Guéant et Gaudin : le forfait 2G de Sarkozy ?

Quand y en a plus, y en a encore … Les affaires reprennent de plus belle en France mais pas dans le bon sens du terme. A l’ordre du jour, Claude Guéant et Michel Gaudin ont été placés en garde à vue dans le cadre d’une enquête préliminaire portant sur des primes versées en espèces. Les griefs sont lourds puisqu’on parle de détournement de fonds publics, complicité et recel. Alors que les versements de primes en liquide avaient été supprimés par Lionel Jospin en 2002, Claude Guéant, alors directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy place Beauvau, est accusé d’avoir pioché entre 2002 et 2004 dans la caisse des « frais d’enquête et de surveillance », pour des montants de l’ordre de 10 000 euros par mois. Quant à  Michel Gaudin alors DGPN (Directeur Général de la Police Nationale) il aurait prélevé l’argent liquide dans la cagnotte pour le remettre à Guéant…

Bien que présumé innocent, Guéant accumule les maladresses. Comme dans les sables mouvants, plus il s’agite plus il s’enfonce. Ainsi, dans le cadre de l’enquête préliminaire ouverte le 14 juin par le Parquet de Paris suite à un rapport de l’Inspection Générale de l’Administration, des perquisitions avaient permis de découvrir des factures payées en numéraire pour environ 20 à 25 000 euros, ainsi qu’une somme suspecte de 500 000 euros dans ses comptes. Pour justifier ces règlements en espèces, Claude Guéant avait alors évoqué les fameuses primes de cabinet alors qu’il les avait lui-même interdites dans une note officielle du 3 février 1998 quand il était DGPN… Concernant les 500 000 euros, l’ancien ministre de l’intérieur évoque une vente de tableaux dont diverses expertises ont prouvé qu’ils ne pouvaient en aucun cas valoir une telle somme… Tout cela fait donc extrêmement désordre, d’autant que les deux hommes sont des personnalités de premier plan au cœur de la Sarkozie.

Ministre de l’Intérieur (2011), Secrétaire Général de l’Elysée (2007-2011), ancien directeur de cabinet de Sarkozy (2002-2004), Claude Guéant est sur le papier un grand serviteur de l’Etat. Celui que l’on surnommait « le Cardinal » fut d’ailleurs considéré comme l’homme le plus puissant de France. Quant à Michel Gaudin, DGPN de 2002 à 2007 et ancien Préfet de Police de Paris, il fait également partie des grands commis de l’Etat. Ses puissants réseaux ont d’ailleurs amené Nicolas Sarkozy à le prendre comme directeur de cabinet après sa défaite en 2012. On parle aujourd’hui des 2G de Sarkozy – Guéant et Gaudin – comme on parlait en 1993 des « deux Nicolas » de Balladur : Bazire et Sarkozy. La question se pose désormais de savoir quel sera l’impact de cette affaire sur un possible retour de Nicolas Sarkozy ?

L’onde de choc sera vraisemblablement beaucoup moins forte que certains veulent le laisser entendre. En effet, même s’il y a une condamnation de justice, Nicolas Sarkozy jouera la carte de la victime qui ne connaissait rien des agissements de ses collaborateurs, à l’instar de Hollande avec Cahuzac. L’ancien chef de l’Etat devrait en ressortir affaibli temporairement mais intact. Rappelons-nous le nombre de « casseroles » de Jacques Chirac que Jean-Marie Le Pen voulait faire tinter mais qui n’ont jamais véritablement réussi à l’atteindre. Le meilleur allié de Nicolas Sarkozy est le contexte économique et social actuel. En effet, si en 2016 la France est à genoux et François Hollande en lambeaux, si le droite se divise et n’arrive pas à faire émerger un leader digne de ce nom, et si le FN atteint des sommets, alors Nicolas Sarkozy pourra apparaitre comme l’homme providentiel capable de redresser le pays et de le tirer des « griffes » du FN.

D’ailleurs, le mouvement d’extrême droite qui se pose aujourd’hui en premier parti d’opposition va largement profiter de la mise en examen des 2G pour tenter de passer à la 4G auprès des électeurs.

 

La phrase de la semaine :

«Il est plus facile d’enlever une voiture mal garée dans la capitale qu’un mendiant Rom » de Pierre Lellouche.

 

 

rôme Boué