Le retour de la machine à perdre ?

Si ce n’est certainement pas le cadeau d’anniversaire que Nicolas Sarkozy attendait le jour de ses 55 ans les faits sont là, Dominique de Villepin a été relaxé du chef de complicité calomnieuse dans le cadre de l’affaire Clearstream. Villepin le hussard se remet donc en selle avec dans sa ligne de mire Nicolas Sarkozy, ouvrant ainsi un nouvel épisode de la guerre que se livrent les deux hommes. En effet leurs relations conflictuelles ne datent pas d’hier. Elles ont vu le jour en 1993 lorsque Nicolas Sarkozy a annoncé à Jacques Chirac son ralliement à Edouard Balladur. Dominique de Villepin était alors directeur de cabinet d’Alain Juppé, Ministre des affaires étrangères. A l’époque, l’actuel chef de l’Etat œuvrait d’arrache pied pour rallier les chiraquiens à Balladur, utilisant comme toujours la méthode forte « tu es avec nous ou contre nous ». Chirac élu, Nicolas Sarkozy tombe naturellement en disgrâce et Villepin – pensant que ce dernier pouvait être utile – propose au Président une réconciliation, sans succès….

 

L’année 2002 marque le grand retour de l’ambitieux Sarkozy mais les relations avec Chirac et le secrétaire général de l’Elysée sont détestables et tournent très vite à la guerre totale. Après l’éviction de Gaymard puis de Juppé pour des raisons judiciaires, Chirac tente de mettre sur orbite Dominique de Villepin pour barrer la route à Sarkozy. Malheureusement, le CPE aura raison du Premier Ministre qui renonce à entrer dans l’arène. Depuis l’élection de Nicolas Sarkozy, Villepin reste un de ses plus farouches opposants. La guerre entre les deux hommes a bien sûr pris une toute autre dimension depuis l’affaire Clearstream mais l’ex Premier ministre n’était pas libre de ses mouvements jusqu’au verdict final…. N’ayant plus cette épée de Damoclès au dessus de la tête, celui qui passa de la lumière à l’humiliation peut préparer sa revanche.

 

Si tous les regards sont désormais tournés vers 2012, les chances de Dominique de Villepin de créer une dynamique et de l’emporter sont minces et cela, pour quatre raisons essentielles. Premièrement, l’ex Premier Ministre, qui n’a jamais reçu l’onction du suffrage universel, s’attaquerait d’emblée à l’élection la plus dure qu’il soit. Deuxièmement, les Français ne veulent manifestement plus des « technos », les Rocard, Fabius, Juppé, énarques raides et compassés trop éloignés des réalités quotidiennes des Français. Troisièmement, Dominique de Villepin n’a pas de parti et pratiquement pas de parlementaire. Enfin, en qualité d’ex Premier Ministre de Jacques Chirac, il incarne l’immobilisme de cette période et appartient en quelque sorte au passé. Il a donc très peu de chance d’incarner l’avenir aux yeux des Français.

 

En revanche, Dominique de Villepin dispose d’un vrai pouvoir de nuisance. En effet, il est probable qu’il fasse tout pour abattre son rival Nicolas Sarkozy. L’homme est en effet ultra déterminé et passe parfois pour un illuminé. Prêt à tout, il pourrait bien réactiver cette fameuse «machine à perdre » qui fit tant de tort à la droite. On se rappelle notamment de la guerre Valérie Giscard d’Estaing – Chirac, ce dernier appelant en sous main à voter pour François Mitterrand au deuxième tour en 1981, de l’opposition Barre-Chirac en 1988 ou encore du duel Chirac-Balladur en 1995. Martine Aubry peut donc se frotter les mains car la relaxe de Villepin affaiblira certainement Nicolas Sarkozy. S’il est actuellement difficile de quantifier son pouvoir de nuisance, il est certain qu’après la défaite annoncée aux régionales, il s’agit d’une grosse pierre dans le jardin élyséen. A suivre…

 

La phrase de la semaine :

«Je ne vais quand même pas me retrouver toutes les semaines avec les trois types que je déteste le plus, Chirac, Debré et Giscard d’Estaing» (Paris Match) de Edouard Balladur affirmant qu’il ne souhaitait pas être bombardé au conseil constitutionnel.

 

rôme Boué