Beaucoup d’observateurs des marchés s’interrogent sur la pertinence de la baisse considérable de
Une première explication réside dans l’anticipation d’une baisse des profits des entreprises, qui entrainerait mécaniquement une baisse des cours (de façon à conserver un rendement constant). Mais cet argument ne convainc pas complètement. En effet, il apparait peu plausible que les bénéfices des sociétés cotées subissent une baisse de 50% dans les années prochaines, alors que la récession devrait se limiter à environ -2% dans les pays développés, le monde restant globalement en territoire positif. Par comparaison, la crise de 1929, avait débouché sur une « dépression » de -25%, en 5 ans. Nous sommes très loin de ces chiffres.
La seconde explication, plus convaincante, concerne l’incertitude de l’avenir et plus particulièrement, la matérialisation d’évènements négatifs imprévisibles. Deux exemples frappants : la faillite de Lehman Brothers, tout d’abord, qui n’était pas attendue (« too big to fail ») et qui s’est répercutée sur tout le système bancaire ; deuxièmement l’affaire Madoff, du nom de l’escroc, ancien président du NASDAQ(!) responsable de la perte de 50 milliards investis dans son « hedge fund » et dont les conséquences finales ne peuvent malheureusement pas encore être identifiées totalement. Il est clair que les investisseurs redoutent d’autres « bombes à retardement », qui, compte tenu de l’interdépendance accrue des marchés, peuvent exploser avec des effets déflagrateurs désastreux. Là encore, l’incertitude sur l’ampleur de ces « cadavres dans le placard » peut expliquer la forte chûte des cours.
Mais au-delà de ces phénomènes conjoncturels, une autre angoisse, latente, légitime la crainte des investisseurs. Le soutien à l’économie « réelle » va nécessiter le concours de financements colossaux (déjà plus de 2000 milliards de dollars, au niveau mondial) ; à cela s’ajoute l’éventuelle consolidation des marchés de produits dérivés (CDOs et « Credit Defaut Swaps »), qui représentent, de part leurs montants (plusieurs trillions de dollars), une véritable « épée de Damoclès ».
En outre, l’économie américaine est sérieusement touchée (cf. l’immobilier ou le secteur automobile). Les autorités publiques vont s’engager et contracter des emprunts, pour sauver des emplois et éviter une explosion du chômage aux Etats-Unis. Ces emprunts ne pourront être souscrits que sur les marchés internationaux. Jusqu’à présent, c’est l’épargne chinoise ou les pétro-dollars du Moyen-Orient qui servaient de contre partie. Or le cours du pétrole a énormément baissé et les autorités chinoises doivent consacrer les ressources locales à soutenir l’économie nationale. Qui donc va prêter aux Etats-Unis ?
Reste la solution interne : imprimer des dollars, avec ses deux corollaires : l’inflation et la baisse du dollar, qui peuvent à leur tour se transformer en cauchemars.
On comprend que tant que cette hypothèse ne sera pas levée, les cours ne pourront pas remonter durablement.
Bernard MAROIS
Président
Club Finance HEC