Il y a quasiment un an (le 8 août 2008 pour être précis), nous écrivions dans ces mêmes colonnes, une chronique intitulée « Cachez cette récession que je ne saurais voir… ». A l’époque, nous soulignions le refus de la grande majorité des dirigeants politiques et monétaires européens (en particulier en France) de reconnaître l’avènement d’une récession dans la zone euro, notamment en France, depuis le printemps Cette spirale dévastatrice a tellement bien fonctionné qu’aujourd’hui nous vivons la réciproque de la situation de l’été 2008 dans la mesure où quasiment personne ne veut croire au rebond tant boursier qu’économique qui se dessine depuis le printemps dernier. Et pour cause : dans la mesure où 95 % des intervenants financiers, des prévisionnistes et autres observateurs de la chose économique n’ont pas anticipé ce rebond, ils ne veulent non seulement pas y croire, mais, au surplus, persistent à annoncer que la rechute forte et durable est inévitable. Chacun y va de son argument ad hoc : spéculation, déclencheurs automatiques de mouvements d’achat, faiblesse des volumes, myopie des investisseurs… Bien entendu, tous ces éléments recèlent une part de vérité, mais qui reste limitée. Ce qui est amusant réside dans le fait que dans la phase de baisse excessive de l’hiver dernier, ces arguments tout aussi crédibles n’étaient absolument pas avancés. Cela confirme bien que les partisans du Bear Market sont toujours largement majoritaires et refusent d’admettre qu’ils ont eu tort. Car, ne l’oublions pas, le 9 mars dernier, lorsque le Cac 40 touchait les 2500 points, plus de 95 % des prévisionnistes, stratégistes et autres devins annonçaient que la messe était dite et que le Cac 40 plongerait rapidement vers sous les 2000 voire vers les 1500 ! A l’époque, nous étions parmi les très rares à anticiper l’imminence d’un rebond. Et ce non pas par divination ou autre magie noire, mais simplement en nous basant sur les fondamentaux économiques. Certes, ce type de stratégie ne nous permet pas d’avoir toujours raison. Il ne nous a par exemple pas permis de prévoir la faillite de Lehman Brothers dans les conditions dans lesquelles elle a été menée et qui ont généré un mouvement de panique mondiale inextinguible. C’est là que s’arrête le travail de l’économiste car ce dernier ne peut prévoir que ce qui est économiquement prévisible et ne doit donc pas baser ses prévisions sur des spéculations ou des catastrophes imprévisibles. Ceux qui annoncent qu’ils avaient prévu la gravité de la crise qui a suivi la faillite sauvage de Lehman sont donc des usurpateurs. Le seul qui l’avait prévu reste évidemment Nouriel Roubini mais dans la mesure où celui-ci annonçait cette crise depuis plus de dix ans, il fallait bien qu’il ait raison un jour. De la même façon, celui qui aujourd’hui annonce un nouvel écroulement de la croissance mondiale et des bourses internationales en anticipant une grave pandémie mortelle de la grippe A ou un conflit au Moyen-Orient n’est pas sérieux et devrait vite prendre quelques semaines de vacances. Autrement dit, si le pire est toujours possible, il n’est pas opportun de ne voir l’avenir que dans ce sens, de la même façon qu’il n’est pas convenable de nier les difficultés qui entoure l’actuel rebond économico-boursier. Mais, de grâce, que l’on arrête de dire que ce rebond n’existe pas, qu’il n’est qu’une illusion… Les faits sont d’ailleurs clairs : entre le 9 mars et le 12 juin, le Dow Jones a gagné 33,9 %, pour reperdre ensuite 7,4 % jusqu’au 10 juillet et reprendre ensuite plus de 11 % en onze jours de bourse. Bien entendu, il faut souligner qu’en repassant au-dessus de la barre des 9 000, l’indice phare Wall Street n’a fait que revenir vers ses niveaux de novembre 2008. Néanmoins, comparativement à la bérézina majoritairement annoncée, le rebond demeure extrêmement appréciable. Et ce d’autant qu’il a résisté au mouvement de prises de bénéfices de juin. Et c’est peut-être là que réside le plus important : dans la mesure où 95 % des investisseurs ont raté le premier rebond, certains d’entre eux ont décidé de ne pas rater le deuxième et ont donc acheté massivement des actions après la correction baissière de juin. Un mouvement similaire de yo-yo devrait s’observer pendant encore quelques mois, au gré des publications statistiques qui continueront de souffler le chaud et le froid, comme lors de chaque reprise économique. Cette dernière est effectivement rarement rectiligne et enregistre souvent des soubresauts à l’allumage. Ainsi, le Cac 40 par exemple devrait osciller entre 3000 et 3500 jusqu’à l’automne prochain. Car ce n’est qu’à partir du troisième trimestre que le rebond économique américain et mondial sera confirmé. L’économie européenne devra certes attendre le début 2010 pour une telle confirmation mais dans la mesure où les Etats-Unis continue de donner le « la » sur les marchés boursiers européens, ces derniers devraient connaître, à l’instar de leurs homologues américains, un rally de fin d’année. Et ce d’autant, qu’après s’être livré à un cost cutting massif, les entreprises verront leurs marges flamber avec la moindre hausse de leurs chiffres d’affaires. Si les résultats des entreprises du deuxième trimestre sont donc encore moyens, ceux du troisième trimestre devraient donc être flamboyants. Les derniers réticents à accepter le rebond ne pourront alors plus jouer au tartuffe en refusant de voir la réalité et reviendront eux aussi à l’achat sur les actions. D’ici là, la grippe A, la bombe iranienne ou l’augmentation du taux refi de Voilà pourquoi, dans des conditions géopolitiques et sanitaires normales, nous maintenons nos prévisions d’un Cac 40 à 4000 et d’un Dow Jones à 10 000 pour la fin 2009-début 2010, prévisions que nous annoncions en mars dernier… Marc Touati
Cachez ce rebond que je ne saurais voir…
- Les ménages français restent inquiets.
- Récession américaine : l’hémorragie est stoppée