Mais à quoi jouent les dirigeants politiques et monétaires de la zone euro ? Depuis déjà une décennie, ils semblent prendre un malin plaisir à cumuler les erreurs stratégiques. Ces dernières ont notamment conduit à réduire la croissance structurelle eurolandaise, qui est passée de 2,5 % au début des années 1990 à 2 % dix ans plus tard et à environ 1,3 % aujourd’hui. Dans le même temps, le taux d’investissement a baissé, atteignant un plus bas de19 % depuis 2009, contre 22 % en 2000. Ce mouvement a grippé durablement le cercle vertueux « investissement-emploi-consommation». Conséquence logique de cette dégradation, le taux de chômage est passé de 8,2 % en 2001 à plus de 10 % actuellement.
Le pire est que ces piètres résultats ont été réalisés en dépit d’une forte augmentation des dépenses publiques. En effet, de 46 % en 2000, leur poids dans le PIB atteint désormais plus de 50 %. Et encore, cet accroissement aurait pu être bien plus grave, si les Allemands n’avaient réduit le poids de leurs dépenses publiques à 46 %, contre, par exemple, 57 % pour
Et pour ceux qui croient ou essaient de faire croire que plus l’économie va mal, plus la bourse se porte bien, il faudra simplement ajouter que l’indice EuroStoxx 50 est passé de 5 460 points en mars 2000 à environ 2 100 points actuellement. En d’autres termes, si la croissance structurelle de la zone euro a été divisée quasiment par deux, l’indice boursier eurolandais a chuté de plus de 60 %. De quoi rappeler que l’évolution des marchés boursiers reflète généralement bien la réalité économique. Et celle-ci est donc loin d’être glorieuse au sein de l’Union Economique et Monétaire (UEM).
De surcroit, comme si ces échecs cuisants ne suffisaient pas, les dirigeants eurolandais continuent de déraper et semblent tout faire pour casser définitivement la croissance, l’emploi et l’existence même de l’UEM. Cette tendance à l’autodestruction s’est intensifiée depuis 2007. En effet, alors que la crise des subprimes éclatait et que l’avenir du monde développé s’obscurcissait, les « responsables » eurolandais ont continué de faire comme si de rien n’était et ont poursuivi leurs stratégies de l’échec. Or, si ces dernières plombaient déjà l’économie de la zone lorsque la croissance mondiale était appréciable, la situation ne pouvait qu’empirer en phase de crise, puis de récession internationale. Ainsi, alors que le monde essayait d’éviter la catastrophe, les dépenses publiques eurolandaises continuaient d’augmenter et la BCE s’acharnait à resserrer son étreinte monétaire. En conséquence, l’euro s’est fortement apprécié, le dollar a chuté et les matières premières ont commencé à flamber. L’UEM s’est alors enfoncée dans la récession dés le deuxième trimestre 2008 et s’y est ensuite installée jusqu’en 2009. Bien sûr, les autorités monétaires et politiques ont réagi en 2008-2009, mais, après avoir mis le feu aux poudres, cela était bien la moindre des choses.
D’ailleurs, cette réaction positive ne fut que de courte de durée, puisque dès le printemps 2009, les vieux démons du dogmatisme sont revenus en force au sein des instances dirigeantes eurolandaises. Tout d’abord, à l’inverse de ses consœurs occidentales qui ont tout fait pour soutenir la croissance, la BCE a refusé de baisser son taux refi sous les 1 %. Cela n’a pas manqué de relancer l’euro à la hausse et de freiner la petite reprise qui s’esquissait. Parallèlement, les dirigeants politiques ont continué d’accroître les dépenses publiques dans tous les sens sans réussir à engendrer une croissance au moins égale à la charge annuelle des intérêts de la dette publique. La bulle de la dette s’est donc installée dans l’ensemble des pays de la zone, à l’exception de l’Allemagne, du Luxembourg et des Pays-Bas. Comme toujours, le les pays les plus fragiles ont été le premiers visés, à commencer par
C’est donc ce qui s’est logiquement produit au cours de l’été dernier. Et, une fois encore, plutôt que de prendre le taureau par les cornes et d’essayer de stopper l’hémorragie, ces mêmes dirigeants ont mis de l’huile sur le feu, laissant planer le doute sur la pérennité de la zone euro. Face à un tel degré d’incompétence, les marchés se sont alors engouffrés, dans la brèche et se sont effondrés sans filet. Le problème est que, compte tenu de l’ampleur des dégâts boursiers, les conséquences économiques risquent d’être lourdes au sein de l’UEM. Et ce notamment en matière de financement de l’économie par les banques, qui va forcément s’avérer de plus en plus parcimonieux. Or, qui dit moins de crédits, dit moins d’investissements et de consommation, moins de croissance, plus déficits et plus de dettes publiques. Le cercle infernal dans lequel est tombée la zone euro semble donc loin d’être terminé. Pis, face à cette catastrophe annoncée et inévitable si rien ne change, les dirigeants eurolandais continuent de rester inactifs.
Il faut donc être clair : la balle est dans le camp des « responsables » politiques et monétaires de l’UEM. Ils doivent absolument « sonner la fin de la récré », en s’unissant et en affirmant d’une voix commune que la zone euro est inaliénable et que la Grèce y a bien sa place. Dans ce cadre, aidé également par la baisse de l’euro, nous sortirons de la récession dès le début 2012 et les marchés boursiers rebondiront nettement. A l’inverse, si le cockpit de l’avion eurolandais reste sans pilote et si nos dirigeants continuent d’entretenir la confusion, en laissant planer le doute sur la stabilité de la zone euro, il faut se préparer à un crash sans précédent. Mesdames et Messieurs les gouvernants, prenez donc enfin vos responsabilités et arrêtez le massacre !