Humeur :
Et nous voilà reparti dans la crise grecque, avec ses faux semblants, ses dangers et ses « vraies fausses » solutions. En effet, comme nous n’avons cessé de le répéter, alors que la majorité des économistes et des politiciens bien-pensants se répandaient un peu partout pour annoncer que la crise grecque et celle de la zone euro étaient terminées, rien n’a jamais été réglé. Bien au contraire. En fait, les dirigeants eurolandais ont simplement posé un gros pansement sur une plaie béante sans la cautériser. Si bien que lorsque le pansement s’effiloche, puis disparaît (comme c’est le cas aujourd’hui), la plaie est non seulement toujours là, mais elle s’est, de surcroît, infectée.
Bref, en supprimant la moitié de la dette grecque détenue par des agents privés, les européens n’ont fait que gagner du temps. Aussi, dans la mesure où l’euro est resté trop fort et où rien n’a été fait pour soutenir la croissance,
Pour « couronner » le tout,
Face à ce chaos, certains n’hésitent pas à ressortir les vieilles rengaines d’une sortie de
Avant toute chose, il faut rappeler qu’il n’est pas possible aux membres de la zone euro de « sortir » un des leurs. Le choix appartient à chacun des pays. Or, quand bien même
Parallèlement, le remplacement de l’euro par la drachme susciterait une flambée inflationniste, une dépréciation notable de l’épargne et une réduction massive du pouvoir d’achat des ménages, d’où un nouvel effondrement de la consommation, donc de la croissance…
Pris à la gorge, les Grecs n’auraient alors d’autres choix que de fermer leurs frontières financières et d’annuler la totalité de leur dette. C’est à ce moment-là que l’effet de contagion se répandrait à l’ensemble des pays de l’UEM. Et pour cause : les pays européens détiennent pour plus de 290 milliards d’euros de dette grecque, dont 80 milliards pour l’Allemagne et 60 milliards pour
Au total, la facture des 290 milliards d’euros de suppression de la dette grecque pourraient être triplée, voire plus.
En outre, la sortie de
Face à ce désastre, certains pays pourraient alors être tentés ou contraints de trouver un protecteur, également appelé « chevalier blanc » dans la théorie des jeux. Comme lors de la chute de l’Empire romain, l’Europe deviendrait alors le théâtre d’invasions de toutes parts, d’abord sur le front financier et ensuite d’un point de vue capitalistique.
Devant cette menace, les Etats-Unis ne resteront alors certainement pas les bras croisés, ce qui transformera la crise économique en tempête géopolitique majeure.
A l’évidence, il est urgent de tout faire pour éviter ce cauchemar. Cela commencera par la restauration du couple franco-allemand en faveur d’une croissance plus forte sans dérapage des dépenses publiques. Autrement dit, pour que les Allemands acceptent de mettre de l’eau dans leur vin sur le front de la croissance, et notamment de l’action de
La question reste donc de savoir si les dirigeants eurolandais et notamment les Français et les Allemands auront le courage, la volonté et l’intelligence de se mettre d’accord. La construction européenne ayant constamment avancé par chocs, souvent le dos au mur, il est encore possible d’espérer que l’on sortira de cette crise par le haut.
Après les sourires de façade, les crispations à peine voilées et les désaccords franco-allemands du dernier dîner européen, nous aurons la vraie réponse à cette question lors du sommet du 28-29 juin… D’ici là, la volatilité restera extrêmement forte sur les marchés boursiers et sur l’euro/dollar. Bon courage à tous…
Marc Touati
Quid des marchés cette semaine ?
L’euro baisse, tant mieux pour la croissance.
C’est certainement le seul point positif de la nouvelle crise grecque : l’euro baisse.
En effet, comme cela s’est déjà observé à quatre reprises depuis 2008, la dernière tempête qui secoue l’Euroland rappelle que l’UEM ne peut supporter un euro trop fort.
Le drame c’est qu’il faille à chaque fois passer par la case « crise » pour que les investisseurs comprennent cette évidence. Certes, il faut reconnaître que la politique de
Ce fut tout d’abord le cas au second semestre 2007 et au premier de 2008, au cours desquels en dépit de la crise financière mondiale qui commençait, puis de la récession qui s’installait en Europe,
Face à l’effondrement des marchés et de la croissance de la seconde partie de 2008,
Mais, au moment où la dépréciation de la monnaie unique était sur le point de relancer la croissance,
C’est à ce moment-là que la crise grecque a explosé, permettant d’engager une nouvelle dépréciation de l’euro qui est même tombé à 1,22 dollar.
Mais, une fois encore, alors que la tempête semblait se calmer,
L’euro est alors reparti à la baisse, laissant imaginer que la rechute économique serait sans gravité et de courte de durée. Malheureusement, en laissant croire que la zone euro était définitivement sauvée et que la crise était terminée, les dirigeants eurolandais ont maintenu l’euro au-delà des 1,30 dollar et ont empêché le retour de la croissance. Pis, ils ont réveillé l’hydre grecque et rappelé que la zone euro était toujours en danger.
C’est pourquoi, depuis quelques semaines, la devise européenne s’est nettement dépréciée, se rapprochant de ses niveaux normaux.
Il ne faut effectivement pas oublier que le niveau normal de l’euro/dollar est de 1,15 dollar selon la parité des pouvoirs d’achat (PPA) et de 1,18 dollar selon le taux de change naturel (dit Natrex). Tant que nous n’y sommes pas, la zone euro ne peut pas retrouver le chemin de la croissance et est donc dans l’incapacité de sortir de la crise. Et ce a fortiori pour les pays les plus fragiles, pour qui le niveau de PPA de l’euro est bien plus bas : par exemple 0,70 dollar pour
La baisse de l’euro est tout à fait justifiée.
Sources : Natrex, Datastream
En fait, le mouvement de dépréciation justifiée de l’euro sera bien plus bénéfique à la croissance qu’une énième augmentation des dépenses publiques, qui serait in fine inefficace, dans la mesure où elle coûterait bien plus cher (en termes de dette et d’augmentation des impôts futurs) que ce qu’elle rapporterait à court terme.
C’est peut-être là que réside le point de réconciliation entre les Allemands et les Français. En effet, en continuant d’afficher leurs divergences, ceux-ci vont accroître les craintes sur l’avenir de l’UEM, alimentant la baisse de l’euro et préparant par là même le retour de la croissance.
Pas de retour de la croissance sans euro plus fort.
Sources : Eurostat, Bloomberg
Il ne reste plus qu’à espérer un petit coup de pouce de
Mais attention, si
Espérons simplement que les nouveaux dirigeants français sauront prendre la mesure de ces dangers et comprendront rapidement que l’efficacité de la politique économique réclame du doigté et abhorre le dogmatisme. S’ils n’en sont pas encore conscients, ils vont vite le découvrir avec fracas…
Marc Touati
La météo économique de la semaine écoulée :
Les évènements à suivre du 28 mai au 1er juin :
Léger mieux sur le front de l’emploi outre-Atlantique.
L’actualité économico-statistique sera particulièrement dense cette semaine outre-Atlantique. Nous suivrons l’indice de confiance des consommateurs du Conference Board (mardi) ainsi que la deuxième estimation du PIB pour le premier trimestre (jeudi). Enfin nous prendrons connaissance vendredi du rapport sur l’emploi pour le mois de mai, suivi des revenus des ménages américains pour finir par l’indice ISM manufacturier.
De ce côté de l’Atlantique, nous connaîtrons l’indice de sentiment économique ainsi que l’inflation dans la zone euro (respectivement mercredi et jeudi).
Mardi 29 mai, 16h (heure de Paris) : petite hausse de l’indice de confiance des consommateurs du Conference Board outre-Atlantique.<
- Le financement des entreprises françaises.
- Léger mieux sur le front de l’emploi outre-Atlantique.