“Les Visiteurs en Corse” (avec Christian Clavier et Nicolas Sarkozy)

En investissant la propriété de Christian Clavier, les indépendantistes corses ont réalisé un coup d’éclat très symbolique, puisqu’ils s’en sont pris à l’acteur de l’Enquête Corse, ami du premier cercle de N Sarkozy. Ce fut donc au tour de la star des Visiteurs d’être visité… Mais dans ce mauvais film visant indirectement le Président, la réplique fut aussi cinglante qu’immédiate. En effet, dans les 24 heures qui ont suivi, Dominique Rossi (responsable de la sécurité) qui avait été préalablement informé de la menace, a été limogé. Le caractère expéditif et radical de la sanction associé au fait que le Président soit un ami de la « victime », alimente bien sûr la polémique.

Cette affaire est un véritable condensé de la personnalité et de du mode d’exercice du pouvoir de Nicolas Sarkozy. En effet, il se montre une fois de plus excessif, intransigeant, recherchant les rapports de force. Il s’agit également, comme l’affirme très justement Olivier Duhamel, de «l’illustration extrême du dérèglement du fonctionnement du pouvoir, lorsque le Président de la République se permet de décider de tout, même du dérisoire ».

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que N Sarkozy, qui ne vient pas du sérail (il n’a pas fait l’ENA), a souvent eu un rapport d’attraction répulsion avec la haute administration. On se rappelle de ses limogeages – nombreux et souvent expéditifs – lorsqu’il était Ministre de l’Intérieur. De même, ses sentiments envers la Corse, dont est d’ailleurs issue sa première épouse, sont plutôt complexes. Pour N Sarkozy, la Corse est la terre de toutes les difficultés : de l’assassinat du Préfet Erignac à l’arrestation d’Ivan Colonna, en passant par l’échec du référendum de 2003.

Le résultat de ce cocktail détonnant est une réaction totalement disproportionnée et inique vis à vis d’un homme dont les états de service étaient jusqu’ici irréprochables et qui brillait par son efficacité. Dominique Rossi, en voulant éviter des débordements, a eu tort d’avoir raison de ne pas empêcher l’intrusion des nationalistes dans le jardin de Christian Clavier. Calcul payant par les faits (pas d’affrontement avec les forces de l’ordre, résolution du problème dans le calme) mais fatal à sa carrière.

Malheureusement, la caractère impulsif du Président se retourne contre lui. En effet, il offre un cadeau inespéré à l’opposition, notamment à François Bayrou qui a toujours dénoncé son népotisme, mais aussi aux Nationalistes, qui se retrouvent de nouveau sous les feux de la rampe. Enfin, après l’épisode du scooter de son fils Jean, les Français apprécieront une fois de plus ce fait du prince. Il semble que notre fougueux Président, en jouant sur l’échiquier corse, ait commis une erreur politique en déplaçant une de ses pièces majeures.

 

 

La phrase de la semaine :

«On connaissait autrefois en France le crime de lèse majesté. On vient d’inventer mieux : le crime de lèse-copain de la majesté. » de François Bayrou

 

rôme Boué