France : la stagnation, c’est maintenant !

 

Stagnation. Tel est le cadeau (empoisonné !) que Nicolas Sarkozy offre à François Hollande le jour de son investiture. Sans véritable surprise, la PIB français a effectivement stagné au cours du premier trimestre 2012. A l’évidence, le nouveau Président aurait pu souhaiter mieux pour son arrivée à l’Elysée. Qu’il se réconforte néanmoins, car cela aurait pu être pire. Et pour cause : « comme par hasard », la croissance du quatrième trimestre 2011 a été révisée en baisse de 0,2 % à 0,1 %. Dans quelques mois, nous apprendrons certainement que le PIB hexagonal a baissé au dernier trimestre 2011 et au premier de 2012.

En attendant, il est simplement possible de souligner que si les comptes nationaux du trimestre précédent n’avaient pas été revus en baisse, le PIB français aurait reculé de 0,1 % au premier trimestre 2012. De même, il faut également noter que, hors formation de stocks, le PIB a baissé de 0,1 % au premier trimestre. Comme quoi, les Président changent, mais la magie de l’INSEE continue.

Pour autant, les « bonnes » nouvelles s’arrêtent là. En effet, dans la mesure où le PIB français avait augmenté de 0,9 % au premier trimestre 2011, son glissement annuel plonge à 0,3 %, un plus bas depuis le quatrième trimestre 2009. De plus, en dépit du regain de consommation énergétique liée à la rigueur exceptionnelle de l’hiver, la consommation des ménages n’a progressé que de 0,2 %, maintenant son glissement annuel dans le rouge à – 0,3 %.

Pis, après un rebond technique en 2011, l’investissement des entreprises s’est de nouveau effondré de 1,4 % au premier trimestre 2012. Par rapport à son niveau d’avant-crise (c’est-à-dire celui du premier trimestre 2008), cet agrégat enregistre encore une baisse de 7 %. Autrement dit, le mouvement de réinvestissement tant attendu depuis deux ans est toujours loin d’être d’actualité. Or, si l’investissement des entreprises recule, les créations d’emplois diminuent, le chômage augmente, le déficit public s’accroît et la dette flambe encore.

En outre, il faut se rappeler que, jusqu’à présent, les taux d’intérêt à long terme sont restés bas. Si ces derniers remontent dans les prochains mois, comme cela est très probable, la baisse de l’investissement s’intensifiera et le PIB reculera significativement. Avec un acquis de croissance de seulement 0,2 % au sortir du premier trimestre 2012, il paraît clair que la variation annuelle moyenne du PIB français sera inférieure à 0,5 %. La prévision de croissance du nouveau Président ne sera donc pas respectée et celle de réduction du déficit public encore moins.

Dans ce cadre, il ne fait plus aucun doute que si les premières mesures de Monsieur Hollande vont dans le sens d’une augmentation des dépenses publiques, la note de la dette publique française sera très vite dégradée d’au moins deux crans. D’où une augmentation des taux longs, puis une aggravation de la baisse du PIB et une amplification de la crise de la zone euro…

La question est alors de savoir si l’Allemagne mettra enfin de l’eau dans son vin, en acceptant d’engager une action rapide en faveur de la croissance (notamment via une modification de l’action de la BCE). Rien n’est encore joué, mais il faut reconnaître qu’avec une progression de son PIB de 0,5 % au premier trimestre 2012, l’Allemagne prouve au monde qu’il est possible de faire de la croissance avec un euro fort et une baisse des dépenses publiques. C’est bien là le principal problème de la zone euro, en l’occurrence son hétérogénéité croissante. Dans ce cadre, le couple franco-allemand et l’UEM dans son ensemble risquent encore de vivre des heures bien difficiles.

Marc Touati