On voit déjà venir les déclarations du gouvernement : en octobre, l’excédent commercial allemand s’est réduit, tandis que le déficit extérieur de la France a nettement reculé. Autrement dit : les écarts se réduisent. Une fois cette lecture rapide et partisane passée, il faut néanmoins se rendre à l’évidence : en octobre, la réduction du déficit commercial français est presque exclusivement due à la chute de 40 % des importations d’hydrocarbures naturels, elle-même due au blocage des terminaux pétroliers lors des mouvements sociaux d’octobre.
Plus globalement, il faut noter que la réduction du déficit hexagonal s’explique par une baisse des importations plus forte que celle des exportations (respectivement – 3,6 % et – 1,2 %). Cette double évolution confirme que la demande intérieure française reste faible et que les exportateurs français n’arrivent toujours pas à profiter du fort rebond de la croissance mondiale.
Ainsi, avec un niveau de 3,4 milliards d’euros en octobre et même s’il s’avère en baisse par rapport à son pic de septembre (à 4,7 milliards), le déficit extérieur français demeure très élevé. Que ce soit sur les dix premiers mois de 2010 ou sur les douze derniers mois, il atteint même un niveau impressionnant de respectivement 41,33 et 50,77 milliards d’euros. Si le sommet des 54,9 milliards d’euros de 2008 ne devrait pas être dépassé cette année, le déficit 2010 devrait donc être le deuxième plus important de l’histoire économique française, loin devant les 43,6 milliards observés l’an passé.
C’est à l’aune des chiffres annuels que le comparatif France/Allemagne prend alors tout son sens. Et pour cause : sur les dix premiers mois de l’année 2010, l’excédent commercial allemand atteint déjà 128 milliards d’euros. Cela signifie que, même si un nouveau ralentissement s’observe en novembre et décembre (avec un excédent mensuel d’environ 10 milliards d’euros), l’excédent extérieur de l’Allemagne devrait avoisiner les 140 milliards d’euros, soit presque 23 % de plus que les 114 milliards de 2009 et seulement quelques échelons en dessous du record absolu de 2007 à 164 milliards d’euros.
En d’autres termes, pendant que les Français peinent à retrouver le chemin de la croissance, tant d’un point de vue extérieur que domestique, les Allemands ont retrouvé leur dynamique d’antan, bien sûr grâce à leurs exportations mais aussi grâce au rebond progressif de leur demande nationale.
Conséquence logique de cette dichotomie, les écarts de déficit public se creusent également. Ainsi, alors que celui de l’Allemagne devrait avoisiner les 3,5 % du PIB, celui de la France devrait frôler les 8 %, soit encore plus qu’en 2009. Dans ce cadre, l’amélioration du climat des affaires selon l’indicateur de la Banque de France apparaît comme une piètre consolation, notamment parce qu’elle montre simplement que l’économie française est certes en reprise, mais demeure toujours très fragile et très éloignée de la croissance forte.
Marc Touati