Perspectives économiques : 2013, année de la braise ? (E&S n°237)

 

Humeur :

2013, année de la braise ?

 

Au cours des cinq dernières années, la planète économico-financière a été particulièrement chahutée. En 2008, ce fut le début de la crise ; en 2009, la récession mondiale ; en 2010, la reprise ; en 2011, le grand gâchis ; et, enfin, en 2012, la rechute, en particulier de la zone euro. Face à tant de rebondissements et à une crise qui dure finalement depuis plus de cinq ans, la question est de savoir si 2013 sera enfin l’année de la sortie de crise. Si l’envie ne manque pas de répondre par l’affirmative, il faut malheureusement reconnaître que nous en sommes encore loin et que les dangers qui pèsent sur 2013 sont encore trop nombreux pour permettre de retrouver le chemin de l’enthousiasme.

Certes, comme cela s’est observé de 2010 à 2012, les pays émergents continueront de croître à un rythme soutenu. La Chine et l’Inde devraient ainsi afficher des croissances de respectivement 8 % et 6 %. Dans le même temps, les Etats-Unis devraient rester sur un rythme de croissance proche de 2,5 %, c’est-à-dire un niveau appréciable mais non flamboyant. Quant au Japon, la progression de son PIB avoisinerait son niveau structurel de 1 %.

Au total, la croissance mondiale sera d’environ 3,3 %, soit un niveau similaire à celui de 2012 et équivalent à sa moyenne de long terme observée depuis 1980.

La bonne tenue de l’économie mondiale tiendra notamment à l’augmentation limitée des cours des matières premières et notamment du pétrole, mais aussi à la poursuite des effets favorables des politiques monétaires ultra-accommodantes, notamment aux Etats-Unis et au Japon.

Dans ce concert sans éclat mais plutôt harmonieux et rassurant, la zone euro continuera à faire bande à part. En effet, à l’instar de ses « performances » des années 2011 et 2012, celle-ci restera à la traîne de la croissance mondiale en 2013. Pis, comme cela a déjà été le cas l’an dernier, l’UEM devrait subir une baisse de son PIB d’environ 0,4 %. En effet, compte tenu du caractère trop restrictif de la politique fiscale, d’un euro trop cher et d’une crise de la dette qui se poursuivra, l’économie eurolandaise restera coincée dans la récession au moins jusqu’à la fin du printemps 2013.

Dans ce cadre, les objectifs de réduction des déficits publics et des ratios dettes / PIB ne seront pas respectés. Ce qui ne manquera pas de susciter un mouvement d’augmentation des taux des obligations d’Etat, réduisant d’autant l’investissement, l’emploi et la consommation. Et ce, en particulier dans l’Hexagone.

En effet, en 2013, les résultats économiques français devraient s’avérer particulièrement mauvais : une baisse annuelle du PIB de 0,4 %, un taux de chômage de 12 % en fin d’année (selon les statistiques d’Eurostat) et un déficit public d’au moins 4 % du PIB.

Compte tenu de ces piètres performances, la France va ainsi atteindre une étape décisive de son Histoire : pour la première fois depuis la seconde guerre mondiale et pour la troisième fois depuis la Révolution française, sa dette publique va être égale à sa richesse, c’est-à-dire qu’elle représentera 100 % du PIB. Autrement dit, bien loin des messages anesthésiants de François Hollande, la France restera enlisée dans le marasme économique et social.

En fait, seules deux lueurs d’espoir permettent d’éviter de sombrer dans la déprime. Primo, dans le sillage de la récession, l’euro/dollar devrait revenir vers des niveaux plus normaux de 1,15 dollar, soutenant l’activité, avec un décalage temporel de six mois.

Secundo, le développement des Nouvelles technologies de l’énergie et de l’agro-alimentaire, mais aussi des nanotechnologies devrait soutenir la marche des affaires mondiale.

Parallèlement, il faut espérer que les dirigeants politiques et monétaires eurolandais prendront enfin le taureau par les cornes pour moderniser le fonctionnement de la zone euro, notamment au travers d’une BCE encore plus active sur le front de l’activité économique et un budget fédéral. Quant au gouvernement français, il devra faire un virage à 180° pour tenter d’éviter le pire.

De la sorte, bénéficiant par ailleurs de la bonne tenue de la croissance mondiale et de l’assagissement des cours des matières premières, l’UEM pourra enfin s’engager sur la voie de la reprise à partir de l’automne 2013, avec, si tout va bien, une réduction significative et durable des déficits publics, puis des dettes.

En conclusion, si les politiciens et les hauts-fonctionnaires eurolandais n’attisent plus les braises des crises des dernières années, alors tous les espoirs redeviennent permis pour… 2014.

En attendant, je me joins à toute l’équipe d’ACDEFI pour vous souhaiter une excellente année 2013, pleine de santé, bonheur et réussite.

Je profite de cette période de vœux pour vous annoncer dès à présent la sortie de mon prochain livre le 7 mars 2013. Il s’intitulera « Le dictionnaire terrifiant de la dette ». Nous aurons évidemment l’occasion d’en reparler. A très bientôt. Amicalement.

 

Marc Touati


 


 

Les évènements à suivre du 7 au 11 janvier :


Nouvelle augmentation du chômage dans la zone euro.


Cette semaine économico-statistique sera plutôt calme avec seulement trois publications vraiment déterminantes des deux côtés de l’Atlantique. Aux Etats-Unis, il n’y en aura qu’une. En l’occurrence, la balance commerciale de novembre (vendredi).

Dans la zone euro, on surveillera principalement l’évolution du chômage en novembre et l’enquête de conjoncture de la Commission Européenne de décembre (toutes les deux mardi).

A l’échelle française et allemande, on notera les statistiques des balances commerciales (mardi) et des productions industrielles (mercredi et jeudi).

Enfin, à côté de ces publications, les réunions de politiques monétaires de la BCE et de la BoE (jeudi) ne devraient pas réserver d’énormes surprises.

 

Mardi 8 janvier, 8h (heure de Paris) : nouveau recul de l’excédent commercial allemand.

Compte tenu du retour de la récession dans la zone euro, mais aussi du ralentissement de la croissance mondiale, l’excédent commercial allemand devrait continuer de reculer en novembre. Grâce à la faiblesse des cours du pétrole, il resterait néanmoins très appréciable, avec un niveau de 15 milliards d’euros (contre 15,8 milliards en octobre et 16,9 milliards en septembre). Même l’Allemagne commence à souffrir.

 

Mardi 8 janvier, 8h45 : le déficit commercial français toujours autour des 4,5 milliards d’euros.

Même si la faiblesse des cours des matières premières permettra d’éviter un nouveau creusement du déficit extérieur français, ce dernier devrait rester élevé. Il atteindrait 4,5 milliards d’euros, contre 4,685 milliards le mois précédent. Mais, maintenant que le rapport Gallois est sorti, tout va changer (humour jaune…).

 

Mardi 8 janvier, 11h : le chômage continue d’augmenter dans la zone euro.

Conséquence logique du retour de la récession, le taux de chômage de la zone euro devrait continuer de se tendre. Après un record historique de 11,7 % en octobre, un nouveau sommet de 11,8 % devrait être atteint en novembre. Comme dirait François Hollande, il est clair que la crise de la zone euro est terminée (humour noir).

 

Mardi 8 janvier, 11h : léger recul de l’indice de sentiment économique dans l’UEM.

Après son augmentation surprise de novembre, l’indice de sentiment économique de la zone euro calculé par la Commission Européenne devrait légèrement reculer en décembre. Un niveau de 85,2 serait atteint (contre 85,7 le mois précédent), corroborant l’atteinte d’un glissement annuel du PIB eurolandais d’environ – 1,5 % pour le quatrième trimestre 2012 et le premier de 2013.

 

Jeudi 10 janvier, 13h : La BoE maintient son taux de base encore et encore.

Dans la mesure où elle ne dispose d’aucune marge de manœuvre supplémentaire, la Banque d’Angleterre maintiendra une fois de plus son taux de base à 0,5 %. Le problème est que, malgré ce soutien massif, le Royaume-Uni continue de souffrir.

 

Jeudi 10 janvier, 13h45 : Nouveau statu quo de la BCE.

Si l’année du Dragon Draghi se termine bientôt, que nous réserve ce dernier pour l’année du Serpent ? Car si Mario Draghi a en partie corrigé les graves erreurs de son prédécesseur, la zone euro s’est encore enlisée dans une nouvelle récession. Et, malheureusement, le maintien du taux refi à 0,75 % et surtout de l’euro à plus de 1,30 dollar empêcheront le retour de la croissance avant quelques mois et sûrement même quelques trimestres.

 

Vendredi 11 janvier, 14h30 : le déficit extérieur américain se stabilise.

Après son augmentation surprise d’octobre, le déficit extérieur américain devrait quasiment stagner en novembre. Il passerait ainsi de 42,2 milliards de dollars à 41,8 milliards. La sagesse des cours des matières premières et le ralentissement de la croissance mondiale sont le chaud et le froid qui expliquent cette prévision.

 

 

Marc Touati



Calendrier complet des statistiques et évènements de la semaine :

 

Nos prévisions économiques et financières pour 2013 :

 

Pour visualiser les tableaux et graphiques, merci de consulter le fichier pdf.