Marc Touati, économiste et auteur du livre “Quand la zone euro explosera” (Éditions du Moment) revient sur le rapport remis par la Cour des comptes au Premier ministre.
Les conclusions de ce rapport vous surprennent-elles ?
– Cela fait 10 ans, 15 ans que les rapports de la Cour des comptes se suivent et se ressemblent et en même temps nos dépenses publiques ne cessent d’augmenter. Elles atteignent 56 % du PIB, même en Espagne elles ne s’élèvent qu’à 46 %. Notre dette publique atteint 90 % du PIB et rien ne change. Or ce sont ces dépenses publiques qu’il faut diminuer.
Vous ne croyez pas que cette fois-ci le gouvernement y soit contraint puisqu’il lui faut trouver 33 milliards en 2013…
– Ce qu’il y a d’amusant c’est que le jour où sort ce rapport, le ministre Michel Sapin annonce 2 000 créations de postes à Pôle emploi…
Mais au fond, ce n’est pas un problème droite/gauche. La question est que la puissance publique, bien au-delà des gouvernants, ne veut pas réduire son train de vie.
Pour les 33 milliards en 2013, ce n’est pas possible, ce serait même dangereux car la tentation serait grande d’augmenter les impôts. Et là ce serait une erreur car nous avons déjà une des pressions fiscales les plus élevées au monde. Augmenter les impôts reviendrait à casser le peu de croissance qui nous reste et donc à nuire à notre compétitivité économique. On aurait l’effet inverse de celui qui est souhaité.
C’est la quadrature du cercle que vous décrivez…
– La seule solution est de restaurer la croissance mais nous ne sommes pas d’accord sur les moyens pour y parvenir. L’Allemagne veut des réformes structurelles mais il faut 10 ans pour qu’elles produisent des effets, or il y a urgence. Et nous la France, nous pensons que la croissance passe par les dépenses publiques mais ça ne marche pas. Chez nous, la dépense publique de fonctionnement augmente de 10 milliards par an depuis 10 ans sans résultat. Pour autant, il ne s’agit pas de toucher aux dépenses sociales car ce serait catastrophique en période de récession. La solution idéale serait de baisser en même temps la dépense publique et les impôts.
La troisième méthode est celle des Américains, des Chinois, des Suisses, c’est celle d’une politique monétaire plus active. Il faut que la Banque centrale européenne baisse les taux d’intérêt, que l’euro soit plus faible et que l’on fasse de la planche à billets pour financer l’économie privée. Ça, ça peut aller très vite, avoir rapidement des effets mais les Allemands ne veulent pas.
On va devoir encore souffrir, je le crains”.
Propos recueillis par Georges BOURQUARD
L’interview est également disponible sur le site du Dauphiné Libéré :