Bien entendu, semblables à des enfants gâtés qui ne voient que le mauvais côté des choses, les marchés risquent de montrer leur déception face à la croissance américaine du deuxième trimestre 2010. En effet, ils attendaient une progression annualisée de 2,6 % et ce n’est qu’un résultat de 2,4 % qui a été publié. Quelle horreur ! De même, ils vont certainement mettre en exergue le ralentissement de la croissance de l’Oncle Sam qui est passée de 5 % au quatrième trimestre 2009 à 3,7 % au trimestre suivant et enfin 2,6 % au deuxième de 2010. Enfin, pour satisfaire leur recherche de pessimisme, ils vont aussi montrer du doigt la décélération de la consommation des ménages qui n’a progressé « que de » 1,6 % au deuxième trimestre, soulignant également que sans la formation des stocks, la croissance du PIB n’est que de 1,3 %.
Si ces évolutions sont indubitables (du moins tant que le BEA ne révise pas les chiffres du PIB), elles ne doivent pas pour autant laisser penser que l’économie américaine est de nouveau sur la voie du déclin. Loin s’en faut.
Ainsi, il faut d’ores et déjà souligner qu’en enregistrant désormais quatre trimestres consécutifs de hausse, le PIB américain affiche dès le deuxième trimestre 2010 un glissement annuel de 3,2 %, un plus haut depuis le premier trimestre 2005. De plus, ce retour durable de la croissance est surtout dû au rebond de l’investissement. Ainsi, et il s’agit certainement là de la meilleure nouvelle des comptes nationaux du deuxième trimestre, l’investissement en équipements des entreprises a progressé de 21,9 % au deuxième trimestre, après avoir crû de 20,4 % au trimestre précédent et de 14,6 % au quatrième trimestre 2009. Autrement dit, le retour du cercle vertueux « investissement-emploi-consommation » ne fait plus aucun doute. Il ne faut donc pas s’inquiéter outre-mesure pour l’avenir de l’économie américaine.
D’ailleurs, soulignons que même en matière d’investissement logement, c’est-à-dire là où la crise a commencé, l’heure du rebond a bien sonné. Ainsi, ce dernier a progressé de 27,9 % au deuxième trimestre, un plus haut depuis le quatrième trimestre 1983.
Par ailleurs, même si la formation de stocks a apporté 1,1 point à la croissance annualisée du PIB au deuxième trimestre, sa contribution avait été de 2,6 et de 2,8 points au cours des deux trimestres précédents. Ainsi, la croissance hors stocks a augmenté à 1,3 % au deuxième trimestre, contre 1,1 % au premier trimestre 2010.
En outre, le ralentissement de la croissance globale au deuxième trimestre doit être relativisé par deux évolutions. D’une part, l’augmentation du PIB du premier trimestre a été revue en forte hausse (de 2,7 % à 3,7 %). Cela signifie donc que hors révision, la performance du deuxième trimestre est largement supérieure à la croissance attendue par le consensus. D’autre part, à cause de la forte augmentation des importations (+ 28,8 %) et de la « moindre » progression des exportations (tout de même + 10,3 %), la contribution du commerce extérieur a été fortement négative, en l’occurrence 2,8 points. En d’autres termes, la croissance de la demande intérieure a été de 5,2 % et celle de la demande intérieure finale (c’est-à-dire hors stocks) de 4,1 %, contre 1,3 % au premier trimestre 2010 et 0,2 % au quatrième de 2009. Pas mal pour un ralentissement…
Enfin et cerise sur le gâteau, l’acquis de croissance du PIB pour cette année au sortir du deuxième trimestre 2010 est déjà de 2,5 %. Dans ce cadre, nous maintenons sans équivoque notre prévision d’une croissance américaine de 3,4 % pour 2010, soit plus du double du résultat que devrait dégager la zone euro cette année. De quoi rappeler que l’euro n’a rien à faire au-dessus des 1,20 dollar…
Marc Touati