Le G7 ne sert décidemment plus à grand chose.

Lors du sommet économique et financier du G7 dernier, une surprise de taille s’est produite : pour l’une des rares fois depuis le début des années 90, les dirigeants économiques et monétaires des soi-disant sept pays les plus riches de la planète ont osé l’impensable : rédiger un communiqué officiel faisant état de leur inquiétude quant à l’évolution excessive des devises internationales…

Dans un premier temps, les marchés des changes ont réagi positivement en stoppant la nouvelle tendance baissière de l’euro/dollar. En deux jours, ce dernier est ainsi passé de 1,59 dollar pour un euro à 1,57.

Malheureusement, cette accalmie n’a été que de courte durée. En effet, les membres du G7 ont beau essayer de sauver les apparences, leur impuissance est criante. Et pour cause : tant que la BCE ne baissera pas ses taux, les marchés auront des raisons objectives de spéculer à la hausse sur l’euro, et ce tant contre le dollar mais aussi dernièrement contre la livre sterling.

Cette situation ne fait d’ailleurs que refléter la triste réalité entre une Réserve fédérale et une Banque d’Angleterre qui réagissent et essaient d’éviter le pire et une BCE qui refuse toujours de voir le ralentissement de la zone euro, ignore les risques qui pèsent sur les banques eurolandaises et, par là même, sur la stabilité financière et l’activité économique.

Or, si le G7 appelle avec détermination à une plus grande transparence des banques commerciales, il ne demande rien à la BCE qui, rappelons-le, est la seule banque centrale du monde développé à ne pas publier le contenu des réunions des politiques monétaires, et encore moins l’état des votes. Selon les dirigeants de la BCE, la raison de cette absence est simple : on ne vote pas lors de ces réunions, mais, après discussion, un consensus unanime éclot… A l’évidence, en matière de transparence, il y a du chemin à parcourir.

Dès lors, si le G7 n’a aucun moyen de pression sur la BCE et ne prend même pas la peine de lui demander quoi que ce soit, on voit mal quel pourrait être ses moyens pour infléchir la position de la Chine en matière de change.

La Chine est d’ailleurs très claire sur ce point : elle veut que sa devise s’apprécie mais à son rythme et selon sa volonté. Elle ne veut évidemment pas rééditer l’erreur du Japon lors des accords du Louvre et du Plazza, qui avait alors signé son arrêt de fin de croissance forte en appréciant le yen de 260 à 122 yens pour un dollar en moins de trois ans, pour ensuite atteindre 80 yens pour un dollar en 1995. Devant affronter dans le même temps le dégonflement d’une bulle immobilière, bancaire et boursière, l’éclatement d’une crise sociétale ainsi qu’un déclin démographique, le Japon ne s’en est pas remis et ne s’en remettra pas avant bien longtemps.

Plus globalement et au-delà du fait que la Chine ne souhaite pas faire la même erreur et surtout obéir docilement au G7, ce dernier est affecté par une profonde perte de crédibilité. En effet, comment ce dernier peut-il disposer d’un véritable pouvoir s’il ne représente plus les sept véritables premières puissances économiques actuelles. Ainsi, quatrième mondiale dans le classement du PIB en dollars bruts (mais deuxième si on calcule ce PIB en parité de pouvoir d’achat), la Chine est pour l’instant exclue du G7.

Pis, à l’horizon 2015, c’est-à-dire après-demain, le G7 aura une composition très différente de celle d’aujourd’hui. Actuellement, celui-ci est effectivement composé des sept pays suivants, par ordre décroissant de puissance économique (mesuré par le niveau du PIB en dollars bruts) : Etats-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada.

En 2015, en prenant des hypothèses de croissance optimistes pour les pays développés et pessimistes pour les pays émergents (ce qui, convenons-en, va en l’encontre de la situation actuelle), ce G7 devrait être le suivant : Etats-Unis, Chine, Japon, Inde, Allemagne, Russie, Brésil.

La France n’arrivera d’ailleurs qu’en neuvième ou dixième position. Peu importe, dirons certains, nous créerons alors un G10…

En attendant, il est malheureusement clair qu’à l’instar du FMI, le G7 ne représente plus grand chose et n’a surtout plus beaucoup de moyens d’action. Il n’est finalement que l’un des derniers avatars d’anciennes puissances, désormais en déclin, qui n’arrivent même pas à se mettre d’accord pour éviter de sombrer dans la récession, au grand dam des marchés et dans un contexte où les pays émergents continuent sur leur lancée.

Seul inconvénient pour ces derniers, la faiblesse excessive du dollar accroît la spéculation haussière sur les marchés des matières premières et accroît ainsi les risques de disette dans certaines régions du monde émergent, affaiblissant par là même la croissance et la stabilité politique de ces pays, qui auront dès lors plus de difficultés pour rattraper leur retard sur les actuels pays du G7. Du moins c’est peut-être ce que ces derniers s’imaginent…

Marc Touati