Indicateurs avancés : la Chine rebondit, mais le reste du monde reste en récession.

C’est certainement la première vraie bonne nouvelle économique depuis cinq mois : en mai, les indicateurs Caixin des directeurs d’achat chinois ont fortement rebondi. L’indice relatif à l’activité à venir dans les services est ainsi passé d’un plancher de 26,5 en février 2020 à 44,4 en avril et 55,0 en mai, soit un sommet depuis octobre 2010.

Parallèlement, l’indice Caixin dans l’industrie a atteint un niveau de 50,7 en mai. C’est certes tout juste au-dessus de la frontière entre le recul et la progression de l’activité, mais en hausse de 1,3 point par rapport à avril et de 10,4 points comparativement à février.

Conséquence logique de ces bonnes nouvelles, l’indice Caixin « composite » a progressé de 6,9 points sur le seul mois de mai et de 27 points par rapport à son plancher de février. Avec un niveau de 54,5, il atteint un sommet depuis janvier 2011.

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Chine : l’indice Caixin « services » au plus haut depuis octobre 2010.

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Sources : NBSC, Caixin, ACDEFI

Autrement dit, s’il ne faut évidemment pas tirer de conséquences hâtives de ces évolutions, elles montrent néanmoins que l’économie chinoise est en train de sortir de la récession.

Malheureusement, la Chine est le seul pays à afficher de telles perspectives. En effet, tous les autres pays de la planète publiant des enquêtes des directeurs d’achat restent engoncés dans la récession, voire, pour beaucoup, dans la dépression économique.

Et ce, tant dans l’industrie que dans les services. Certes, dans la très grande majorité des cas, les indices des directeurs d’achat ont augmenté en mai. Cependant, ils restent encore très loin de la barre des 50.

 

L’industrie mondiale demeure engoncée dans une grave récession.

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Sources : Markit, ACDEFI

Dans l’industrie, comme le montre le tableau ci-dessus, seul l’indice de la Chine a dépassé la frontière dans le bon sens.

L’indice « Monde » a progressé de 2,8 points en mai, tout en demeurant très faible à 42,4, c’est-à-dire un niveau proche de ceux qui prévalaient lors de la récession de 2009.

Beaucoup plus problématique, les indices « services » sont restés très faibles, à l’exception notable de celui de la Chine, comme nous l’avons vu précédemment. Ainsi, en dépit d’un rebond correctif après l’effondrement historique d’avril, la plupart des pays affichent des indices oscillant autour des 30.

L’indice services « Monde » est d’ailleurs passé de 23,7 en avril à 35,2 en mai, restant ainsi sur un plancher historique si l’on exclut celui du mois d’avril.

La situation est similaire pour l’indice composite « Monde », qui, après avoir touché un plus bas historique de 26,2 en avril, est remonté à 36,3 en mai, c’est-à-dire du jamais vu à l’exclusion du plancher d’avril.

Autrement dit, si la Chine commence à sortir de la récession, l’économie mondiale y reste encore bloquée.

Particulièrement inquiétant, la plus mauvaise performance du mois de mai a d’ailleurs été réalisée par l’économie indienne. En effet, son indice PMI « services » a atteint un très bas niveau de 12,6, après 5,4 en avril.

Dans la mesure où son homologue dans l’industrie est aussi demeuré faible, à 30,8, l’indice composite est seulement remonté de 7,2 en avril à 14,8 en mai.

Aussi, une chute massive du PIB indien apparaît inévitable sur l’ensemble du premier semestre 2020.

L’économie indienne est toujours en grand danger.

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Sources : Mospi, Nikkei, ACDEFI

Or, n’oublions pas que l’Inde est depuis une quinzaine d’années le second plus fort contributeur à la croissance mondiale, derrière la Chine. Depuis 2005, sa contribution annuelle moyenne est effectivement de 0,5 point.

Si le PIB indien chute de 5 % cette année (hypothèse très optimiste puisqu’elle suppose qu’un fort rebond se produira au second semestre), il enlèvera 0,4 point à la croissance mondiale.

Autre pays émergent en grande difficulté, le Brésil n’a, lui aussi, pas réussi à sortir de la léthargie en mai. Bien au contraire. En effet, ses indices PMI sont restés faibles à 38,3 dans l’industrie et 27,6 dans les services.

De quoi anticiper un plongeon du PIB brésilien d’environ 8 % en moyenne cette année.

 

L’économie brésilienne reste piégée dans une récession dramatique.

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Sources : IBGE, Markit, ACDEFI

Du côté européen, l’heure n’est pas non plus aux réjouissances. Certes, comparativement aux planchers atteints en avril, les indices Markit des directeurs d’achat ont quelque peu rebondi. Pour autant, ils demeurent extrêmement faibles.

Zone euro : l’industrie va un peu moins mal mais reste en récession.

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Sources : Markit, ACDEFI

Dans l’industrie, les niveaux moyens atteints au cours des trois derniers mois oscillent entre 37,7 en Grèce et 44,1 aux Pays-Bas, avec des niveaux intermédiaires de 38,3 en Espagne et 38,4 en France.

Quant aux indices PMI « services », si l’heure est aussi à l’augmentation corrective après les niveaux historiquement bas atteints en avril, la récession reste encore plus profonde que dans l’industrie.

En moyenne sur les trois derniers mois, les indices demeurent d’ailleurs catastrophiques : de 19 en Italie à 26,8 pour l’Allemagne, en passant par 22,9 en France.

L’activité dans les services demeure plus que moribonde dans l’ensemble de la zone euro.

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Sources : Markit, ACDEFI

Conséquence logique de ces niveaux douloureux, les indices Markit « composites » demeurent également extrêmement bas et annoncent clairement la poursuite d’une récession historique au moins jusqu’à cet été.

Les indices Markit « composites » annoncent la poursuite d’une récession historique dans tous les pays de l’UEM.

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Sources : Markit, ACDEFI

Piètre consolation, la situation est au moins aussi dramatique au Royaume-Uni. Avec des indices Markit PMI de 40,7 dans l’industrie et 29,0 dans les services, l’indice composite britannique passe en-dessous de son homologue de la zone euro, à précisément 30,0.

L’économie britannique continue de souffrir fortement.

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Sources : ONS, Markit, ACDEFI

Enfin, légèrement au-dessus de ses homologues de la planète, mais en-dessous de celle de la Chine, l’économie américaine continue de bien résister, avec des indices Markit PMI de mai révisés en hausse à 39,8 dans l’industrie, 37,5 dans les services et 37,0 pour l’ensemble des secteurs.

La baisse du PIB américain s’annonce limitée.

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Sources : BEA, Markit, ACDEFI

De quoi confirmer notre prévision d’une baisse du PIB des Etats-Unis de « seulement » 4 % en moyenne sur 2020, sauf si les récentes émeutes dégénèrent et entraînent un nouvel arrêt brutal de l’économie de l’Oncle Sam. Décidément, l’année 2020 est bien celle de tous les dangers…

Marc Touati