Soyez honnêtes : il est actuellement impossible de chiffrer avec précision l’ampleur de la récession mondiale qui se profile devant nous.
Et pour cause : un arrêt complet et durable de l’économie internationale n’a jamais été observé depuis la seconde guerre mondiale.
A titre de comparaison, lors de la dernière récession de 2008-2009, le PIB a baissé de 4 % aux Etats-Unis, de 3 % en France et de 0,1 % à l’échelle de la planète. Il faut dire qu’à l’époque, de nombreux pays émergents, Chine en tête, ont continué de croître fortement, compensant la récession des pays développés.
Pour retrouver une situation encore plus difficile, il faut remonter aux années 1945-47. Car, aussi bizarre que cela puisse paraître, les années 1941-43 ont été marquées par une croissance forte, notamment aux Etats-Unis compte tenu du fameux « effort de guerre ». Ce dernier a consacré une progression du PIB américain de 76 % entre 1941 et 1944. En revanche, de 1945 à 1947, le PIB américain a reculé de 13,5 %, avant de repartir en forte hausse avec le plan Marshall et le début des « Trente Glorieuses ».
En fait et sans surprise, la plus forte chute du PIB américain a été observée lors du fameux krach de 1929. De 1930 à 1933, celui-ci a effectivement chuté de 26,3 %.
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A la suite du krach de 1929, le PIB américain a plongé de 26,3 %.
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Sources : BEA, ACDEFI
Même si comparaison n’est pas raison, ces évolutions nous donnent néanmoins une idée de ce qui peut nous arriver en 2020.
D’ores et déjà, les seules statistiques disponibles depuis le début de la pandémie nous donnent également une image de l’ampleur des dégâts.
Ainsi, en Chine, en février, le glissement annuel de la production industrielle s’est effondré à – 13,5 %. Quant à celui des ventes au détail, il a atteint un niveau abyssal de – 20,5 %. Dans les deux cas, des niveaux historiquement bas.
Chine : les glissements annuels de la production industrielle et des ventes au détail s’effondrent.
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Sources : NBSC, ACDEFI
Ces effondrements indiquent que la baisse du PIB chinois au premier trimestre 2020 devrait être massive. Dans le meilleur des cas, elle devrait atteindre 4 %.
L’écroulement de la production industrielle chinoise laisse anticiper une récession massive.
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Sources : NBSC, ACDEFI
Dès lors, même si un rebond très progressif s’opère, la variation annuelle du PIB chinois sur l’ensemble de l’année devrait atteindre au mieux 0,9 %. Là aussi du jamais vu dans l’histoire contemporaine chinoise.
De quoi grever fortement la variation annuelle du PIB mondial. Et ce d’autant que la chute du PIB devrait être conséquente dans l’ensemble des pays et zones de la planète. A commencer par les Etats-Unis et surtout par la zone euro.
En attendant les enquêtes des directeurs d’achat de mars dont les premières estimations seront publiées le 24 mars, les indices ZEW en Allemagne et dans la zone euro ont déjà annoncé la couleur.
Zone euro : l’indice ZEW s’effondre et laisse augurer un plongeon massif du PIB.
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Sources : Eurostat, ZEW, ACDEFI
Avec des niveaux de – 49,5 en mars tant en Allemagne que dans la zone euro, la baisse du PIB s’annonce dramatique.
L’Allemagne rechute aussi massivement.
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Sources : Destatis, ZEW, ACDEFI
Dans ces conditions, nous sommes évidemment contraints de réviser en forte baisse nos prévisions de « croissance » pour 2020.
En espérant que la quarantaine de nos économies prendra fin d’ici la fin avril et qu’un traitement sera rapidement trouvé pour éviter le développement de la pandémie, nous anticipons que, sur l’ensemble de l’année 2020, le PIB reculera de 1 % aux Etats-Unis, 3,1 % en Allemagne et en France, 3,9 % au Japon et 4 % dans la zone euro.
Compte tenu des contre-performances en Chine et dans l’ensemble des pays émergents, le PIB planétaire devrait reculer de 1,3 %, ce qui constituera son plus mauvais résultat depuis la seconde guerre mondiale.
Révision de nos prévisions de croissance mondiale pour 2020 :
Vers une baisse du PIB mondial de 1,3 %, du jamais vu depuis la seconde guerre mondiale.
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Sources : FMI, Prévisions ACDEFI
Evidemment, ces prévisions doivent être prises avec des pincettes et seront forcément révisées en fonction de l’évolution de la pandémie et surtout des réactions économiques, financières et sociétales à travers le monde. Car, encore plus grave que le Coronavirus, la planète apparaît menacée par une instabilité financière et sociétale majeure.
Mais, encore une fois, une chose est sûre : comme toujours et même si cela prendra du temps, nous sortirons de la crise par le haut…
Marc Touati