Jackpot pour Bernard Tapie

Depuis le 7 juillet, date à laquelle le tribunal arbitral a accordé à Bernard Tapie 285 millions d’Euros dans le litige qui l’opposait au Crédit Lyonnais sur la revente d’Adidas, la polémique fait rage…

Tout d’abord, le choix d’un tribunal arbitral (composé de 3 juges) fait grincer des dents ceux qui pensent que la justice privée ne doit pas se substituer à la voie judiciaire classique, même si cette dernière s’est révélée incapable de solutionner le litige. De surcroît, cet arbitrage aurait été favorisé par les administrateurs représentants de l’Etat, et ce, au bénéfice de Mr Tapie.

On a donc assisté à la montée au créneau de François Bayrou qui s’insurge contre la dilapidation des deniers publics, du Parti Socialiste qui propose une commission d’enquête parlementaire, d’Eva Joly et de Jean Peyrelevade (ancien Président du Crédit Lyonnais et vice président du MODEM…). Tous dénoncent l’illégitimité du tribunal arbitral. Le dossier prend donc une tournure politique, on parle même d’affaire d’Etat. Bigre !!

Face à cette agitation collective, une mise en perspective s’impose. Dans un premier temps, s’il est vraisemblable, comme l’affirme « le Canard enchaîné », que l’Etat ait appuyé la mise en place d’une procédure arbitrale, rien ne permet de mettre en cause l’impartialité des 3 arbitres qui sont des personnalités reconnues et respectées: Jean Denis Bredin, avocat, Pierre Mazaud, ancien président du conseil constitutionnel et Pierre Estoup, haut magistrat.

Ensuite il ne faut pas maximiser le rôle de Nicolas Sarkozy dans cette affaire. Pour certains, le soutien de Bernard Tapie au candidat Sarkozy le 5 avril 2007 aurait été accordé contre une promesse de résolution de la situation financière de l’homme d’affaire. Mais il faut relativiser le poids politique de Bernard Tapie qui, pour les raisons que tout le monde connaît, n’était pas un soutien de premier ordre . L’intéressé affirma d’ailleurs avec lucidité « ce serait me faire trop d’honneur ».

Enfin il serait un peu simpliste de penser qu’un Président de la République peut tirer les ficelles d’une affaire qui relève de la justice. Il est néanmoins certain que Nicolas Sarkozy a usé de son influence pour soutenir Bernard Tapie. Il a en effet beaucoup de points communs avec l’homme d’affaire. Ainsi, l’un et l’autre ne viennent pas du sérail et maîtrisent parfaitement les médias .Ce sont peut être les 2 seules personnes à avoir tenu Jean Marie le Pen en échec lors d’un débat télévisé, ce qui n’est pas peu dire lorsque l’on connaît la personnalité et la redoutable habilité verbale du Président du FN.

Ils ont à des périodes différentes incarné un modèle de réussite et ont tous les deux effectué une longue traversée du désert. Tous les deux sont passionnés de football et aiment le luxe et le clinquant (Rolex Daytona au poignet, goût pour les yachts de luxe etc). Ils suscitent tous les deux des sentiments extrêmes auprès des Français et maîtrisent l’art de la comédie, du spectacle et de la provocation. Néanmoins, si tous ces parallèles accréditent la thèse de la complicité entre les deux hommes, il faut savoir faire la part des choses entre la réalité et le fantasme…

 

 

La phrase de la semaine :

 

 «Si la vente d’Adidas n’est pas une affaire commerciale, alors je me demande bien ce qu’elle est » de Olivier Pardo, l’un des avocats de Bernard Tapie répondant aux attaques de François Bayrou et du PS estimant que le tribunal arbitral ne rend pas des décisions de justice puisque c’est une procédure privée, surtout utilisée dans les litiges commerciaux . 

 

rôme Boué