Hollande ou Sarkozy, les taux augmenteront après le 6 mai…

 

Trois questions à Marc Touati, responsable de la recherche économique d’Assya Compagnie Financière et auteur du livre « Quand la zone euro explosera », aux Editions du Moment. Lors de notre dernier entretien, fin 2011, l’économiste estimait que les trois agences de notation financière (Standard & Poor’s, Moody’s et Fitch) abaisseraient la node de la dette de la France après l’élection présidentielle. Au lendemain du second tour, il affine son analyse et évoque les répercussions d’une telle baisse sur le marché immobilier.

 

(LaVieImmo.com) – Au vu des résultats du premier tour, une dégradation de la note française est-elle toujours d’actualité ?

Marc Touati : Elle l’est, même s’il est probable qu’aucune des trois grandes agences n’agira avant le résultat du second tour voire, plus vraisemblablement, celui des élections législatives et le vote des premières mesures prises par le prochain gouvernement. En l’état actuel des choses, la France ne peut échapper à une dégradation de sa note si elle ne met pas en œuvre une politique de réduction de son déficit budgétaire. Et comme aucun des deux vainqueurs du premier tour ne semble très crédible en la matière…

 

Quelles répercussions cela peut-il avoir sur le marché immobilier ?

Marc Touati : Tout dépendra de l’ampleur de la dégradation des marches financiers et de la hausse des taux des obligations d’Etat à dix ans qui en découlera. Mais sans attendre un abaissement de la note de la France, on peut penser que les taux longs augmenteront de toute façon dès après le second tour, ce qui entraînera une hausse des taux fixes des crédits immobiliers, plus ou moins forte selon les établissements, mais suffisamment marquée pour appuyer le mouvement de baisse de prix déjà à l’œuvre depuis quelques mois. Je n’ai pas modifié mes prévisions : les prix ont une marge de baisse de 10 à 15 %, plus si les taux s’emballent.

 

Ce risque de hausse des taux vous paraît-il aussi fort quelle que soit l’issue du scrutin ?

Marc Touati : Le mouvement sera vraisemblablement plus fort si c’est François Hollande qui est élu. Cela dit, je pense que si le candidat socialiste peut a priori « faire peur » aux marchés a court terme, il a aussi le pouvoir de les rassurer à moyen terme – peut-être même plus que ne le ferait Nicolas Sarkozy, surtout si sa réélection est suivie par des mouvements sociaux importants. On l’a vu avec les exemples espagnol et grec : les hausses d’impôt et la rigueur appliquées sans croissance sont contre-productives. Or Hollande a placé la restauration de la croissance au centre de son programme, et appelle à repenser les traités européens. Là est peut-être la solution. Avec une inconnue de taille : parviendra-t-il à convaincre Angela Merkel ? La réponse, paradoxale, est qu’il y parviendra s’il accepte de baisser les dépenses publiques. Or, pour le moment, il nous dit le contraire… Si Hollande veut éviter le pire, il devra donc rapidement faire machine arrière. En attendant, les tensions au sein du couple franco-allemand risquent d’êtres fortes, mais le bras de fer pourrait déboucher sur une solution intéressante.

 

Propos recueillis par Emmanuel Salbayre – ©2012 LaVieImmo.com