Comme chaque fin décembre, voici venu le temps du bilan économique et financier de l’année écoulée. Si 2012 a été l’année de la « loose », du moins pour la France et la zone euro qui sont retombés en récession, 2013 a-t-elle bien été celle de la braise, comme nous l’annoncions il y a un an ? La réponse est positive. En effet, comme prévu, la croissance mondiale a été forte, avec un niveau d’environ 3,6 %. A l’instar de ce qui s’observe depuis une décennie, la locomotive de l’économie planétaire a été chinoise, avec une contribution de l’Empire du milieu à la croissance mondiale de 1,2 point. Parallèlement, en dépit d’un ralentissement logique compte tenu d’une appréciation excessive de leur devise, la plupart des pays émergents ont résisté et n’ont pas sombré dans la récession.
Bon an mal an et malgré quelques sueurs froides sur le front budgétaire, les Etats-Unis ont également été au rendez-vous de la croissance, leur PIB progressant de l’ordre de 1,8 % cette année. Il faut dire que jusqu’au 18 décembre, la Réserve fédérale a maintenu une politique monétaire extrêmement accommodante, engendrant d’ailleurs des risques de bulle financière et de trappe à liquidités. La modeste réduction du « quantitative easing » décidé lors du dernier FOMC montre que la Fed est consciente de ces dangers mais qu’elle ne souhaite prendre aucun risque sur la croissance, qui reste d’ailleurs fragile.
Enfin, et sans surprise, la zone euro est restée la lanterne rouge de la marche des affaires mondiales, subissant une nouvelle baisse du PIB d’environ 0,5 %. Certes, c’est un peu moins pire qu’en 2012 (- 0,6 %), mais l’UEM reste la seule zone au monde à régresser. Pourtant, elle a pu bénéficier de soutiens massifs, avec notamment la double baisse du taux refi de la BCE (désormais à 0,25 %) et la résilience stupéfiante de l’économie allemande, qui, bien loin de l’atonie de ses voisins, a su croître d’environ 1 %. Une fois encore, « super Mario » Draghi et la « reine Angela » ont réussi à sauver les meubles d’une maison UEM qui a toujours les pieds dans l’eau…
Bien sûr, les pays du Sud de l’Union ont continué de souffrir. En 2013, les baisses annuelles du PIB se sont poursuivies : – 3,7 % pour la Grèce, – 2 % pour l’Italie, – 1,5 % en Espagne et au Portugal. Pour autant, ces pays ont poursuivi leurs efforts de modernisation économique et sortent progressivement de l’ornière. A l’instar de l’ensemble de l’UEM, Allemagne exceptée, ils restent néanmoins pénalisés par un euro trop fort. A 1,38 dollar, la devise européenne se maintient sur des niveaux grotesques et dangereux qui pourraient susciter une nouvelle rechute de l’économie eurolandaise.
La crise chypriote en mars 2013 a d’ailleurs rappelé que la crise de la dette publique était loin d’être terminée. Et si l’incendie a été temporairement circonscrit par l’une des plus grandes spoliations étatiques de l’Histoire récente, les braises sont toujours incandescentes que ce soit sur l’île chypriote ou dans la grande majorité des pays eurolandais. Et ce d’autant plus que la croissance y reste toujours insuffisante ne serait-ce que pour rembourser la charge annuelle des intérêts de la dette publique.
Mais, au-delà de ce ces difficultés pérennes et comme nous le craignions il y a un an, le véritable malaise de l’année 2013 vient de notre « douce » France. En effet, bien loin de suivre l’exemple de ses voisins, l’Hexagone a refusé de s’engager sur la voie des réformes structurelles et ainsi aggravé son cas. Bien entendu, les dirigeants politiques du pays ne cessent de dire le contraire, défendant que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. En juin-juillet, ils ont même claironné à tue-tête « la reprise est là », un tube de l’été pour le moins détonnant, mais qui n’a pas passé l’automne, puisqu’au troisième trimestre, le PIB français a reculé de 0,1 % et de 0,6 % hors stocks. Sur l’ensemble de l’année, la croissance hexagonale devrait ainsi avoisiner les 0 %, c’est-à-dire exactement son niveau annuel moyen depuis 2008. A ce sujet, il faut savoir que le PIB français n’a toujours pas retrouvé son niveau d’avant crise, affichant même un recul de 0,3 % par rapport au premier trimestre 2008.
Pis, pour arriver à de telles piètres performances, la dépense publique a atteint un nouveau record historique de 57,1 % du PIB. La dette publique s’est encore rapprochée de la barre des 100 % de la richesse, qu’elle finira d’ailleurs par atteindre en 2014. Les niveaux d’imposition atteignent des sommets, réduisant à néant les chances de reprise forte et durable. Dans ce cadre, le chômage a évidemment continué d’augmenter, ne devant son récent ralentissement qu’à des manipulations statistiques dignes de David Copperfield.
Seulement voilà, les plans de licenciement se multiplient, le climat des affaires demeure morose et les risques de crise sociale se développent. Seul réconfort, les taux d’intérêt obligataires restent bas, permettant à l’économie française de maintenir la tête hors de l’eau. Mais jusqu’à quand ? Si la dernière dégradation de la note de la dette publique par Standard & Poor’s n’a pas suscité trop de dégâts, notamment grâce à l’action préventive de la BCE, cette dernière n’a désormais plus de cartouche. Les futures dégradations pourraient donc s’avérer bien plus douloureuses.
Dès lors, si la France n’engage pas rapidement un virage à 180°, notamment en abaissant la pression fiscale et les dépenses publiques, l’année 2014 pourrait bien se révéler pire que 2013. Comme l’an passé, il ne nous reste donc plus qu’à espérer que les dirigeants politiques du pays feront enfin les bons choix.
En attendant, toute l’équipe d’ACDEFI et moi-même vous souhaitons d’excellentes fêtes de fin d’années. J’en profite également pour vous remercier de votre fidélité et de l’accueil que vous avez réservé au « dictionnaire terrifiant de la dette » qui a été l’un des best-sellers des essais économiques en 2013 et qui poursuit encore son beau parcours.
Marc Touati