L’Homme qui aurait pu faire gagner Nicolas Sarkozy…

 

Il s’appelle Jacques Pilhan, et c’est une personnalité hors norme et un stratège exceptionnel. Cet homme de l’ombre est resté 14 ans au cœur du pouvoir. L’histoire début en 1980 lorsque, recruté par Jacques Séguéla et en compagnie de Gérard Collé, Jacques Pilhan se met au service de François Mitterrand. A l’époque, l’ancien Président est considéré comme l’homme du passé et c’est Michel Rocard qui incarne l’avenir à gauche pour affronter Valéry Giscard d’Estaing. Pilhan lui même considère Mitterrand comme un « has been », mais il relève le challenge. La machine se met en marche aboutissant à un combat entre « l’homme qui veut » (Mitterrand) et « l’homme qui plait » (VGE), Roosevelt contre Louis XV, avec un point d’orgue le slogan « La France tranquille » qui fut longtemps attribué à Jacques Séguéla.  

 

VGA est donné favori, en dépit d’un bilan plus que contesté. La candidat Mitterrand suit à la lettre les conseils de Pilhan : écoute et force. Il doit se façonner une nouvelle image et s’appuyer sur les failles de VGE. La stratégie s’avère payante et Mitterrand, il est vrai bien aidé par Chirac, remporte cette élection historique pour la Gauche. Après la débâcle aux législatives en 1986 et la nomination de Jacques Chirac à Matignon, il faut désormais préparer l’échéance de 1988. Pilhan est à la manœuvre. Chirac est considéré comme un bulldozer, donc pas question de « dresser un mur ». Il faut l’enliser… Une fois encore, le tandem Pilhan Mitterrand fait merveille comme le montre le fameux duel télévisé d’entre deux tours, où Dieu renvoie son Premier Ministre à ses chères études. La victoire de 1988 est éclatante.

 

Mitterrand va commettre plusieurs erreurs au cours de son second septennat, dont la nomination d’Edith Cresson. Pilhan et Collé avaient pourtant réalisé des enquêtes « consommateurs » sur la perception des prétendants à Matignon, qui plaçaient Edith Cresson en dernière place. Désavoué, Collé démissionne mais Pilhan reste. Malheureusement il ne pourra éviter l’inéluctable, à savoir une nouvelle débâcle aux législatives en 1993. Mitterrand nomme Balladur, qui incarne très vite le Premier Ministre idéal alors que l’image de Jacques Chirac – futur candidat à la Présidentielle – est catastrophique. Par l’intermédiaire de sa fille Claude, Jacques Chirac rencontre Pilhan et le convainc de travailler pour lui. Mitterrand, qui a fait son temps, ne supporte plus Balladur et lui préfère Jacques Chirac dans la course à l’Elysée. Il donne donc sa bénédiction à Pilhan qui est désormais libre de travailler pour Chirac. Balladur est archi favori mais pour Pilhan, il est en train « de se piéger lui même ». Comme Mitterrand en 1981, Pilhan soutient l’outsider Jacques Chirac. La bête de campagne et le stratège font merveille. Edouard Balladur n’est même pas présent au deuxième tour.

 

Aujourd’hui le challenger c’est Nicolas Sarkozy, et le grand favori François Hollande. Pour la petite histoire, en 1994, Nicolas Sarkozy qui était déjà convaincu de la valeur de Pilhan, lui avait proposé une collaboration par l’intermédiaire d’Alain Minc… En dépit de l’insistance de Nicolas Bazire, il ne put obtenir gain de cause, Pilhan avait choisi Chirac. Dans la situation actuelle, Nicolas Sarkozy aurait bien eu besoin de Jacques Pilhan pour inverser la tendance. Malheureusement, ce dernier est décédé en 1998. Après la courte défaite de Balladur en 1994, espérons que Nicolas Sarkozy aura retenu les recettes de celui qui a contribué à la défaite de son ex-mentor.

 

La phrase de la semaine :

«On m’attribue tellement de virages à droite qu’à force je vais finir par me retrouver à l’extrême gauche » Nicolas Sarkozy dans « Des paroles et des actes »

rôme Boué