2009, une année de reconnexion

Comme nous l’avons explicité le 9 janvier dernier dans ces mêmes colonnes, l’année 2008 a été l’année de toutes les mauvaises surprises. A tel point que les investisseurs et la grande majorité des acteurs économiques à travers le monde ne veulent plus voir que les mauvaises nouvelles, sombrant par là même dans le pessimisme le plus obscur.

Pourtant, s’il ne faut évidemment pas se voiler la face et s’il faut même reconnaître que le début 2009 pourrait nous réserver encore quelques dernières mauvaises nouvelles, il est également indispensable de prendre conscience que de nombreuses lueurs d’espoir existent et surtout qu’elles pourraient devenir de plus en plus scintillantes au cours de l’année 2009. En fait, selon nous, cette dernière devrait finalement consacrer une reconnexion de la plupart des grandeurs financières et nominales avec la réalité économique. Autrement dit, tous les excès des dernières années et en particulier de 2008 devraient être corrigés au cours des prochains trimestres.

D’ailleurs, certaines corrections ont déjà commencé. Il s’agit tout d’abord de l’évolution des matières premières. En effet, après avoir flambés bien au-delà du raisonnable, les cours des matières premières reviennent simplement vers des niveaux plus normaux. Pis ou mieux, elles connaissent désormais un effet de balancier impressionnant qui les a fait passer d’une flambée injustifiée à une décrue excessive. Ainsi, pour 2009 et de manière à ne pas être trop optimistes, nous tablons sur une stabilisation des cours de l’ensemble des matières premières autour de leurs niveaux de fin 2008, avec par exemple un baril qui se stabiliserait autour des 50 dollars. Néanmoins, comparativement aux 150 dollars de l’été dernier et à fortiori aux 200 dollars annoncés très souvent à l’époque, ce niveau de 50 dollars constituera un avantage de poids pour l’ensemble des consommateurs.

A l’inverse, les pays producteurs de pétrole et de gaz redescendent sur terre et leur atterrissage risque d’être douloureux. Ainsi, les impétueux Venezuela, Russie et pays du Golfe vont devoir calmer leurs ardeurs et comprendre que tout miser sur une seule industrie est particulièrement dangereux.

Toujours est-il que, comme l’a montré l’évolution récente des prix à la consommation, l’inflation recule partout dans les pays développés, conférant par là même un peu plus de pouvoir d’achat aux ménages, en leur permettant surtout de réallouer leurs dépenses des produits énergétiques et alimentaires vers des biens manufacturés et des services à valeur ajoutée.

En d’autres termes, dans la mesure où les revenus des ménages ne se sont pas ajustés aux prix au cours des dernières années, ce sont désormais les prix qui s’ajustent aux revenus des particuliers.

Dans ce même ordre d’idée, les bulles immobilières non encore dégonflées, notamment en France (sachant qu’elles ont déjà éclaté outre-Atlantique et ont commencé à le faire sérieusement en Espagne, en Irlande et au Royaume-Uni), vont désenfler nettement en 2009. Dans l’Hexagone, nous nous attendons à une baisse des prix des logements anciens de l’ordre de 20 % d’ici le printemps 2010. Et le baby boom n’y changera rien, car dans la mesure où les prix immobiliers sont trop élevés par rapports aux revenus et que ces derniers ne peuvent pas augmenter significativement, il faut que les premiers s’ajustent. En d’autres termes, nous retrouvons simplement là, la loi de l’offre et de la demande, dont l’ajustement s’opère soit par les prix, soit par les quantités, soit par les deux à la fois, comme c’est le cas aujourd’hui.

Mais cette reconnexion ne s’arrêtera pas aux matières premières, aux prix à la consommation et à l’immobilier. Elle concernera également les taux d’intérêt payés par les Etats occidentaux sur leur dette. Ainsi, à l’instar de ce qui s’est déjà observé en Grèce, en Espagne, en Irlande et en Italie, les taux d’intérêt des obligations d’Etat à dix ans vont continuer d’augmenter en 2009. Histoire de rappeler qu’un déficit budgétaire a un coût et qu’il faut bien finir par payer les dérapages et la mauvaise gestion des deniers publics telle qu’ils s’observent depuis trente ans en Europe, à l’exception peut-être de l’Allemagne.

Pour éviter le krach obligataire, il faudra donc que la BCE prenne modèle sur la Fed et abaisse ses taux directeurs au maximum. Peut-être pas à 0 % (ne soyons pas trop gourmands) mais au moins à 1,25 %.

Dans ce cadre, les placements monétaires seront de moins en moins bien rémunérés y compris dans la zone euro, ce qui permettra aux investisseurs de consacrer une nouvelle reconnexion. A savoir celle des cours boursiers vis-à-vis de la réalité économique. Car, si le plongeon boursier de 2008 peut apparaître justifié au regard de toutes les catastrophes que nous avons vécues l’an passé, la fonte de la capitalisation boursière d’une trop grande quantité d’entreprises cotées en deçà de leurs fonds propres devient irrationnel. Et ce d’autant que la planète financière déborde de cash.

Pour retrouver la voie de la rationalité, il suffit donc que les investisseurs retrouvent leurs esprits. Dans leur recherche du meilleur placement, ils feront alors le constat suivant : les cours immobiliers vont continuer de baisser en 2009, les prix des matières premières vont rester faibles, les cours obligataires vont baisser via la hausse des taux d’intérêt des obligations d’Etat à dix ans, les rendements monétaires vont se rapprocher d’epsilon.

En d’autres termes, le seul marché sur lequel on peut encore « rêver » et qui présente le meilleur couple « rendement-risque » pour 2009 est le marché actions. Pour celui qui a des liquidités et un horizon d’investissement d’au moins un an, la reconnexion de 2009 pourrait donc bien constituer une embellie inespérée.

 

Marc Touati