La pieuvre chinoise étend ses tentacules. Son dynamique commerce extérieur a conquis tous les grands pays occidentaux. Pour alimenter une telle puissance commerciale, la Chine a transformé une bonne partie de l’Asie voisine en son sous-traitant privilégié. Elle s’est installée en Afrique, désireuse de se saisir des richesses du continent noir. Même l’Amérique Latine l’intéresse. D’ailleurs, la Chine, le Mexique, le Pérou et le Chili sont tous membres de l’organisation de Coopération économique Asie-Pacifique (APEC).
Peu connus, les rapports entre le continent latino et la Chine témoignent pourtant des intérêts mutuels qu’y trouvent les deux rives du Pacifique. Et ces intérêts vont croissants.
Quelques exemples suffisent pour s’en rendre compte. En 2006, 12 % des exportations chiliennes sont parties en direction de la Chine, selon l’OCDE. Cette même année, Pékin a renforcé ses liens avec Santiago via un accord commercial, le premier du genre pour un pays latino.
Brésil et Chine sont les têtes de pont des économies émergentes. Et partagent des liens commerciaux forts : la Chine est devenue l’un des principaux marchés d’exportation pour le Brésil. Ce dernier compte bien tripler ses exportations vers la Chine d’ici à 2010, en échange de précieux investissements chinois sur son territoire – une sempiternelle promesse de Pékin. « Le volume commercial entre la Chine et le Brésil s’est élevé à 29,7 milliards de dollars américains en 2007, soit une augmentation de 46,4 % par rapport à l’année dernière, selon les dernières statistiques du ministère chinois du Commerce », rapportait récemment l’agence de presse chinoise, Xinhua. Pour autant, le Brésil n’est que le quatorzième fournisseur de la Chine, tous produits confondus.
L’Argentine commerce aussi avec la Chine où elle envoie principalement du soja et ses dérivés.
Chacun y trouve donc son compte. La Chine s’approvisionne à bon compte en matières premières indispensables (soja, cuivre… ) à son expansion. Les pays latino diversifient leurs partenaires commerciaux, réduisant ainsi leur dépendance aux Etats-Unis. Et diversifient leurs importations : en 2006, la Chine est devenue le premier fournisseur de produits manufacturés d’Amérique Latine.
Cependant, cette manne commerciale chinoise ne dope que les exportations et la balance commerciale. Parfois même, elle leur nuit, comme c’est le cas pour le Mexique, par nature plus proche des Etats-Unis. A l’inverse du Brésil, du Chili, du Pérou, du Cuba – pour des raisons historiques et idéologiques – ou encore de l’Argentine, les Etats d’Amérique centrale, la Bolivie ou l’Uruguay – pourtant membres notoires du Mercosur -en sont relativement exclus.
Le Brésil de Lula n’a pas attendu la Chine pour se prendre en main et créer sur son territoire les relais de sa croissance de demain. Son interventionnisme est vertueux. Or, tous ses voisins n’en sont pas là. Il serait dommage qu’ils se reposent sur leurs lauriers, forts de quelques rentrées de yuans. Ce n’est qu’à coup de réformes bien pensées que le continent latino pourra tirer le meilleur parti de sa collaboration avec le géant chinois.
Le Pérou a dressé le tapis rouge à la Chine, pour le sommet de l’APEC qui se tient actuellement à Lima sous la présidence péruvienne. Son argument : le maintien d’une croissance économique chinoise stable est indispensable à la bonne santé de l’Amérique Latine. Pour le moment, cette dernière ne s’en sort pas si mal, avec une croissance qui oscille entre 4 et 5 % pour le continent. Le Pérou a même enregistré une croissance de quasi 10 % sur un an en septembre.
Dans l’ancien pré carré des Etats-Unis, aujourd’hui traversé par un fort courant anti-américaniste, la présence chinoise est vue d’un œil bienveillant.