La nouvelle est tombée il y a quelques jours : les impôts locaux augmenteront de plus de 4%, en moyenne, en 2009. Certaines villes connaîtront des hausses très substantielles : +15% à Nice, +9% à Nantes ou Paris, + 6% à Lyon. Les départements ne seront pas en reste : +5% en moyenne, le rythme le plus élevé depuis 10 ans. En 5 ans, la pression fiscale s’est accrue de 20% dans les départements et 36% dans les régions. Et la tendance n’est pas près de s’inverser.
En effet, certains revenus des collectivités locales ont diminué, soit structurellement (la dotation globale de fonctionnement accordé par le Gouvernement est limitée à 0.8% en 2009), soit conjoncturellement (la baisse des droits de mutation résulte en grande partie de la crise immobilière) la réforme de la taxe professionnelle va également se traduire par un manque à gagner pour les communes.
De l’autre coté, les collectivités locales rechignent à rogner sur leurs dépenses. Le recrutement de fonctionnaires locaux ne s’est pas ralenti contrairement à celui de l’Etat ; la crise entraîne aussi de nouveaux déboures (entreprises en difficulté, à soutenir).
En fait, le contrôle des budgets des collectivités locales se révèle insuffisant, malgré l’intervention des Cours des Comptes régionales. Ainsi, de nombreuses villes se sont lancées dans des financements hasardeux ou se retrouvent avec des « actifs toxiques » (St Etienne, Laval) dans leurs bilans. Sans compter les dépenses somptuaires (construction d’Hôtels de région luxueux, d’infrastructures redondantes, etc).
Par ailleurs, les efforts réalisés en vue de diminuer l’empilement des strates administratives
(Communautés de communes, canton, département, région) sont totalement insatisfaisants.
Le rapport Balladur, qui s’attaque à ce chantier est à la fois timide et peu efficace. Bref, on peut anticiper une poursuite de la détérioration de la situation : la fiscalité locale va continuer à progresser, jusqu’à devenir « confiscatoire », sans permettre un réel désendettement des collectivités territoriales.
Cette tendance de fond illustre bien le modèle français, une économie sociale de marché où la croissance est faible en périodes fastes(moins de 2%), mais la récession atténuée en périodes critiques, grâce à la présence de « stabilisateurs », au nombre duquel l’action des collectivités territoriales est en première ligne : en recrutant des fonctionnaires locaux, elles soutiennent l’emploi ; en aidant les entreprises fragilisées, elles évitent les fermetures d’usine ; en construisant des infrastructures, elles favorisent l’essor des travaux publics et de l’immobilier.
Ce choix de société a néanmoins un prix. Toutes les études montrent que la productivité du secteur public est largement inférieure à celle du secteur privé. Par conséquent, l’allocation des ressources au niveau macroéconomique est sous-optimale.
L’argent prélevé par les collectivités territoriales pour boucler leur budget, sous forme d’impôts, redevance ou cotisations manque cruellement dans d’autres domaines.
Sans parler de l’enseignement supérieur, parent pauvre du développement national (qui reçoit très peu de fonds privés) on peut citer la recherche : les dépenses de R&D financées par le privé s’élèvent à seulement à 1,1% en France, contre 1,7% en Allemagne et aux Etats-Unis et 2,5% au Japon. En d’autres termes, l’Etat, les collectivités locales, ne peuvent plus assurer ces fonctions porteuses d’avenir, car elles n’ont plus de marge de manœuvre financière et le privé ne prend pas le relais.
Dernier chiffre à méditer pour les défenseurs du modèle économique français, soit disant garant d’une sortie de crise facilitée : alors que les Etats-Unis verraient leur PIB s’inscrire à 15% au-dessus de son niveau de 2002, à la fin de 2010, avec un chômage en dessous de 9%,
Ces statistiques mériteraient un vrai débat, au niveau national :
Bernard Marois
Président
Club Finance HEC