Humeur :
Note de
C’est presque un secret de polichinelle : depuis une dizaine d’années, les indicateurs qui génèrent normalement la notation d’une dette souveraine ne permettent plus d’octroyer un AAA à
L’envolée de la dette publique française depuis trois ans a néanmoins éveillé les soupçons. Si bien que les Moody’s, Standard & Poor’s et Fitch ont laissé entendre qu’ils ne maintiendraient leur statu quo qu’à deux conditions : la réforme du système de retraite par répartition et la limitation du « grand emprunt » annoncé en grande pompe il y a deux ans. Devant une telle menace, le gouvernement français n’a évidemment pas résisté. De 100 milliards d’euros, le grand emprunt est ainsi passé à… une vingtaine de milliards. Quant au système des retraites, il a été réformé, certes a minima, mais, dans un monde où les apparences comptent bien plus que la réalité, cette réforme a été jugée comme suffisante. Grâce à ces deux évolutions, le gouvernement français dispose donc de la garantie implicite que la notation de la dette publique nationale sera maintenue jusqu’aux élections présidentielles de 2012.
Pour la suite, tout dépendra de l’issue de ces dernières et surtout de la stratégie qui sera alors mise en place. La règle de décision est simple et binaire. Premier cas de figure :
C’est dans ce contexte et indépendamment de toute préoccupation partisane qu’il va falloir analyser les programmes des différents partis politiques susceptibles de diriger
Or, même si ses concepteurs s’en défendent, le programme du PS engagera forcément
Parallèlement, le PS prévoit de ramener l’âge légal de la retraite à soixante ans. Ce qui est certes « très sympathique », mais viendra encore aggraver le trou des comptes sociaux. Faut-il d’ailleurs rappeler que le FMI, dirigé par un certain DSK, préconise un âge légal de 65 ans ? Certes, pour contourner toutes ces difficultés, il pourrait être décidé d’augmenter purement et simplement la pression fiscale qui est pourtant déjà l’une des plus élevées du monde. Mais là aussi, danger, car si l’on accroît les impôts et taxes en France, cela cassera instantanément la croissance économique, suscitant plus de chômage et plus de déficit.
Ce qui nous amène à évoquer l’un des autres problèmes majeurs du programme du PS : sa prévision de croissance à 2,5 % par an. A la décharge de celui-ci, il faut reconnaître que, depuis dix ans, tous les partis politiques et les dirigeants du pays ont établi cette même prévision, alors que, depuis dix ans, la croissance annuelle moyenne du PIB français n’a été que de 1,2 %. C’est malheureusement une triste réalité que « l’élite française » (de droite comme de gauche) refuse d’admettre : la croissance structurelle française est comprise entre 1,5 % et 1,8 % par an. Baser un programme économique sur un niveau de 2,5 % est donc par construction erroné et par là même voué à l’échec.
Pourtant, si tel est le choix des Français en 2012, il faut d’ores et déjà se préparer à la dégradation de la note de la dette publique française dès l’an prochain qui passerait d’un AAA à A. Une forte hausse des taux d’intérêt obligataires s’en suivra, ce qui affaiblira la croissance économique, alimentera le chômage, fera encore flamber les déficits et la dette publics, d’où une nouvelle hausse des taux d’intérêt… En trois mots : attention les secousses !
Marc Touati
La météo économique de la semaine écoulée :
Les Marchés:
La BCE tire, la zone euro coule…
Conformément à l’annonce d’un resserrement monétaire modéré il y a un mois,
Ainsi, alors que les taux directeurs centraux restent à 0,5 % au Royaume-Uni, à 0,25 % aux Etats-Unis et en Suisse, ou encore à 0,1 % au Japon et tandis que
Sources : Bloomberg, Datastream
Certes, ce n’est pas en augmentant le taux refi de 25 points de base que l’Institut francfortois va révolutionner l’économie de la zone euro. Et ce, d’autant que, depuis l’annonce faite il y a un mois, les marchés ont eu le temps d’intégrer cette décision. Voilà pourquoi, alors qu’il valait 1,35 dollar mi-février, l’euro a flambé jusqu’à 1,43 dollar hier.
De même, dans la mesure où
Ce répit a cependant été de courte durée, car dès le lendemain, l’euro a rebondi à 1,44 dollar.
C’est bien là le problème, car si Jean-Claude Trichet s’est contenté de souligner qu’il n’était pas possible de dire si la hausse du 7 avril était la première d’une série de resserrements, le doute persiste.
Pourtant, il faut souligner que l’augmentation récente de l’inflation (2,6 % en glissement annuel en mars) reste exclusivement due à une flambée des cours des matières premières et notamment énergétiques. A l’inverse, l’inflation sous-jacente reste des plus sages à 1 %. De quoi calmer les velléités restrictives des « faucons » de
L’inflation sous-jacente reste particulièrement faible.
Sources : Eurostat, Datastream
En outre, la tension inflationniste de février-mars s’explique aussi par un effet de base défavorable, lié à des augmentations mensuelles bien plus fortes qu’il y a un an.
A présent que ce biais statistique va s’estomper, le glissement annuel des prix à la consommation devrait mécaniquement se réduire. D’abord vers les 2,2 % dès avril, puis à 1,8 % d’ici la fin 2011. Il ne sert donc à rien de s’affoler pour un regain d’inflation temporaire.
L’inflation eurolandaise terminera l’année 2011 sous les 2 %
Sources : Eurostat, Datastream, Prévisions Assya Compagnie Financière
Enfin, à 1,44 dollar, l’euro continue d’être beaucoup trop cher et menace la croissance de la zone, en particulier dans les pays du Sud qui demeurent affectés par une grave crise de la dette publique. Rappelons effectivement qu’à chaque fois que l’euro s’apprécie de 10 % en moyenne annuelle, la croissance eurolandaise perd 0,4 point.
Un resserrement monétaire logique mais trop hâtif.
Sources : Eurostat, Datastream, Prévisions Assya Compagnie Financière
C’est là tout le paradoxe de la politique économique de la zone euro : d’un côté, elle s’emploie à aider les pays en difficulté à financer leur dette publique « à bon coût », de l’autre, elle favorise un euro trop fort, ce qui casse la croissance de ces mêmes pays, donc accroît le chômage et par là même les déficits et la dette des administrations publiques.
L’appréciation excessive de l’euro finira par coûter cher…
Sources : Eurostat et Datastream
Autrement dit, la zone euro continue sa fuite en avant, tentant de colmater les brèches de la dette publique ici et là, mais sans résoudre le problème de fond, en l’occurrence, la faiblesse de la croissance économique.
Les taux dix ans font toujours aussi peur en Grèce, en Irlande et au Portugal…
Sources : Bloomberg, Datastream
Dans ce cadre, après
…et deviennent de plus en plus inquiétant en Espagne, en Italie et… en France.
Sources : Bloomberg, Datastream
Espérons simplement que
Sinon, la sanction pourrait être beaucoup plus lourde, relançant durablement une crise de la dette qui pourrait bien s’avérer fatale pour de nombreux pays, voire pour la zone euro dans son ensemble.
Marc Touati