La relance des 1000 et 1 projets…

1000 projets pour la relance française c’est beaucoup. Peut-être même trop selon certains, puisque cela risque de diluer excessivement l’effort de relance et par là même de réduire son efficacité.

Selon nous, le problème de ce plan aux 1000 projets réside plutôt dans le fait qu’il en manque 1. D’abord parce que 1000 et 1 c’est beaucoup plus romantique et porteur de rêve et d’espoir. Mais surtout parce que le projet qui manque à la France réside dans une meilleure cohésion de son système économique entre les entreprises et les salariés, mais aussi la fonction publique.

Certes, baser le plan de relance sur l’investissement va évidemment dans le bon sens. Notamment parce que cela permettra de démultiplier les investissements publics en investissements privés (via ce que l’on appelle le multiplicateur d’investissements) et ainsi de fertiliser ces efforts à l’ensemble de l’économie nationale.

Pour autant, dans la mesure où la tentation de la lutte des classes en France est très forte et où de plus en plus de ménages souffrent de la détérioration du marché du travail, un plan de relance idéal doit aussi contenir des mesures directes de soutien aux ménages. Bien entendu, Nicolas Sarkozy a déjà en partie rectifié le tir en annonçant des mesures sociales. Mais sera-ce suffisant ?

En effet, il ne faut pas se voiler la face : c’est l’heure de la traversée du désert pour l’économie française. Et pour cause : après la baisse de la consommation des ménages en décembre, la baisse des prix immobiliers fin 2008 et la faiblesse du moral des chefs d’entreprises, la France entame désormais une phase d’augmentation soutenue du chômage.

Ainsi, après avoir déjà augmenté de 9,1 % de mai à novembre derniers (soit près de 172 000 personnes), le nombre de chômeurs a encore flambé de 45 000 personnes sur le seul mois de décembre. Malheureusement, la forte baisse des prévisions d’effectifs selon l’enquête trimestrielle dans l’industrie de janvier montre que cette progression n’est pas terminée. Dans ce cadre, le taux de chômage risque de très vite retrouver la barre des 8 % d’ici le printemps, voire des 8,5 % d’ici l’été prochain.

Le chômage est effectivement une variable retardée de l’activité. Dès lors, dans la mesure où le PIB a reculé d’au moins 0,6 % au quatrième trimestre 2008 et restera atone jusqu’au deuxième trimestre 2009, le chômage va poursuivre sa progression au moins jusqu’à l’été prochain. L’enjeu est alors de limiter le cercle pernicieux récession-chômage-récession qui risque de s’engager. Pour ce faire, seule une solution s’impose : faire une politique de relance globale qui allie politique budgétaire et politique monétaire, soutien de l’offre et de la demande, aide à l’investissement et à la consommation, le tout coordonné au niveau de la zone euro.

Si nous n’y parvenons pas à court terme, alors la déflation s’installera et le chômage restera durablement supérieur à 8,5 %. Si les Européens ont réussi à se mettre d’accord sur le plan de sauvetage des banques, il faut désormais qu’ils en fassent de même sur le front de l’économie et de l’emploi. Et le temps presse. Car si nous tardons trop, la crise sociale prendra le pas sur la crise économique et là tous les instruments conventionnels de la politique économique deviendront inopérants

Deux questions demeurent alors : comment aider les ménages ? Et comment financer cette aide ? Il est clair qu’augmenter unilatéralement les salaires en faisant porter la charge sur les entreprises serait totalement inefficace. Ces dernières seraient alors dans l’obligation de réduire encore davantage leurs effectifs, voire d’investir plus à l’étranger ou encore de fermer boutique.

Selon nous, la meilleure stratégie consisterait à réduire la pression fiscale qui pèse sur les particuliers. Non pas en abaissant l’impôt sur le revenu, puisque seule la moitié des Français le paie. Il faudrait donc plutôt réduire les impôts que toute le monde paie, à savoir la CSG et/ou la CRDS, qui, rappelons-le, étaient initialement des impôts temporaires. De la sorte, les ménages verront immédiatement et directement qu’ils bénéficient eux aussi de l’effort de relance.

La question du financement de cette mesure est alors tout aussi simple : il faut réduire les dépenses de fonctionnement des administrations publiques qui augmentent de 11,3 milliards d’euros par an depuis 2002. Bien entendu, il ne s’agit pas de réduire les salaires des fonctionnaires de base, mais ceux de nos hauts-dirigeants dont, parfois, l’efficacité reste à prouver, a fortiori s’ils cumulent les emplois et les revenus.

A l’heure où tous les salariés privés de France doivent faire des efforts en termes salariaux, il serait bienvenu que les responsable de nos administrations publiques, centrales, locales et sociales montrent eux aussi l’exemple. Ils indiqueraient ainsi aux Français que nous sommes bien tous dans le même bateau et que si ce dernier coule, nous coulerons tous, mais que si nous nous retroussons tous les manches nous redresserons enfin notre bateau ivre de dépenses publiques, de croissance molle et de dysfonctionnements.

L’heure du dégrisement est donc venue. Et ce sera peut-être d’ailleurs là que résidera la vertu principale de cette crise.

Marc Touati