Uni et aux 3,9 % de l’Allemagne…
France et zone euro : la croissance toujours fragile.
Comme nous l’annoncions la semaine dernière dans nos prévisions des publications statistiques hebdomadaires, ces dernières ont bien fait état d’un mouvement de temporisation de la croissance. Certes, comme prévu également, la croissance chinoise a gagné 0,1 point, pour atteindre 6,8 % au quatrième trimestre 2017. Cela porte son niveau annuel moyen à 6,7 %, un plus bas depuis 1990. Dans le même temps, les indicateurs Markit des directeurs d’achat dans la zone euro se sont améliorés dans l’industrie, mais ont encore reculé dans les services. De quoi confirmer qu’en dépit de la « planche à billets » de la BCE et de la faiblesse de l’euro, la croissance des pays de l’UEM reste fragile. La situation de l’économie française n’est malheureusement guère plus réjouissante, puisque l’indice INSEE du climat des affaires est déjà reparti à la baisse en janvier. Et malheureusement, à présent que l’économie française va entrer dans une phase d’attentisme pré-électoral, il faut se préparer à de nouveaux mois difficiles pour ce drame humain qu’est le chômage de masse.
L’économie américaine accueille Trump avec le sourire.
A l’instar de George Bush père et fils (respectivement en 1989 et 2001), Donald Trump débute son mandat dans un contexte économique favorable. Le taux de chômage est proche du plein-emploi, la croissance se reprend après un trou d’air au premier semestre 2015, les indicateurs de confiance des chefs d’entreprise et des ménages sont au beau fixe et l’inflation oscille autour des 2 %. Il ne reste plus qu’à espérer que la baisse des impôts et les projets d’investissement promis par Donald Trump produiront vite leurs effets pour permettre à la croissance de se stabiliser autour des 2,5 % et de ne pas trop pâtir de la remontée des taux d’intérêt monétaires et obligataires. Un pari tout à fait jouable et qui, s’il est réussi, permettra au nouveau président des Etats-Unis de calmer ses ardeurs protectionnistes. Car si jamais ces dernières devaient être matérialisées, un fort ralentissement américain et mondial s’ensuivrait. Autrement dit, avec Trump ce sera quitte ou double et nous serons fixés dès 2017. Hold on !
Zone euro : un peu d’inflation et toujours trop de chômage.
Cette semaine encore, l’amélioration de la conjoncture se confirme dans la zone euro. Ainsi, après la bonne tenue des indices PMI des directeurs d’achat de décembre, l’indice de sentiment économique a progressé de 1,3 point en décembre, ce qui porte sa progression à 4,3 points depuis août dernier. Encore mieux : avec un niveau de 107,8, il retrouve son précédent sommet de février 2011, qui est lui-même un plus haut depuis août 2007, c’est-à-dire avant le tout début de la crise des « subprimes ». Dans le sillage du renforcement de la croissance, l’inflation continue également de progresser. En décembre, le glissement annuel des prix à la consommation a augmenté de 0,5 point, atteignant 1,1 %, un plus haut depuis septembre 2013. Pour autant, en dépit d’une décrue notable depuis deux ans, le taux de chômage reste encore trop élevé dans de nombreux pays de l’UEM. En novembre, le taux de chômage de la zone euro dans son ensemble s’est ainsi stabilisé à 9,8 %, soit encore 2,6 points au-dessus du niveau qui prévalait début 2008…
En 2017, la croissance sera là, mais la volatilité s’intensifiera.
Comme nous l’avons annoncé dans notre « humeur », l’année 2017 commence plutôt bien, notamment sous l’angle des enquêtes des directeurs d’achat, qui montrent que la croissance mondiale devrait continuer de s’améliorer au cours des prochains trimestres. Ainsi, en décembre, l’indice PMI « Monde » a atteint un niveau de 52,7, un plus haut depuis 34 mois ! Cependant, de très nombreux risques pèsent sur la stabilité économique et financière internationale et leur matérialisation pourrait affecter l’état de la croissance mondiale. Voilà pourquoi, nous anticipons que la progression de la richesse mondiale (évidemment hors inflation) ne sera « que » 3,3 % en 2017 (nos prévisions sont détaillées ci-après). Ce qui ne sera certes pas si mal, mais encore largement insuffisant pour justifier l’envolée récente des bourses et notamment du Dow Jones. Depuis trois ans, les performances du Dow Jones sont déconnectées de la réalité économique mondiale. Cet écart s’explique évidemment par le caractère excessivement accommodant des politiques monétaires occidentales, mais aussi tout simplement par la formation d’une bulle. Et, selon nous, celle-ci finira forcément par se dégonfler en 2017, sans pour autant éclater et générer une récession mondiale. Ouf !
En 2016, le pire a été évité, de justesse.
En dépit des craintes et des dangers, le pire a donc finalement été évité en 2016. Rien de mieux que quelques graphiques pour s’en rendre compte. Ainsi, après un début d’année difficile, la croissance mondiale a réussi à se redresser à partir de l’été, pour finalement atteindre 2,8 %, voire 3 % si l’on en croit les prévisions (certes un peu optimistes) du FMI. Comme d’habitude, c’est le monde émergent qui a permis de tirer la croissance mondiale vers le haut, en particulier grâce à la Chine et l’Inde. Après avoir fait craindre le pire, la croissance chinoise est restée proche de 7 %, notamment grâce à la résistance de la consommation des ménages et de l’investissement dans l’industrie. Dans le même temps, alors que sa victoire aux Présidentielles américaines faisait craindre le pire, Donald Trump a réussi à rassurer les marchés, mais aussi les acteurs économiques des Etats-Unis. A commencer par les entreprises, mais aussi les ménages. Ainsi l’indice de confiance de ces deniers calculé par le « Conference Board » a flambé en novembre et décembre, atteignant même 113,7 au cours de ce dernier mois, un plus haut depuis juillet 2001 ! Parallèlement, les marchés boursiers ont nettement progressé en fin d’année, en particulier outre-Atlantique, avec de nouveaux records historiques pour le Dow Jones. Une remontée boursière internationale qui fait davantage penser à la formation d’une nouvelle bulle plutôt qu’à l’avènement d’une tendance durablement haussière. De quoi rappeler qu’en 2016, le pire a été évité, mais de justesse…
Dette publique et taux obligataires : attention aux lendemains qui déchantent.
Encore un nouveau cadeau de Noël pour l’économie française : après la baisse de l’euro, la croissance miraculeuse de 0,2 % au troisième trimestre, la baisse (certes artificielle) du chômage, le rebond des indicateurs du climat des affaires, sans oublier le soutien permanent la « planche à billets » de la BCE, c’est au tour de la dette publique de créer la bonne surprise. Ainsi, au troisième trimestre 2016, son poids dans le PIB a atteint 97,6 %, contre 98,5 % au cours du trimestre précédent. Il ne faudrait cependant pas crier victoire trop vite. D’abord parce que cette réduction s’explique principalement par un effet calendaire et une bonne gestion de la dette par l’Agence France Trésor. Ensuite, le niveau du deuxième trimestre a été révisée à la hausse, de 0,1 point à 98,5 %. Ainsi, sur l’ensemble des trois trimestres de l’année 2016, la dette publique représente 97,9 % du PIB, soit 0,9 point de plus qu’en 2015. Sur l’ensemble de l’année 2016, elle devrait atteindre 98 % du PIB, un nouveau record historique, qui ne permet évidemment pas de pavoiser. Aussi, compte tenu d’une dette publique encore beaucoup trop élevée, et malgré la « morphine » dilapidée par la BCE, les taux des obligations d’Etat vont continuer de se tendre en 2017, en particulier en France…
Conjoncture mondiale : encore des bonnes nouvelles, mais…
Et ça continue ! Comme nous le mettons en avant depuis deux mois, les indicateurs avancés de la conjoncture mondiale ne cessent de s’améliorer et c’est tant mieux ! Une fois encore, la Chine a ouvert la marche. Ainsi, après la bonne tenue des indicateurs Caixin des directeurs d’achat dans l’industrie et les services (respectivement 50,9 et 53,1 en novembre), l’évolution des ventes au détail et celle de la production industrielle ont confirmé que la croissance chinoise était bien en train de se redresse au-delà des 7 %. Mais ce n’est pas tout, puisque, compte tenu de la bonne orientation de ses indicateurs avancés, la croissance américaine pourrait bien créer la surprise en 2017 en retrouvant, voire dépassant, la barre des 2 %. Enfin, cerise sur le gâteau, la zone euro devrait bénéficier de la faiblesse de l’euro pour se stabiliser autour de 1,5 %. Enfin, même la France a surpris par la bonne tenue de ses indicateurs avancés… Attention néanmoins à ne pas crier victoire trop vite, car la fragilité reste de mise.
L’Oncle Sam et le dollar resteront forts, mais…
Dès son élection à la présidence des Etats-Unis, nous avons souligné que Donald Trump pourrait bien devenir le nouveau Ronald Reagan, dont l’Amérique a tant besoin pour retrouver le chemin de la confiance et de la croissance forte. Même si le contexte international est complètement différent (nous sommes effectivement loin de la guerre froide, du choc pétrolier et du poids économique insignifiant de la Chine qui prévalaient au début des années 1980), les similitudes entre les deux Présidences sont troublantes. Pour faire simple : en 1980, comme en 2016, l’économie américaine était présentée comme déclinante et le Président Reagan, ancien acteur de série B, était généralement perçu comme incompétent, dangereux et symptomatique du déclin de l’Oncle Sam. Et, pourtant, Reagan réussit l’impensable : sauver les Etats-Unis, notamment en modernisant son économie et en redonnant confiance au peuple américain. Si Donald Trump n’en est évidemment pas encore là, force est de constater que les conjectures catastrophistes avancées lors de sa victoire n’ont pas eu lieu. Bien au contraire. En effet, la confiance des ménages américains a flambé en novembre et les indices de moral des chefs d’entreprise en ont fait de même. De plus, tous les ingrédients sont bien présents pour renforcer le dollar, notamment face à l’euro. Attention néanmoins aux lendemains difficiles, notamment sur les marchés obligataires et boursiers…