Faut-il jeter l’éponge ?

 

Plus rien ne va. La récession est de retour dans la quasi-totalité des pays de la zone euro. Les changements de gouvernements en Grèce, en Italie et en Espagne n’ont eu aucun effet sur les taux d’intérêt des obligations d’Etat des pays concernés. Ceux-ci restent donc prohibitifs, alimentant le cercle infernal Récession-Chômage-Déficits publics. Parallèlement, les marchés boursiers continuent de déprimer, entretenant un autre cercle pernicieux, à savoir, Baisse des cours-Désinvestissement-Récession.

Pour ne rien arranger, les dirigeants politiques eurolandais demeurent incapables de s’entendre et de stopper l’hémorragie. Enfin, cerise sur le gâteau, la censure de certains médias pro-gouvernementaux et les intimidations en tous genres commencent à se répandre un peu partout, et notamment dans l’Hexagone. Nous en avons été personnellement victimes au cours des dernières semaines. Rassurez-vous, il n’y a, pour le moment, aucune atteinte physique, mais il faut reconnaître que, même si nous sommes habitués aux pressions en tous genres depuis des années, ce refus de la critique, doublé d’une hégémonie de la pensée unique choque toujours. A fortiori, dans le pays des Droits de l’Homme… Nous le savons bien : tout ça n’est qu’une affaire de marketing.

Toujours est-il que face à l’ensemble de ces mauvaises nouvelles, il pourrait être tentant de jeter l’éponge, de conseiller aux investisseurs de vendre toutes leurs actions, de se focaliser sur l’or ou sur les terres arables, ou encore de demander aux chefs d’entreprise d’arrêter d’investir, de réduire au maximum la voilure, voire de s’expatrier dans un « monde meilleur ». Un monde dans lequel la puissance publique représenterait moins de 50 % du PIB, où la pression fiscale serait modérée et qui permettrait aux entrepreneurs, mais aussi aux salariés, d’investir et de travailler en toute liberté. Même s’il paraît très loin de nos frontières, sachez que ce monde existe. Il n’est bien sûr pas parfait (la perfection n’existe d’ailleurs pas sur terre), mais permet au moins de se sentir libre. Libre d’investir, libre de penser, libre de s’exprimer. Des libertés qui sont malheureusement en voie de disparition dans notre vieille Europe et en particulier dans notre douce France.

En d’autres termes, nous ne blâmerons pas ceux qui argueront du marasme actuel pour baisser les bras et passer dans le camp des Cassandre. Pour autant, nous n’en profiterons pas pour tomber, nous aussi, dans les limbes du pessimisme. Car, même si cet appel du large est tentant, il constitue un piège, à l’instar de celui des sirènes qui charment les marins pour pouvoir ensuite les dévorer.

En effet, celui qui abandonne face aux dangers est sûr de perdre. A l’inverse, celui qui ose regarder vers l’avenir n’est certes, pas sûr de gagner, mais dispose au moins d’une grande chance de réussir. Tel est le comportement qu’il nous paraît opportun d’adopter dans le contexte actuel. Et ce, tant pour les entreprises et les particuliers que pour les investisseurs ou encore pour les dirigeants politiques.

Pour ces derniers, ils doivent tout d’abord accepter le dialogue, tout en refusant la pensée unique des technocrates et des hauts-fonctionnaires. Vivant des largesses de l’Etat, il est effectivement clair que, dans leur grande majorité, ceux-ci feront tout pour éviter de réduire les dépenses publiques. Ils préféreront augmenter les impôts, ce qui finira par casser le peu de croissance qui nous reste, et contribuera à augmenter le chômage, les déficits et la dette. Tant que nos dirigeants n’auront pas compris ces évidences, la crise de la zone euro continuera jusqu’à l’explosion de celle-ci.

Du côté des entreprises, elles devront constamment mettre en place des stratégies « anticrise », et notamment des stratégies de niches, d’innovation et de développement international. Quant aux moyens de financement de ces options, les entreprises disposent de deux possibilités. Primo, elles peuvent se retourner vers les banques, qui finiront bien par revenir à leur métier de base, en l’occurrence l’octroi de crédit. Secundo, si la frilosité bancaire continue, notamment à cause de règles prudentielles trop rigides, les entreprises pourront se tourner vers des fonds d’investissement français et/ou internationaux, qui disposent actuellement de liquidités conséquentes.

En ce qui concerne les particuliers, le refus de jeter l’éponge devra passer par une combativité à toute épreuve, que ce soit en matière de qualification, via des efforts permanents de formation, dans le domaine de la qualité du travail effectué et, enfin, sur le front de la mobilité géographique et/ou sectorielle.

Enfin, pour les investisseurs, il faudra rester à l’affût des opportunités, tout en limitant les prises de risque excessives. A ce sujet, il y a justement des signes qui ne trompent pas. C’est ce que l’on appelle des contre-indicateurs avancés ou pour être plus cru, des « chèvres ». Il s’agit d’opérateurs, d’économistes ou encore d’observateurs qui ont régulièrement tout faux. Il s’agit par exemple de ceux qui annonçaient que la crise était finie au printemps 2008, qui prédisaient que le Cac 40 tomberait à 1 500 à l’été 2009, que la croissance ne reviendrait pas en 2010, que la crise grecque ne durerait que quelques semaines, ou encore qui soutenaient en juillet 2011 que les marchés boursiers allaient flamber. Le pire est que ce sont souvent les mêmes. Or, depuis quelques jours, ces « clairvoyants » qui n’ont pas cessé de dire depuis l’été dernier que les cours boursiers allaient rebondir rapidement, se mettent à annoncer qu’il faut tout vendre, que les marchés actions vont aller encore plus bas. En d’autres termes, c’est le moment d’acheter…

Au-delà de l’aspect distrayant et non-conventionnel de cette analyse, il faut se souvenir qu’historiquement, le consensus a très souvent tort. Autrement dit, c’est lorsque tout le monde pense la même chose et va dans le même sens qu’il devient opportun d’aller dans l’autre direction. C’est ainsi que les Warren Buffet, Georges Soros et autres champions de la finance ont fait fortune. Le seul « hic » dans ce raisonnement est qu’aujourd’hui, la balle est dans le camp des politiques, qui sont loin d’être des modèles de vertu et d’efficacité économique. Ah, pessimisme quand tu nous tiens…

Marc Touati