La BCE fidèle à elle-même…

 

Conformément à l’annonce d’un resserrement monétaire modéré il y a un mois, la BCE a, sans surprise, augmenté son taux refi de 0,25 point. Après avoir été la Banque Centrale occidentale qui a le moins assoupli sa politique monétaire pendant la crise, la BCE est donc aussi la première à resserrer son étreinte au-delà de 1 %.

Ainsi, alors que les taux directeurs centraux restent à 0,5 % au Royaume-Uni, à 0,25 % aux Etats-Unis et en Suisse, ou encore à 0,1 % au Japon et tandis que la Banque du Canada a certes relevé son taux de base depuis 2010 mais le maintient à 1 %, la BCE a, une fois encore, décidé de se faire remarquer.

Certes, ce n’est pas en augmentant le taux refi de 25 points de base que l’Institut francfortois va révolutionner l’économie de la zone euro. Et ce, d’autant que, depuis l’annonce d’il y a un mois, les marchés ont eu le temps d’intégrer cette décision. Voilà pourquoi, alors qu’il valait 1,35 dollar mi-février, l’euro a flambé jusqu’à 1,43 dollar hier.

En revanche, dans la mesure où la BCE a « tenu ses promesses » et n’a pas été au-delà, les investisseurs ont pu être rassurés et ont favorisé une légère baisse de l’euro, qui continue cependant d’avoisiner les 1,42 dollar.

Mieux, même s’il n’exclut pas une prochaine hausse, Jean-Claude Trichet est resté très vague sur l’avenir, se contentant de souligner qu’il n’était pas possible de dire si cette hausse était la première d’une série de resserrements.

S’il est donc possible de pousser un « ouf ! » de soulagement, il n’en demeure pas moins qu’à 1,42 dollar, l’euro reste trop cher et menace la croissance de la zone, en particulier dans les pays du Sud qui demeurent affectés par une grave crise de la dette publique. C’est là tout le paradoxe de la politique économique de la zone euro : d’un côté, elle s’emploie à aider les pays en difficulté à financer leur dette publique à bon coût, de l’autre, elle favorise un euro trop fort, ce qui casse la croissance de ces mêmes pays, donc accroît le chômage et par là même les déficits et la dette des administrations publiques.

Autrement dit, la zone euro continue sa fuite en avant, tentant de colmater les brèches de la dette publique ici et là, mais sans résoudre le problème de fond, en l’occurrence, la faiblesse de la croissance économique.

Dans ce cadre, après la Grèce et l’Irlande hier, puis le Portugal aujourd’hui, d’autres pays suivront sur la liste de la crise de la dette publique. A commencer par l’Espagne, l’Italie mais aussi la France.

Espérons simplement que la BCE en restera là et ne remontera plus ses taux directeurs jusqu’à ce que la Fed le fasse, c’est-à-dire d’ici la fin de l’été 2011. Si tel est le cas, l’appréciation de l’euro restera limitée et la croissance eurolandaise ne baissera que d’environ 0,5 point, vers 1,5 % fin 2011. Sinon, la sanction pourrait être beaucoup plus lourde, relançant durablement une crise de la dette qui pourrait bien s’avérer fatale pour de nombreux pays, voire pour la zone euro dans son ensemble.

Marc Touati