Le risque, un concept oublié

L’affaire Madoff et ses 50 milliards de dollars, la faillite de Lehman Brothers, à l’automne, les pertes liées aux CDO (« Collateral Debt Obligations ») sont les différentes facettes d’une même erreur : la non-prise en compte du risque, dans les décisions financières.

En effet, tout investissement (industriel ou financier) est caractérisé par 2 éléments : la rentabilité espérée et le risque encouru. Ce sont comme les 2 faces de la même médaille. En général, lorsque la rentabilité est forte, il en est de même du risque ; et réciproquement, une rentabilité faible (livret A) correspond à un risque très modéré, voire inexistant. Lorsque l’on promet à l’investisseur un rendement élevé, la première chose à faire est de se poser la question : quelle est la contrepartie, en terme de risque ?

En fait, le risque peut prendre plusieurs formes. Il peut s’agir d’abord d’un « risque  de marché ». C’est  le cas lorsqu’on souscrit à une action, une obligation ou des produits plus sophistiqués (produits dérivés). Quand on achète une action, on prend le risque que son cours puisse baisser ou que le dividende soit supprimé, pour diverses raisons : perte de parts de marché ou de clients, mauvaise structure financière, stratégie inappropriée, etc, se traduisant par une baisse de bénéfices réalisés, voire une perte.

Un autre type de risque est le « risque de liquidité ». L’impossibilité de revendre un titre ou une créance va entraîner une immobilisation des actifs non souhaitée, et, bien-sûr, dommageable. C’est ce qui s’est passé, dans un certain nombre d’opérations de titrisation(en particulier des crédits « subprimes »).

Autre forme de risque : « le risque de contre partie ». Ainsi de nombreuses banques ont été piégées, lors de la faillite de Lehman Brothers, dans la mesure où elles avaient prêté des fonds à cette banque d’affaires, incapable de les rembourser.

Il est clair qu’il est parfois difficile de quantifier ce risque, dans la mesure où il dépend de facteurs très variés, macroéconomiques (conjoncture mondiale), microéconomiques (situation des « clients ») ou sectoriels (le secteur automobile est actuellement en difficulté). La bonne pratique consiste à imaginer des scénarios pour le futur, sans oublier, ce qui est le plus difficile, les cas « extrêmes » et, ensuite, à prévoir des plans d’ajustement, en cas de matérialisation des risques.

Cependant, il ne faut pas négliger le phénomène de « panurgisme», qui tend à obscurcir les raisonnements avisés.

Lorsque l’ensemble des acteurs du marché se voilent la face, en refusant de reconnaitre les risques potentiels d’un instrument  financier nouveau ou d’une situation « inédite », il est tentant de « courir avec le troupeau ». D’autant plus que l’environnement récent, favorable à la surenchère de « paris dangereux », dans la recherche de résultats rapides et performants (exigés, par la cupidité généralisée), a poussé les opérateurs financiers à oublier la moindre prudence et à balayer d’un revers de la main les scénarios défavorables. Nier le risque n’a jamais abouti à le faire disparaitre !

 

 

                                                                               Bernard MAROIS

                                                                               Président Club Finance HEC