La France en faillite ?

C’est le thème d’une émission de télé récente qui décrit les conséquences de la faillite de notre pays, intervenue le 06 juillet 2017 : émeutes et troubles sociaux, la France placée sous tutelle du FMI et de la Commission Européenne. A cette date future, la dette dépasse 200% de la richesse nationale, selon ce télé-documentaire. Ce scénario est-il plausible ?

Aujourd’hui, la dette totale de la France s’élève à 1270 milliards d’euros, soit 67% du PIB national et les charges financières, environ 45 milliards d’euros, représentent le deuxième poste de dépenses de l’Etat, après l’Education, mais avant la Défense. Bien que ce ratio soit supérieur au seuil de 60% retenu comme limite par le traité de Maastricht, il n’apparait pas énorme, si on le compare à l’Italie, à la Belgique (plus de 100%) ou même au Japon (170%).

Ce qui est le plus inquiétant, c’est sa progression : 16% en 1974, 32% en 1991, 58% en 1997. Avec un déficit budgétaire structurellement déficitaire depuis plus de 30 ans, cette croissance de la dette est inévitable : on prévoit d’ailleurs un déficit de 56 milliards en 2009, sans compter la contribution de l’Etat aux banques ou au soutien de l’économie. A ce rythme, on peut anticiper un ratio de la dette compris entre 80% et 90%, en 2017. On est donc loin des 200% évoqués dans l’émission télévisée, dont l’objectif est plutôt de susciter l’attention et l’inquiétude des téléspectateurs que de fournir une prévision objective. En outre, certains économistes considèrent qu’il faut raisonner en endettement « net » et prendre aussi en compte les actifs de l’Etat, susceptibles d’être vendus pour rembourser la dette. Dans ce cas, l’endettement net ne dépasse pas 35% de la richesse nationale, ce qui est raisonnable.

Sauf que les actifs de l’Etat ne sont pas tous facilement fongibles (il faut trouver des acheteurs) ; certains d’entre eux (Château de Versailles, Louvre, etc.) sont considérés, à juste titre, comme « des bijoux de famille » et ne pourraient être cédés sans que l’image de notre pays soit durablement dévalorisée.

En conséquence, il faut retenir plutôt l’endettement brut et surtout sa progression ; la plupart de nos concurrents industriels ont vu leur ratio d’endettement diminuer ces dernières années, contrairement à nous. Notons aussi un signal révélateur : la prime de risque de la France, par rapport à l’Allemagne, mesurée par le rendement des emprunts d’Etat est passée de 10 points de base, il y a un an à 20 points, il y a cinq mois et à 45 points (soit plus 0.4% du nominal) aujourd’hui, ce qui correspond à une notation de A+ ou AA-, au lieu du traditionnel AAA, dont nous bénéficions dans le passé.

Cela indique que les investisseurs internationaux commencent à regarder la signature de la France avec plus de vigilance. Quelle conclusion doit-on tirer ?

Certes, il faut accepter de s’endetter plus, pour survivre à la crise. Mais  nous proposons qu’une loi soit passée dès aujourd’hui qui oblige l’Etat à diminuer son déficit budgétaire, dès que la croissance reviendra. Et nous suggérons des chiffres précis : -0,5% pour une croissance annuelle comprise entre 1,5% et 2% ; -1% pour une croissance comprise entre 2% et 2,5% ; -1,5%, si la croissance dépasse 2,5%. Ces efforts doivent être entrepris réellement (donc sans utiliser des artifices comptables) et vérifiés par la Cour des Comptes, sous l’œil du Parlement.

C’est à ce prix que l’on évitera la réalisation du scénario catastrophe esquissé par Nicolas Beytout, lors de son émission télévisée.

 

 

 

                                                                                              Professeur Beranrd MAROIS

                                                                                              Président du Club Finance HEC