Alain Juppé et Nicolas Sarkozy : Amicalement vôtre

Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, deux très fortes personnalités au service d’une même ambition furent pendant longtemps les deux frères ennemis de la chiraquie. Jacques Chirac n’a jamais caché sa préférence pour Alain Juppé qu’il qualifiait de « meilleur d’entre nous » et auquel il vouait une véritable admiration. Nicolas Sarkozy était donc relégué au second plan par l’ex président qui voyait en Juppé son successeur potentiel.

Il faut dire qu’à l’exception de leurs ambitions présidentielles, tout opposait les deux hommes. Alain Juppé, normalien, énarque Inspecteur des Finances, était considéré comme une machine intellectuelle, mais il n’a jamais su séduire les Français avec sa personnalité froide et son ton cassant. A l’inverse, Nicolas Sarkozy au parcours scolaire très moyen est doté d’un vrai charisme oratoire et d’un talent de communicant politique qui font cruellement défaut au maire de Bordeaux. Cela explique pourquoi Nicolas Sarkozy parvint à se faire élire Président de la République alors qu’Alain Juppé, même sans ses déboires judiciaires, n’y serait sans doute jamais parvenu.

 

Pour ce qui est du mode d’exercice du pouvoir il est intéressant de constater qu’Alain Juppé affirme dans l’Enfer de Matignon « l’erreur que, rétrospectivement je comprend avoir commis, à l’automne 1995, c’est d’avoir déclenché trop de réformes en même temps », alors que c’est justement le mode opératoire actuel de Nicolas Sarkozy !

On se souvient qu’Alain Juppé avait été laminé par l’essoreuse de Matignon jusqu’au triste épilogue de la dissolution de 1997 qui le poussa prématurément vers la sortie. De son côté Nicolas Sarkozy qui doit faire face actuellement à de nombreux mouvements sociaux (Continental, Total, les infirmières, les chercheurs…) voit sa cote de popularité s’affaiblir notamment au sein de son propre électorat.

 

Face à une crise économique sans précédent, Nicolas Sarkozy dispose d’un boulevard lui permettant de prendre des mesures exceptionnelles pour endiguer la tempête. Même si ses marges de manœuvre sont réduites du fait de la situation budgétaire, il se doit de saisir cette opportunité pour être plus flexible et inventif même si cela peut contrarier son électorat de base.

En revanche, il devrait faire preuve d’écoute, chercher à tisser un lien avec les Français et surtout ne pas « faire du Juppé » qui était resté droit dans ses bottes, raide et sec tel le pin des landes auquel on le comparait souvent.

 

 

La phrase de la semaine :

«Le gouvernement n’a pas de baguette magique pour sortir de la crise.» de François Fillon.

 

rôme Boué