A l’issue du deuxième tour des élections municipales et cantonales, la gauche remporte une très nette victoire sur la droite. Ainsi, le rapport de force gauche droite s’établit à 49.5% pour le PS et ses alliés contre 47.5% à l’UMP et ses alliés (CSA DEXIA). La gauche a ravi à la droite 38 villes de plus de 30 000 habitants et 22 villes de plus de 50 000 habitants, elle détient désormais 183 villes contre 124 pour la droite. A l’exception de Jean François Copé qui évoqua « un soir de défaite », cette victoire de la gauche a été bien difficile à admettre pour les différents intervenants de droite sur les plateaux de télévision. Ainsi François Fillon s’est abrité derrière la très faible participation (environ 65%, soit la plus faible depuis 1959) pour minimiser l’impact des résultats, oubliant que ce phénomène révèle également l’incapacité de l’UMP a mobiliser ses électeurs, notamment dans les communes les plus bataillées. Le chef du gouvernement a également utilisé comme paratonnerre l’aspect local de ces élections qu’il ne fallait surtout pas transformer en enjeu national. Cette interprétation (enjeu local ou national) a d’ailleurs été au centre de la plupart des joutes verbales qui ont eu lieu entre les intervenants de droite et de gauche. Les uns s’attachant à exacerber l’aspect national du scrutin, mettant ainsi en avant le vote sanction contre la politique de Nicolas Sarkozy, et les autres, souvent à court d’arguments, se battant bec et ongles pour défendre le Président et sa politique qui, selon eux, ne sont pas concernés par le vote des Français … La vérité se situe bien sûr à mi chemin des analyses trop peu nuancées d’hommes politiques qui jouent leur rôle ou récitent les consignes venues d’en haut. Ainsi, si les enquêtes d’opinion ont montré que les enjeux locaux étaient bien à l’origine des votes, l’avertissement lancé par les Français au Président de la République est indéniable. En réalité, les résultats de ce second tour amènent davantage de questions que de réponses ! A droite tout d’abord, on peut se demander quelle sera la réaction de Nicolas Sarkozy face aux résultats de ce scrutin. Ainsi, si le Président ne peut rester sourd au message des Français, ses marges de manœuvre sont très faibles puisqu’il pourra difficilement revenir sur les grandes orientations de sa politique et de ses réformes, sans risquer de se déjuger. Il y a fort à parier que Nicolas Sarkozy optera pour le changement dans la continuité ! Il procédera certainement à quelques ajustements au niveau de l’équipe gouvernementale en jouant une fois de plus sur quelques symboles forts. Il est d’ailleurs certain qu’il tirera les conséquences de l’échec électoral de sa politique d’ouverture. Enfin, il y aura vraisemblablement des changements sur la forme, à savoir le mode de communication et d’exercice du pouvoir, puisque c’est sur ce registre que le Président a le plus de marge de manœuvre, et de progrès… A gauche ensuite, il s’agit de savoir si l’essai marqué au niveau local se transformera au niveau national en 2012. Rien n’est moins sûr car les résultats du 16 mars ne ressemblent pas véritablement à un vote d’adhésion mais plutôt à un rejet des Français de la personnalité et de la politique du Président. Championne des élections intermédiaires (régionales, municipales …), la gauche devra se réformer en profondeur en proposant un vrai projet de société pour gagner des élections nationales. Enfin, elle devra se doter d’un vrai leader capable de transcender ses divisions internes. Enfin, les résultats du Modem laissent planer de nombreuses interrogations sur la capacité de ce parti à s’imposer dans le paysage politique, et sur l’avenir de François Bayrou (battu à Pau) dans sa course à la présidence. Au delà de toutes ces interrogations, une certitude : la douche est très froide pour l’UMP, notamment délaissée par les classes populaires (ouvriers, employés et chômeurs) qui ont majoritairement voté à gauche ou se sont abstenus. Nicolas Sarkozy devra prendre la pleine mesure de l’avertissement lancé par les Français et faire usage de ses 5 sens. Tout d’abord il devra toucher du doigt les problèmes, ensuite il devra être davantage à l’écoute du pays tout en faisant preuve d’une bonne vision politique, en espérant qu’il aura du nez car dans le cas contraire son quinquennat aura un goût amer … La phrase de la semaine: « Il est mal venu de tirer des leçons nationales » de ce second tour, et il ne faut pas « instrumentaliser le vote des Français” François Fillon
Jérôme Boué