« Soyons capables de débattre sans nous déchirer, sans nous insulter, sans nous désunir » ou encore « Je souhaite que l’année 2010 soit l’année où nous redonnerons un sens au mot fraternité ». Après le concept de « politique de civilisation » qui fit couler beaucoup d’encre lors la cérémonie des vœux 2008, la cuvée 2010 est résolument placée sous le signe du rassemblement et du respect mutuel. Une fois de plus, la démarche présidentielle est clairement guidée par une stratégie de communication qui colle aux circonstances. Tout d’abord, Nicolas Sarkozy qui est loin d’être au plus haut dans les sondages, a toujours un déficit d’image lié à sa personnalité qu’il se doit de combler. Ses colères légendaires, ses dérapages verbaux, même s’ils sont moins fréquents en public, restent à l’esprit des Français.
Le Président caricaturé en Dark Vador lors de l’affaire de l’Epad, veut se débarrasser de son coté obscur qui lui colle à la peau. Nicolas Sarkozy souhaite prouver qu’il a pris la mesure de sa fonction et qu’il sait prendre de la hauteur en rassemblant tous les Français à l’image du François Mitterrand de 1988 qui faisait campagne sur le thème de « la France unie ». Cette image de rassembleur est également importante alors que le débat sur l’identité nationale se durcit, au risque de tomber dans la surenchère, à l’approche des élections régionales qui verront peut être le retour en force du FN.
L’équation est en effet complexe pour l’UMP qui avait dépouillé le FN d’une grande partie de ses voix lors de la présidentielle de 2007 et qui souhaiterait conserver son « acquis d’électeurs » pour les régionales. En effet, le discours doit être suffisamment radical pour ne pas laisser le champ libre au FN, mais pas trop, afin de ne pas effrayer l’électorat traditionnel et du centre. Ainsi, face à la xénophobie du FN, le Président se veut rassembleur en appelant à la fraternité entre les Français. Après avoir laissé ses ministres faire « le sale boulot », le Président calme le jeu afin de redorer l’image de l’UMP.
Ce n’est pas sans rappeler la « zen attitude » de Nicolas Sarkozy lors du débat d’entre deux tours, alors que Ségolène Royal a tout tenté pour le faire sortir de ses gonds. Le message était clair, après avoir fait une campagne présidentielle clairement à droite, générant de nombreuses attaques sur sa personnalité, Nicolas Sarkozy avait tout fait pour restaurer son image sans la dernière ligne droite. Le concept de fraternité, au cœur des vœux présidentiels, n’est d’ailleurs pas sans rappeler le show de Ségolène Royal au Zénith en septembre 2008 qui scanda ce mot « Fraternité » avant de finir par un mystique « Aimez vous les uns les autres ». Nicolas n’a pas osé aller aussi loin, évitant ainsi aux vœux présidentiels de ressembler à une messe de minuit une semaine après Noël…
La phrase de la semaine :
«Quand on a peu de cheveux, c’est bien d’avoir deux casquettes» d’Eric Woerth, Ministre du Budget et trésorier de l’UMP, agacé par la polémique sur le cumul de ses fonctions.
Jérôme Boué