Dire qu’il y a encore quelques semaines, personne (ou presque) n’était prêt à miser le moindre kopeck sur la reprise américaine, en particulier en matière industrielle. Aujourd’hui, les plus pessimistes d’hier se battent pour annoncer l’imminence du rebond de l’économie américaine. A commencer par Alan Greenspan qui, il y a peu, n’était pourtant pas avare de critiques sur la politique de relance et annonçait que la reprise ne pourrait avoir lieu avant la fin 2010, au mieux, disait-il…
Même s’il ne faut évidemment pas sauter au plafond et/ou vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué, il est clair que la dernière enquête ISM des directeurs d’achat dans l’industrie manufacturière confirme que l’heure du rebond a bien sonné.
Certes, l’indice synthétique de l’enquête n’a pas franchi la barre des 50, censée marquer la frontière entre le repli et le hausse de l’activité. Pourtant, en atteignant un niveau de 48,9 en juillet, cet indicateur avancé de la croissance américaine a atteint un plus haut depuis août 2008.
Mieux, les deux principaux sous-indices de cette enquête sont remontés en flèche. Ainsi, l’indice relatif à la production, qui était déjà passé au-dessus des 50 en juin, s’est hissé à un niveau de 57,9, un plus haut depuis juin 2007 ! Autrement dit, après un an de déstockage massif et de recul de la production, cette dernière est en train de redémarrer en trombe. En effet, la dernière fois que l’indice « production » était au niveau actuel, le glissement annuel de la production industrielle dépassait les 2 %, alors qu’il est de – 13,6 % aujourd’hui. Le potentiel de reprise s’annonce donc conséquent.
De même, l’indice relatif aux nouvelles commandes est passé de 49,2 en juin à 55,3 en juillet, un plus haut depuis juillet 2007. En d’autres termes, après quatre trimestres consécutifs de désinvestissement, les entreprises industrielles américaines ont décidé de réinvestir massivement pour ne pas rater la reprise.
Enfin, même l’indice « emploi » a retrouvé des couleurs en juillet. Certes, il ne dépasse pas la barre des 50, mais avec un niveau de 45,6, contre 40,7 en juin ou encore 26,1 en février dernier, il retrouve un plus haut depuis août 2008. Après avoir licencié massivement et exagérément, les entreprises américaines sont donc sur le point d’arrêter ce massacre avant de reprendre le chemin des créations d’emplois dans les prochains mois, une fois que le mouvement de réinvestissement sera lancé.
Le cercle vertueux de croissance investissement-emploi-consommation, que la grande majorité des économistes croyait mort et enterré pour longtemps, est donc bien en train de renaître de ses cendres.
Seule ombre au tableau : il ne faudrait pas que ce rebond entraîne une flambée des cours pétroliers et des taux d’intérêt, ce qui freinerait inévitablement la reprise à venir. C’est là toute la futilité des marchés : hier, ils étaient prêts à sombrer dans les années 30, aujourd’hui, ils veulent croire au retour de la croissance forte… Or, si la reprise est inévitable, elle restera fragile. Il ne faudra donc pas la gâcher.
Marc Touati