Remaniement ministériel : un concentré de sarkozysme

Alors que le remaniement ministériel ne devait être qu’un ravalement de façade, il s’est transformé en un important chantier que n’aurait pas renié l’ami du président Martin Bouygues. Derrière ce remaniement de grande ampleur – huit entrants, huit sortants et quatorze promotions ou changements d’affectation – c’est tout l’esprit du Sarkozysme qui ressort. Sur la forme d’abord, pour ceux qui en doutaient encore, le cœur névralgique de la prise de décision ne passe pas François Fillon mais par les proches conseillers du Président. On l’a vu notamment avec la nomination de Frédéric Mitterrand qui fut d’abord approché par Raymond Soubie, Claude Guéant, Henri Guaino, puis Pierre Giacometti et enfin Patrick Buisson et Alain Minc, avant de rencontrer le chef du gouvernement…

 

Une fois de plus, Claude Guéant apparaît comme le véritable Premier Ministre, reléguant François Fillon au rang de simple collaborateur. On retrouve également la méthode forte du Président illustrée par le fait que la plupart des sortants n’ont pas été préalablement informés de leur sort. La pilule doit être bien amère pour ceux et celles qui après s’être dévoués au service d’un Président très exigeant, sont remerciés de la sorte.

 

Sur le fond ensuite, ce nouveau gouvernement met en relief les effets de manche et la politique marketing de Nicolas Sarkozy. Tout d’abord, c’en est fini de la diversité si chère à Nicolas Sarkozy puisque Rama Yade disparaît dans les méandres du Ministère de la Jeunesse et des Sports. Quant à Rachida Dati, le symbole le plus fort du précédent gouvernement, elle se voit forcée de tirer sa révérence. C’est également la fin des Droits de l’Homme, fonction a priori si importante pour Nicolas Sarkozy, mais qui en réalité est apparue comme un gadget supplémentaire. Fin également de l’épisode Bernard Laporte, qui représentait la volonté, le courage, et le sport comme école de la vie, valeurs chères à Nicolas Sarkozy.

 

Michèle Alliot-Marie, trop chiraquienne pour rester à un poste aussi sensible que la Place Beauveau, et qui était déjà très largement court-circuitée par Claude Guéant (encore lui…), voit le bout du tunnel sous la forme d’un poste de Ministre d’Etat à la Justice. Enfin, ce nouveau gouvernement est la preuve que la politique d’inventaire sensée rassembler les meilleurs et transcender les clivages politiques, n’était en fait que de la politique politicienne. En effet, l’UMP se taille la part du lion, et en cela – pour ceux qui en doutaient encore – Nicolas Sarkozy n’est pas toujours si éloigné de Jacques Chirac, mais simplement beaucoup plus habile politiquement.

 

Là où on attendait du courage politique, du changement et de l’action, il semble donc que Nicolas Sarkozy soit bien conformiste pour un homme sensé incarner la rupture.

 

 

La phrase de la semaine :

«Je vous demande d’avoir un comportement exemplaire, nous ne sommes pas des stars et nous n’avons pas à parler de notre vie privée dans les médias. J’attends de vous que vous soyez une équipe solidaire. Je ne suis pas à la tête d’un gouvernement de clans.» de François Fillon lors du séminaire gouvernemental consacré au grand emprunt.

 

rôme Boué