France, zone euro : la récession est là, mais ne le dites à personne…

 

Sauvé par le gong ! Telle pourrait être la synthèse des comptes nationaux du deuxième trimestre 2012 dans l’Hexagone. En effet, comme cela s’était déjà observé au quatrième trimestre 2011 et au premier trimestre 2012, le PIB français a miraculeusement évité le repli. Ainsi, comme il y a six et trois mois, en dépit des évolutions déjà connues (notamment la baisse de la production industrielle) qui laissaient imaginer un recul d’au moins 0,2 % du PIB hexagonal, ce dernier a finalement stagné.

En d’autres termes, les Présidents et les majorités passent, mais les magiciens de l’INSEE restent les mêmes…

Pour autant, en dépit de la magie, il y a des réalités qui ne peuvent être masquées. Ainsi, cela fait tout de même trois trimestres consécutifs que le PIB français stagne. On pourrait appeler cela une « récession Canada Dry », c’est-à-dire qu’elle s’y apparente à tous points de vue, mais qu’elle n’en porte pas le nom. En effet, pour qualifier une récession il faut normalement deux trimestres consécutifs du PIB. Cela n’est donc pas le cas en France, mas avec trois trimestres de stagnation, la situation économique française est au moins analogue à une récession.

C’est d’ailleurs ce qui ressort de la baisse de 0,1 % de l’emploi salarié au deuxième trimestre. En outre, il faut noter qu’hors stocks, le PIB français a bien reculé pendant deux trimestres : – 0,1 % au premier trimestre 2012 et – 0,3 % au deuxième.

Pour couronner le tout, l’acquis de croissance pour 2012 n’est que de 0,2 % au sortir du premier semestre. Dans la mesure où le PIB devrait encore reculer au second semestre, cela signifie donc que les prévisions gouvernementales en termes de croissance et de déficit public ne seront pas respectés. Dans le meilleur des cas, la croissance annuelle moyenne sera de 0,2 % cette année et le déficit public dépassera les 4,5 % du PIB.

Pour se rassurer, il sera toujours possible de souligner que la situation est encore plus grave dans la zone euro. En effet, après avoir déjà reculé de 0,3 % au quatrième trimestre 2011, puis stagner au premier de 2012, le PIB eurolandais a baissé de 0,2 % au deuxième. Pour certains pays, tels que la Grèce, l’Espagne, le Portugal, l’Italie ou Chypre, la récession commence à devenir dramatique. Les glissements annuels des PIB de ces pays atteignent des niveaux de respectivement : -6,2 %, – 1%, -3,3 %, -2,5 % et – 2,4%. Au-delà de l’ampleur de ces baisses, c’est la durée de la récession qui commence à faire peur. La crise économique est en train de devenir un marasme social pour ces pays du sud de l’Europe.

A l’autre extrémité du prisme de l’activité eurolandaise, l’Allemagne continue de surfer sur la croissance. Après avoir augmenté de 0,5 % au premier trimestre, le PIB allemand a progressé de 0,3 % au deuxième.

En temps normal ou dans une zone euro optimale, cette résistance devrait faire plaisir aux autres pays de l’UEM. Mais, aujourd’hui, il n’en est rien car ces écarts de croissance avec l’Allemagne confirment que la zone euro est loin d’être optimale et est, au contraire, devenue le théâtre d’une hétérogénéité croissante.

De plus, cette déconnexion va encore donner du grain à moudre aux opposants allemands au sauvetage des pays du Sud et plus globalement de la zone euro.

Dans ce cadre, la rentrée économique, sociale et politique s’annonce particulièrement difficile. La question est donc de savoir si les dirigeants politiques, les partenaires sociaux et plus globalement les populations sauront relever le défi ou préfèreront jeter l’éponge…

Marc Touati