Le huit octobre dernier, la Banque Centrale Européenne (BCE) s’est de nouveau engagée à venir en aide aux pays de la zone Euro les plus endettés en lançant son programme Outright Monetary Transaction (OMT). Celui-ci consiste à intervenir sur le marché secondaire de la dette publique des Etats dont les primes de risques sont élevées. La BCE semble ainsi endosser son rôle de prêteur en dernier ressort.
Des niveaux de dette publique historiquement élevés.
En constituant 88% de la richesse créée en zone Euro, le niveau de la dette publique européenne a atteint un niveau sans précédent en 2011. Et cela ne devrait pas aller en s’arrangeant ; selon les dernières estimations de l’OCDE, la dette publique européenne pourrait en 2012 s’accroître de 6 points par rapport à 2011 et s’élever à 94% du PIB de la zone Euro. Si la quasi-totalité des pays membres de l’Union Monétaire contribue à cette augmentation, notons que les dénommés GIIPS par certains (et PIIGS par d’autres) tirent la dette de la zone | |
Euro vers le haut. Ainsi entre 2011 et 2012, l’endettement public de la Grèce devrait passer de 171% du PIB à 177% du PIB, celui de l’Italie de 121% du PIB à 126% du PIB, celui de l’Irlande de 106% du PIB à 115% du PIB et enfin celui du Portugal de 108% du PIB à 115% du PIB. Pour mémoire, les critères de Maastricht tolèrent un niveau de dette publique équivalent à 60% du PIB…
Le financement de la dette publique face à la méfiance du marché.
Malgré une dynamique commune, les pays de la zone Euro ne sont pas égaux quant au financement de leur dette publique. Le Bund allemand se négocie actuellement en dessous de 1,5% et l’OAT française à environ 2%, en dépit de la récente dégradation de l’agence de notation Moody’s. Dans le même temps, les taux sont insoutenables pour les
Etats de la périphérie européenne et plus particulièrement au Portugal et en Grèce. L’évolution des CDS souverains sur 5 ans, témoigne en effet de la méfiance du marché sur l’avenir de ces pays et leur capacité à faire face à leurs échéances. Conjugué à la mise en place du Mécanisme Européen de Stabilité (MES), le programme OMT semble ainsi être la solution pour rétablir la confiance des agents privés ; en s’engageant à racheter de manière illimitée de la dette portugaise et/ou grecque, la BCE envoie en effet un signal fort au marché. | |
La BCE dans son costume de prêteur ultime.
La notion de prêteur ultime est née au XIXème siècle via les travaux de deux économistes, Henry Thorton (An Enquiry into the nature and effects of the paper credit of Great Britain, 1802) et Walter Bagehot (Lombard Street ou le marché financier en Angleterre, 1874). Selon eux, une banque centrale se doit de venir au secours des banques commerciales quand celles-ci font face à des soucis temporaires de liquidité et non de solvabilité. Les critères d’interventions de la BCE diffèrent ainsi de ceux de la théorie économique standard ainsi que du mandat qui lui incombe, la lutte contre
l’inflation. La mise en place du programme OMT a bénéficié dans un premier temps d’un effet d’annonce positif qui s’est traduit par une détente des spreads grecs et portugais. Ces derniers demeurent néanmoins sur des tendances haussières et la confiance des marchés ne semble toujours pas au rendez-vous. Par ailleurs, outre les risques d’aléa moral que confère cette situation, la vraie question que se posent actuellement les marchés ne concerne pas les problèmes de liquidité mais bien la solvabilité de ces Etats. | |
Achevé de rédiger le 10 décembre 2012
Anthony Benhamou
Pour visualiser les tableaux et graphiques, merci de consulter le fichier pdf.