Le thème de la sécurité est depuis longtemps un enjeu politique majeur dans notre pays. On se souvient de Charles Pasqua qui, en son temps, souhaitait « terroriser les terroristes » et qui par ses méthodes renforça l’idée d’une droite répressive. On se rappelle également de Lionel Jospin évoquant un « sentiment d’insécurité » alimentant l’image d’une gauche angélique et laxiste. Le créneau de la sécurité fut d’ailleurs un des points essentiels qui, après la fracture sociale de 1995, permit à Jacques Chirac de s’imposer en 2002.
Plus récemment, Nicolas Sarkozy, lorsqu’il était premier flic de France, a donné une autre dimension à la fonction. Il a notamment mis en avant la culture des résultats et de la performance. Ayant fortement radicalisé son discours, le président de l’UMP siphonna une large partie des électeurs du Front National sur les thèmes de l’insécurité et de l’immigration en 2007. Nicolas Sarkozy et son officieux puis officiel Ministre de l’Intérieur Claude Guéant ont cependant énormément déçu notamment en ne parvenant pas à faire baisser les chiffres des crimes et délits contre les personnes. D’ailleurs, à l’inverse de l’élection de Chirac en 2002, le thème de la sécurité pénalisa le président sortant en 2012.
Le successeur de Claude Guéant, Manuel Valls, n’a pas attendu bien longtemps avant de tourner la page des années Sarkozy en matière de sécurité. Ainsi, au moment du traditionnel discours de prise de fonction, il affirma vouloir mettre fin à la culture des chiffres et des résultats. Néanmoins, l’actuel premier flic de France apparaît comme le plus à droite des ministres du gouvernement Ayrault et nombreux sont ceux à l’UMP qui ne tarissent pas d’éloges à son égard. Certains n’hésitent pas à franchir le Rubicon en comparant celui pour qui « l’ordre n’est pas l’ennemi des libertés individuelles » à Nicolas Sarkozy. L’actualité récente nous montre que le parallélisme n’est pas dénué de tout sens. On l’a vu lors de l’annonce de l’expulsion de 7000 Roms d’ici fin septembre, dans l’action menée à Marseille ou encore avec l’adoption prochaine du projet de loi antiterroriste voulu par Nicolas Sarkozy. Il y a encore beaucoup de zones de non droit en France et le ministre de l’Intérieur souhaite restaurer l’autorité de l’Etat trop souvent bafouée. Si le diagnostic ne fait aucun doute, reste à savoir quelle méthode et quels moyens il utilisera. On sait déjà que si Nicolas Sarkozy privilégiait la police au détriment de la gendarmerie, un rééquilibrage devrait s’effectuer.
Le plus populaire des ministres du gouvernement (67 % de bonnes opinions selon l’Ifop) est également un homme de convictions, comme le montre son opposition au droit de vote des étrangers lorsqu’il affirme « qu’il ne s’agit pas d’une revendication forte de la société ». Rappelons qu’il s’agit tout de même d’une des promesses de campagne du candidat Hollande. Notons que le locataire de la place Beauvau s’est encore singularisé en abandonnant le récépissé de contrôle d’identité. Cette défiance est toutefois à double tranchant car il ne faut pas franchir la ligne jaune. Pour paraphraser Jean Pierre Chevènement qui démissionna du gouvernement Mitterrand : « Un ministre ça se soumet ou ça ce démet ». A bon entendeur…
La phrase de la semaine :
«Hollande et Ayrault ont fait plus de bien au Français en cent jours que Sarkozy et Fillon en cinq ans.» de Harlem Désir premier secrétaire du PS.
Jérôme Boué