La crise et les affaires boostent le FN.

Lentement mais sûrement, le Front National poursuit sa montée en puissance. Ainsi, Etienne Bousquet-Cassagne, le candidat « malheureux » du FN à Villeneuve-sur-Lot, a réalisé un très bon score puisqu’il a quasiment doublé ses voix entre le premier et le deuxième tour. Villeneuve-sur-Lot a été pendant quelques jours le centre de l’attention médiatique car cette élection législative partielle constitue un baromètre important du comportement des électeurs en période de crise, à un an de la prise de fonctions de François Hollande. Force est de constater qu’en dépit de ce que l’on appelle le Front Républicain, à savoir la mobilisation des électeurs de gauche pour voter UMP et faire barrage au FN, ce dernier dispose aujourd’hui d’un puissant socle électoral. 

Il est vrai qu’un grand nombre de conditions sont réunies pour favoriser une progression rapide et durable du FN. Tout d’abord, la récession économique et son corollaire, la montée du chômage, inquiètent naturellement les Français qui sont de plus en plus pessimistes : peur du lendemain, peur pour leurs enfants… D’ailleurs, l’indicateur économique mesurant le moral des Français a atteint un plus bas historique en juin, il en va de même pour l’indicateur jugeant de leur niveau de vie futur… Face à l’impuissance du pouvoir en place et plus globalement des gouvernements successifs depuis 40 ans à endiguer le fléau du chômage, de plus en plus de Français sont donc sensibles aux sirènes de l’extrême droite. L’Europe et l’euro sont devenus de parfaits boucs émissaires et malgré son programme économique inepte qui propose le retour au franc, la fermeture des frontières et le contrôle des changes, le FN continue de surfer sur la crise et prend de l’ampleur dans l’échiquier politique.

Par ailleurs, non seulement les hommes politiques au pouvoir ou qui ont exercé le pouvoir sont considérés comme inefficaces, mais un vent de « tous pourris » souffle de plus en plus fort du fait de la recrudescence des affaires : commission d’enquête parlementaire pour Cahuzac, mise en examen pour escroquerie en bande organisée pour Bernard Tapie avec Christine Lagarde et Stéphane Richard qui se renvoient la balle, affaire Guéant, affaire Ziad Takieddine mettant en cause Edouard Balladur dans le cadre du financement de sa campagne présidentielle de 1995… Mettons-nous à la place de nos compatriotes pour lesquels il n’y a bien souvent pas de fumée sans feu…

Autre facteur important : « l’effet boomerang Nicolas Sarkozy ». En effet, alors que ce dernier avait fait de la surenchère démagogique lors de sa campagne de 2007 sur le front de la sécurité (Karcher) et de l’immigration, beaucoup d’électeurs FN tout d’abord séduits ont ensuite été très déçus et ont rejoint durablement le camp de Marine Le Pen. En dépit des efforts actuels d’une partie de l’UMP et de Jean-François Copé pour les récupérer, ces derniers jurent qu’ils ne se feront pas avoir une deuxième fois. Facteur aggravant, le pouvoir en place et l’UMP sont souvent perçus comme n’étant pas en mesure de faire face à l’insécurité qui règne dans le pays.  

Enfin, alors que Jean-Marie Le Pen était violent verbalement et dérapait souvent, sa fille Marine par ailleurs très éloquente s’est achetée une conduite, permettant au parti de s’institutionnaliser. Pourtant le contenu reste le même, seul le contenant a changé… La progression de Marine Le Pen est à ce titre impressionnante. Rappelons-nous de l’année 2007 où une grande partie de l’électorat du FN avait été « siphonné » par Nicolas Sarkozy, ramenant le Pen à 10,44 % au premier tour de la présidentielle après son score de 17 % en 2002. Le parti d’extrême droite était exsangue et son président réduit à la « mendicité cathodique » pour sauver les meubles. Mais la prédiction de Jean-Marie Le Pen en 2007 à propos de Nicolas Sarkozy : « Vous verrez quand l’illusionniste descendra de scène» s’est révélée exacte… Résultat : alors que beaucoup pensaient que le FN était fini et que Sarkozy était parti pour 10 années à l’Elysée, Marine Le Pen a réalisé 17,9 % à la présidentielle de 2012, soit encore mieux que son père. Dans le contexte actuel, le FN ne manque pas de carburant et sa progression risque de s’amplifier. De fait, l’un des objectifs de Nicolas Sarkozy est d’apparaitre comme l’homme providentiel constituant l’ultime rempart face à la montée de l’extrême droite. A suivre…     

 

 

La phrase de la semaine :

« C’est le pire des traitres, il n’est pas capable de me dire en face ce qu’il dit dans les médias ». Nicolas Sarkozy à propos de François Fillon.

 

rôme Boué