Banque Mondiale : Des obligations pour l’environnement.

La crise nous prépare une nouvelle mauvaise surprise, une nouvelle bulle prête à éclater. Celle-ci concerne les obligations souveraines, produits financiers par lesquels les Etats financent leur dette. Après avoir servi de refuge en 2008, grâce à leurs atouts en matière de sécurité de placement – sauf à avoir investi en obligations islandaises – et de rendement, les obligations d’Etat sont aujourd’hui mis au pilori et devraient connaître des jours difficiles.

C’est justement en pleine déroute de ce marché obligataire que la Banque Mondiale a choisi de se mettre, à son tour, aux obligations. Une grande première pour l’organisation multilatérale. La Banque Mondiale, tout comme les Etats, sont en quête de fonds pour mener leurs missions. Elle a donc fait appel aux investisseurs privés. En l’occurrence, c’est aux investisseurs scandinaves que la Banque Mondiale s’est adressée. Alors que l’Allemagne, pourtant solide signature, n’a pas réussi à boucler sa dernière émission obligataire il y a quelques jours, la Banque Mondiale a récupéré près de 264 millions d’euros auprès d’investisseurs institutionnels mais aussi de particuliers. Un bon bilan donc.

Il faut dire que cette émission avait de quoi séduire. Etaient proposées des obligations mieux rémunérées que ne le sont actuellement les obligations de l’Etat suédois. Certes, on est bien loin des rendements que peuvent servir des obligations d’entreprise, qui ont, elles aussi, le vent en poupe. C’est le risque que ce genre de produit rémunère. Un risque qui se calcule par rapport à la situation de l’émetteur de l’obligation (sa notation, son risque de faillite…) et à la durée de vie de l’obligation. En l’occurrence, avec une maison aussi reconnue que la Banque Mondiale, ces « obligations vertes », émises pour 6 ans, avaient décroché une très belle note de Aaa/AAA. De quoi faire bien des envieux.

Et de quoi séduire un public scandinave, peut-être plus sensibilisé que ses voisins à la protection de l’environnement, ordre de mission de ces obligations de la Banque Mondiale.

En dehors de cette cuisine financière, il faut surtout voir dans cette démarche deux messages forts. Le premier, rassurant : malgré la crise économique qui obnibule tous les esprits, l’environnement et le développement durable restent deux thèmes majeurs, pas seulement dans la bouche de Barack Obama. Les fonds récoltés par la Banque Mondiale doivent servir à cofinancer des projets « verts » comme des installations d’énergie renouvelable, le traitement des déchets, la lutte contre la déforestation. Bref, plein de bonnes intentions.

Le deuxième message est plus sceptique. S’il est heureux de voir que la communauté financière a su réagir à l’appel de la Banque Mondiale, il est, malgré tout, bien dommage de constater qu’une organisation comme la Banque Mondiale en est réduite à tendre la main pour mobiliser l’attention et des fonds. Toutefois, à l’heure actuelle, elle n’est pas la seule à faire la manche mais est une des rares à le faire avec légitimité, intelligence et humilité – les rois d’industrie pornographique américaine qui ont osé mendier quelques dollars à Washington feraient eux mieux de se rhabiller.

 

Alexandra Voinchet