Le duel entre Ségolène Royal et Bertrand Delanoë pour le poste de premier secrétaire du Parti Socialiste a commencé. Anticipant la sortie du livre de son rival le 22 mai, c’est Ségolène Royal qui a «dégainé» la première en annonçant sa candidature vendredi 16 mai. Actuellement distancée de près de 10 points par Bertrand Delanoë (sondage IPSOS auprès des sympathisants socialistes), elle n’aura pas la tâche facile, d’autant que les traces laissées par sa défaite en 2007 ajouteront un degré de complexité supplémentaire à son entreprise.
Le maire de Paris quant à lui ne s’est pas officiellement déclaré mais il expose dans son livre entretien « de l’audace » sa vision politique, faisant de fait acte de candidature. La rupture avec ses prédécesseurs et notamment Lionel Jospin est manifeste. Ainsi, Bertrand Delanoë est persuadé que « seule l’économie de marché crée des richesses nécessaires au progrès social » et il se définit comme « libéral et socialiste ». Le maire de Paris « droitise » donc le parti qu’il souhaite moderne et décomplexé notamment dans son rapport à l’argent (thème sensible – s’il en est – au Parti Socialiste). On est bien loin de François Mitterrand qui expliquait en 1971 (congrès d’Epinay) qu’être socialiste passait par la nécessaire rupture avec le capitalisme. Il est vrai que depuis la chute du mur de Berlin, la donne a considérablement changé, et la frontière idéologique gauche droite est devenue beaucoup plus ténue.
Néanmoins le qualificatif « Libéral » a fait bondir Ségolène Royal qui a saisi une occasion de marquer sa différence avec le maire de Paris. Elle affirme en effet qu’«au 21e siècle, être libéral et socialiste, c’est totalement incompatible ». Ségolène Royal tire donc les leçons de 2007 et brosse le parti dans le sens du poil. Face à elle, Bertrand Delanoë a bien compris que ce qui avait manqué au PS aux dernières élections présidentielles, c’est un « Nicolas Sarkozy de gauche ». Abstraction faite de son tempérament, certains socialistes ont reconnu le professionnalisme hors pair du candidat de droite et la formidable machine politique qui l’accompagnait. Le maire de Paris endosse donc les habits de super manager moderne et libéral. Le clivage entre les deux protagonistes se jouera donc dans la conception même du parti qui doit être rénové à travers la question : « Qu’est ce qu’être socialiste aujourd’hui ? »
Il est toutefois regrettable d’assister à une guerre d’ego et d’ambitions alors que le débat sur le fond n’aura lieu qu’en novembre 2008 lors du congrès de Reims. Le combat pour le poste de premier secrétaire du Parti Socialiste se transforme donc en une compétition pour l’investiture de 2012. Sans minimiser l’importance du choix du leader et de la rénovation du parti socialiste, il ne faut pas occulter le débat d’idées. Il est indispensable pour le PS d’émettre des propositions concrètes face aux problèmes des Français en faisant de vrais choix politiques et de société.
La phrase de la semaine :
« Il n’y a pas de guerre des chefs et il n’y en aura pas » Ségolène Royal
Jérôme Boué