Une carrière politique est semée d’embûches pouvant parfois aller jusqu’à une véritable traversée du désert. Tous les hommes politiques le savent, c’est la « règle du jeu ».Les trois principaux protagonistes de l’élection présidentielle de 2007 sont d’ailleurs bien placés pour le savoir. François Bayrou tout d’abord qui croyait encore en ses chances en 2012 est désormais en situation de « mort clinique politique », payant au prix fort son soutien à François Hollande au deuxième tour. Pour Nicolas Sarkozy, l’élection de 2012 fut la chronique d’une défaite annoncée, même si rien n’est jamais joué d’avance. Mais après être descendu aux enfers en 1995 comme tous les Balladuriens, sa conquête de l’Elysée en 2007 constituait déjà une prouesse en soit.
De son coté, Ségolène Royal défend bec et ongles depuis 5 ans sa place sur l’échiquier politique, ce qui est d’ailleurs sa marque de fabrique. On se souvient d’une caméra et d’un micro indiscret surprenant ses supplications en larmes pour obtenir un poste auprès de François Mitterrand après la débâcle des législatives de 1993. Surmontant ce trou d’air, Ségolène Royal a su rebondir là où on ne l’attendait pas pour s’imposer lors des primaires socialistes de 2007 face à Dominique Strauss Kahn et Laurent Fabius, excusez du peu… Ce « hold-up marketing » a en effet constitué un véritable pied de nez aux éléphants du PS qui n’ont jamais vraiment considéré la Présidente du Conseil Régional de Poitou Charentes. D’ailleurs, même officiellement investie lors des primaires socialistes, Ségolène Royal a toujours été vue par certains ténors du parti comme une usurpatrice. Il suffit de voir les images de DSK ou de Fabius piquant du nez lors des meetings de campagne de 2007 pour s’en convaincre.
Sa campagne présidentielle fut à l’image de celle des primaires, à savoir essentiellement axée sur la forme au détriment du fond. D’ailleurs s’il fallait remettre une récompense à Ségolène Royal ce serait certainement le César de la meilleure actrice en 2007. Sa colère feinte lors du débat d’entre deux tours ou encore son discours post défaite affirmant que « quelque chose s’est levé qui ne s’arrêtera pas » montrent qu’elle a un véritable talent de comédienne. Et bien il semble que manifestement quelque chose se soit arrêté. Obtenir l’investiture du PS en 2007 relevait déjà de la prestidigitation, mais réitérer ce casse en 2012 aurait été tout bonnement prodigieux. En effet les militants du PS mais aussi une majorité de Français ont tourné la page après la défaite de 2007 et Ségolène Royal n’a pas vu ou n’a pas voulu voir cette page se refermer. Ces élans oratoires clamant sa future victoire aux primaires même s’ils font partie de la panoplie verbale de tout candidat qui se respecte sonnaient bien faux. La roue avait tournée et ce fut le début de la descente aux enfers : échec aux primaires, pas de portefeuille ministériel et enfin échec aux législatives. Ce dernier faux pas lui barra la route du perchoir, le poste le mieux payé de la République dont elle rêvait en technicolor.
Aujourd’hui, Ségolène Royal est comme une bête blessée donc potentiellement dangereuse. Nul doute que l’appareil du parti va tout mettre en oeuvre pour lui sortir la tête de l’eau alors qu’elle est en train de se noyer. Bien qu’il ne faille jurer de rien et surtout en politique, il semble toutefois que l’ex finaliste à la présidentielle soit désormais condamnée à rejouer les seconds rôles sur l’échiquier politique.
La phrase de la semaine :
«Je découvre dans les médias qu’on me prête l’intention de briguer l’ARF (Association des Régions de France), après le parti, et même la Mairie de Paris ! Stop. Je n’ai rien demandé. » de Ségolène Royal le 21/06 sur twitter.
Jérôme Boué