Les marchés et de très nombreux prévisionnistes étaient tellement sûrs que la variation du PIB américain au quatrième trimestre 2008 serait catastrophique qu’ils restent abasourdis par l’annonce du chiffre effectif : finalement, alors que le consensus de marché annonçait un plongeon du PIB de 5,5 % en rythme annualisé, cette variation a finalement été de – 3,8 %, soit tout juste 0,2 point de mieux que la prévision que nous formulions dans cette même publication il y a une semaine.
Bien entendu, il n’y a pas de quoi sauter au plafond. Ainsi, tous les postes de la demande finale privée enregistrent des baisses conséquentes. A commencer par l’investissement des entreprises (- 19,1 %) et l’investissement logement des ménages (- 23,6 %). Parallèlement, la consommation des ménages a également reculé mais de « seulement » 3,5 %, soit un peu moins qu’au troisième trimestre (- 3,8 %).
En glissement annuel, les chutes sont évidemment sans appel, comme le montre le graphique ci-dessous.
L’ajustement est fort.
En outre, l’effet du commerce extérieur a été quasiment neutre sur le PIB, puisque les exportations ont reculé de 19,7 %, alors que les importations n’ont baissé « que » de 15,7 %. S’il s’agit là de baisses pléthoriques et historiques, cela montre également qu’une révision haussière pourrait intervenir lors de la prochaine estimation du PIB une fois les chiffres de la balance commerciale de décembre connus.
D’où une question : quelles évolutions ont-elles permis d’éviter le pire ? Il y en a en fait trois. D’abord, la moindre baisse de la consommation (comme évoquée plus haut).
Ensuite, l’augmentation de 1,9 % de la consommation publique, qui a néanmoins nettement ralenti par rapport aux 3,9 % du deuxième trimestre et aux 5,8 % du troisième trimestre.
Enfin, après avoir atteint un plancher de – 50,6 milliards de dollars au deuxième trimestre, puis remonté à – 29,6 milliards au troisième, la formation de stocks est redevenue positive à 6,2 milliards.
Ainsi, hors stocks, la baisse du PIB atteint – 5,1 %, ce qui reste néanmoins encore inférieur à la prévision consensuelle de – 5,5 % pour le PIB global.
En outre, ce restockage montre que les entreprises américaines commencent à préparer la reprise.
Autrement dit, comparativement à la bérézina annoncée, l’Oncle Sam continue de faire de la résistance.
Certes, le glissement annuel du PIB est désormais passé dans le rouge à – 0,2 %, un plus bas depuis le deuxième trimestre 1991. Cependant, nous restons encore très loin des abysses annoncées. Par exemple, ce glissement annuel a atteint – 1 % au plus fort de la récession de 1991 et – 2,7 % au troisième trimestre 1982.
Le PIB recule mais les stocks rebondissent.
Par ailleurs, sur l’ensemble de l’année 2008, la croissance américaine a finalement été conforme aux prévisions que nous annonçons depuis un an, à savoir 1,3 %, alors que le FMI prédisait 0,5 % il y a un an. Histoire de rappeler qu’il ne faut pas forcément accorder beaucoup de crédit aux prévisions de cet organisme « réputé ».
De même, en dépit de la crise financière, le PIB n’a reculé que de 1,1 % sur le troisième et le quatrième trimestre (respectivement – 0,1 % et – 1 %).
Cette décrue de fin d’année se traduit ainsi par un acquis de décroissance pour 2009 de – 0,6 %. Là aussi, s’il ne s’agit évidemment pas d’une bonne nouvelle, cela permet de rester loin du marasme trop souvent anticipé.
Dans ce cadre, compte tenu de ce faible effet négatif et surtout des effets directs de la baisse des prix des matières premières, du repli des taux d’intérêt et du plan de relance budgétaire, nous maintenons notre prévision selon laquelle le PIB devrait croître d’environ 1 % sur l’ensemble de l’année 2009.
Marc Touati