Le retour de la machine à perdre.

 

La théorie est simple mais la pratique est terriblement plus compliquée : pour gagner l’élection présidentielle il faut être uni car la division mène à la défaite. La droite en a fait maintes fois l’expérience en actionnant ce qu’il est désormais convenu d’appeler « la machine à perdre ».

 

En 1981 tout d’abord, alors que Valery Giscard d’Estaing se retrouve une fois de plus contre son meilleur ennemi François Mitterrand, il doit également affronter l’ennemi dans son propre camp… En effet après avoir démissionné en août 1976, Jacques Chirac a crée son propre parti le RPR et s’est présenté à l’élection présidentielle. Chirac déteste Giscard et bien qu’éliminé au 1er tour, il poignarde ce dernier en appelant en sous main à voter Mitterrand. Sa stratégie est simple et machiavélique : faire élire Mitterrand pour avoir une chance de l’emporter sept ans plus tard.

 

Cependant en 1988, les choses ne se passent pas exactement comme prévues et Chirac doit également affronter celui qui lui avait succédé à Matignon, Raymond Barre. Une fois de plus, la droite n’est pas unie et Mitterrand est facilement réélu.

 

Deux fois battu et alors que la droite ne possède pas d’autre alternative sérieuse, Chirac pense avoir un boulevard devant lui pour l’élection de 1995. Il ne verra pas le danger venir dans son propre camp, mieux dans son propre parti, encore mieux d’un ami de trente ans Edouard Balladur. Alors que la « machine à perdre » semble repartie de plus belle, Chirac ne devra son salut qu’à l’absence d’une véritable opposition à gauche. En effet, Mitterrand ne se représente pas et Lionel Jospin, candidat de la dernière minute, ne fait pas le poids.

 

En 2002, la machine à perdre change de camp et passe à gauche… Ainsi, certain de passer le premier tour, Jospin se concentre exclusivement sur le second, laissant naïvement les « petites candidatures » à gauche émietter son électorat. Si l’on rajoute la montée en puissance du Front National, le cocktail devient détonnant et la gauche ne sera même pas présente au deuxième tour. C’est le coup de tonnerre, un « tsunami politique » comme le dira Nicolas Sarkozy.

 

En 2007, en dépit des primaires à gauche censées gommer les divisions, la redoutable machine Sarkozy fera l’effet d’un rouleau compresseur à droite malgré la candidature de François Bayrou.

 

Qu’en sera t-il en 2012 ? A droite tout d’abord, si les centristes (Bayrou, Borloo, Morin) s’entendent, ce qui est loin d’être acquis, alors la « machine à perdre » risque de se remettre en marche. A gauche, nous vivons actuellement un véritable roman feuilleton. Alors que le pacte Aubry-DSK-Royal était censé constituer un ticket gagnant, la candidature surprise de Ségolène Royal a compliqué la donne.

 

Ambitions personnelles, ego, soif de pouvoir, rancunes, guerres internes sont autant de carburants qui alimenteront certainement la machine à perdre à gauche comme à droite en 2012.

 

 

La phrase de la semaine :

«Dominique ne sera peut être pas candidat… en attendant, il nous fait bosser comme des fous. On doit même le freiner, pour ne pas travailler déjà sur les affiches du second tour !». Un ponte d’Euro RSCG

 

Jérôme Boué