Rien de mieux que quelques graphiques explicites pour illustrer cette année 2019 de grand écart entre une croissance mondiale qui diminue nettement et des marchés financiers qui flambent.
Parmi les plus fortes dégringolades économiques de l’année, celle de l’Argentine commence à faire froid dans le dos. Et pour cause : entre le premier trimestre 2018 et le second de 2019, le PIB argentin a chuté de 7,1 %.
Dans le même temps, l’inflation du pays du Tango est passée de 25 % à 52 %, avec une pointe à 57 % en mai 2019. Encore plus inquiétant, en un an, le peso s’est effondré de 70 %. Depuis août dernier, il oscille autour des 60 pesos pour un dollar, contre 35 dollars en novembre 2018, 15 dollars début 2017, 4 en 2001 et bien sûr 1 peso pour 1 dollar fin 2001.
Avec le nouveau défaut de paiement annoncé le 22 décembre par le nouveau président argentin Alberto Fernandez (le septième depuis 1951 !), le pire est malheureusement à craindre pour 2020.
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L’Argentine replonge dans la récession, le défaut de paiement et la crise…
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Sources : OCDE, ACDEFI
Si le voisin brésilien n’en est heureusement pas encore là, force est de constater que sa croissance reste molle (1 % en moyenne sur l’année 2019) et son taux de chômage élevé (autour des 12 %).
De plus, l’instabilité politique et sociétale demeure forte, faisant peser un risque majeur sur l’avenir de la croissance du pays.
Conséquence logique des ces évolutions, le real reste sur des plus bas historiques, oscillant entre 4 et 4,25 pour un dollar.
La croissance brésilienne reste fragile et le real tombe à des plus bas historiques.
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Sources : IBGE, ACDEFI
Deuxième locomotive de la croissance mondiale (derrière la Chine), l’Inde connaît également un fort ralentissement. Le glissement annuel de son PIB est ainsi passé de 7,9 % au deuxième trimestre 2018 à 5,8 % au premier de 2019 pour encore tomber à 4,7 % au troisième trimestre.
La croissance indienne chute dangereusement.
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Sources : Mospi, ACDEFI
Face à cette nette décélération, la roupie indienne est restée faible, se stabilisant autour des 72 pour un dollar. Même si les plus bas de la fin 2018 (à quasiment 75 roupies pour un dollar) n’ont pas été atteints, cette dépréciation prolongée confirme que l’économie indienne est en souffrance, affectant par là même l’ensemble de la croissance mondiale.
En fait, parmi les pays « émergents », seule la Chine a réussi à tirer son épingle du jeu, en ne ralentissant que modérément. Le glissement annuel de son PIB est effectivement passé de 6,4 % au quatrième trimestre 2018 à 6 % au troisième de 2019. Si les 7 % qui prévalaient encore en 2015 sont loin, la croissance chinoise semble en mesure de se stabiliser durablement autour des 6 %.
C’est du moins ce qu’a confirmé l’évolution récente des indices Caixin des directeurs d’achat chinois tant dans l’industrie que dans les services.
La Chine plie mais ne rompt toujours pas.
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Sources : NBSC, Caixin, ACDEFI
A l’instar de leurs concurrents chinois, les Etats-Unis sont également parvenus à limiter les dégâts en 2019. En effet, en dépit d’un inévitable ralentissement, leur croissance avoisine les 2,3 % sur l’ensemble de l’année.
Croissance appréciable et plein-emploi restent d’actualité aux Etats-Unis.
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Sources : BEA, BLS, ACDEFI
Quant au taux de chômage américain, il a continué de reculer, atteignant 3,5 %, un plus bas depuis décembre 1969.
Bien loin de ces performances, l’économie de la zone euro est restée abonnée à la croissance molle. Le glissement annuel de son PIB est ainsi passé de 2,6 % au premier trimestre 2018 à 1,3 % un an plus tard, puis 1,2 % au troisième trimestre 2019. Déjà habituée à être nettement derrière les Etats-Unis, la zone euro a donc réussi « l’exploit » de passer derrière le Japon…
La Zone euro, lanterne rouge de la croissance mondiale.
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Sources : BEA, Eurostat, BoJ, ACDEFI
Cette contre-performance de la zone euro s’explique principalement par l’effondrement de l’activité en Allemagne et la poursuite de la stagnation en Italie.
L’Allemagne et l’Italie s’enfoncent dans la stagnation.
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Sources : Eurostat, Destatis, ACDEFI
Face à ce double effondrement, la croissance française pourrait presque faire figure de bonne performance. Néanmoins, avec un niveau de 1,2 %, nous restons toujours très loin de la croissance forte. Et ce, surtout lorsque l’on sait que ce léger mieux comparativement à nos partenaires européens a été obtenu grâce à un creusement du déficit public vers les 3,5 % du PIB.
France : l’industrie reste proche de la récession et la croissance globale demeure molle.
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Sources : INSEE, ACDEFI
Conséquence logique de cette « fuite en avant », la dette publique française a atteint un nouveau sommet historique de 2 415,1 milliards d’euros, soit 100,4 % du PIB.
Pourtant, en dépit de ce nouveau dérapage, les taux d’intérêt des obligations à dix ans de l’Etat français sont restés au plus bas, confirmant que la bulle obligataire s’est poursuivie. Elle devient par là même de plus en plus dangereuse, dans la mesure où elle fournit un blanc-seing aux autorités gouvernementales pour continuer leurs dérapages budgétaires.
La bulle de la dette publique devient de plus en plus extravagante et donc dangereuse.
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Sources : INSEE, ACDEFI
De plus, le maintien de taux obligataires artificiellement bas continue d’alimenter deux autres bulles, en l’occurrence celles des marchés boursiers et de l’immobilier.
En base 100 en 1997, le Dow Jones a ainsi atteint un niveau de 444,3, contre 285 pour le PIB mondial en valeur de 2020. Un écart autant historique qu’extravagant !
L’écart entre le Dow Jones et le PIB mondial en valeur atteint des sommets extravagants.
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Sources : FMI, Calculs ACDEFI
D’où deux questions conclusives : jusqu’à quand ? et, surtout, dans quel état le monde va-t-il sortir de ces multiples bulles ? Réponses « en live » dans quelques mois, voire quelques semaines…
Marc Touati