Les hommes politiques sont harcelés en permanence, essentiellement par la presse mais ils sont aussi vilipendés par les Français eux-mêmes. Cela fait « partie du job » comme on dit, il faut l’accepter ou alors changer de voie. Un chirurgien aussi brillant soit-il mais qui ne supporte pas la vue du sang s’est trompé de métier… Plus leur place au cœur du pouvoir est importante, plus leurs responsabilités sont grandes et plus ils deviennent des cibles faciles. Ainsi, les Présidents de la République sont tout particulièrement visés. Monarques républicains dont on attend des merveilles et dont on est toujours déçu, ils sont régulièrement livrés à la vindicte populaire et médiatique. Sous la Vème République, si l’on met de côté le Général de Gaulle, aucun Président ne fait exception à la règle.
Georges Pompidou tout d’abord, issue de la société civile (Banque Rothschild) fut le premier président à avoir de fortes accointances avec le monde du show business et ses paillettes. Très apprécié d’une large majorité des Français, il fut la cible de la presse qui faisait l’écho de parties fines auxquelles aurait participé son épouse Claude. On était alors plus proche de « France Dimanche » que du débat de fond, néanmoins, Pompidou en fut extrêmement meurtri et découvrit avec fracas la « dark side » du monde politique. Valery Giscard d’Estaing ensuite fut visé par la presse dans le cadre de l’affaire dite des « diamants de Bokassa. » Ces pierres précieuses qui auraient été reçues en cadeau par VGE de la part de l’empereur de Centrafrique ont fait l’objet d’attaques systématiques et extrêmement virulentes. Giscard qui ne voulait pas s’abaisser les traita par le « mépris » et ne fit qu’aggraver les choses. On se souvient des affiches de la campagne présidentielle de 1981 sur lesquelles VGE avait les yeux recouverts de diamants… Certains ont d’ailleurs avancé que cela lui avait couté la victoire face à François Mitterrand.
Ce dernier, bien qu’épargné par les médias sur sa vie privée (ce n’était pas convenable à l’époque) fut la cible d’une large partie de la presse. On se souvient entre autres des attaques sur sa proximité avec Maurice Papon ou sur l’ordre de la Francisque dont il était décoré. Mitterrand n’était néanmoins pas un saint et de nombreuses attaques comme celles liées aux écoutes téléphoniques étaient justifiées. Bien qu’il n’ait été « que Premier ministre », le paroxysme du harcèlement fut atteint avec Pierre Bérégovoy. Fustigé par une partie de la presse pour avoir reçu un prêt sans intérêt d’un million de francs par son ami Roger-Patrice Pelat, il ne s’en est jamais remis, allant jusqu’à se donner la mort. On se souvient de François Mitterrand parlant de « l’honneur d’un homme livré aux chiens » pour qualifier une partie de la presse. Il faut souligner que Bérégovoy avait été énormément fragilisé sur le plan personnel par la lourde défaite de la gauche aux législatives de 1993. Chirac qui cherchait les bâtons pour se faire battre ne fut pas épargné par la presse. Loin d’être une victime, il fut attaqué dans le cadre d’affaires (emplois fictifs, compte au Japon etc …) pour la plupart bien réelles.
Avec Nicolas Sarkozy nous sommes passés à une autre ère. En effet, ce dernier ayant tel Kennedy instrumentalisé sa vie privée, le retour de manivelle n’en fut que plus dur. Ainsi, la presse ne l’a pas épargné notamment au moment de ses déboires conjugaux avec Cecilia. On se souvient de la couverture de Paris Match avec cette dernière et son amant Richard Attias, une première sous la Vème République. En abaissant et en désacralisant la fonction, Nicolas Sarkozy a fait sauter les digues qui jusque-là protégeaient encore la vie privée et la vie publique des présidents. Ses écarts de langage, son agressivité et son côté bling bling en ont fait la proie idéale de nombreux journalistes et d’une grande majorité de Français. Allant souvent au-delà de sa propre caricature, l’acharnement dont il a été l’objet fut absolument sans précédent. Le magazine Marianne s’est particulièrement distingué avec des titres comme : « la honte de la Vème République » ou « Sarkozy est-il fou ? ». Sarkozy fascinait grand nombre de Français et « boostait » considérablement les ventes. D’ailleurs, depuis son « retrait » de la vie politique active, la presse hebdomadaire nationale est en chute libre et plus particulièrement le magazine Marianne…
Enfin, François Hollande démarre très fort avec ce que l’on appelle désormais le « Hollande bashing. » Vilipendé par les médias de tous bords, il risque de terminer son mandat en lambeaux… L’homme est peu attaqué sur sa vie privée mais essentiellement sur sa politique et son manque de résultats. C’est un véritable rouleau compresseur qui s’abat sur lui. Le sujet du harcèlement est d’ailleurs d’actualité au moment où Vincent Peillon ouvre un grand chantier dans les écoles les collèges et les lycées. La différence majeure étant que si Hollande est aujourd’hui bel et bien harcelé de toutes parts, c’est plutôt lui qui rackette les Français et non l’inverse…
La phrase de la semaine :
«Les hausses de TVA sont destinées à restaurer la compétitivité des entreprises sans handicaper les ménages.» De Bernard Cazeneuve, ministre du Budget.
Jérôme Boué