Balladur en mission spéciale…

Comme tout Premier ministre qui se respecte, Edouard Balladur a songé à l’Elysée le jour où il a franchi le seuil de Matignon et peut être même avant ! Lui, l’ami de trente ans de Jacques Chirac, lui qui suscitait l’admiration de l’ex député de Corrèze a pensé qu’il était le mieux placé pour diriger la France et s’est lancé dans la grande aventure de la présidentielle. Le problème est que ce « cher Edouard » comme l’appelait Jacques Chirac a commis l’erreur de croire qu’il pouvait être élu quasiment sans faire campagne, sa popularité dans les sondages ainsi que le soutien des médias suffisant à le mener au palais de l’Elysée. C’était sans compter sur Jacques Chirac que l’on avait à tort enterré politiquement et qui incarnant la fracture sociale et la proximité avec les Français, supplanta son rival raide et compassé.

Le journal « Le Monde » l’avait d’ailleurs caricaturé en Louis XVI dans sa chaise à porteur… Pendant cette campagne électorale particulièrement violente, Nicolas Sarkozy tissa des liens très particuliers avec Edouard Balladur dont il était le Ministre du Budget et le porte parole. Le jeune Nicolas Sarkozy qui se voyait déjà à Matignon tenta souvent avec succès de débaucher un à un les derniers soutiens de Jacques Chirac les assenant d’un « tu es avec nous ou contre nous ». La suite est connue et l’élève a désormais dépassé le maître pour qui il vous une estime particulière puisqu’il gratifia son ex mentor d’un « ma victoire est la vôtre ». Quatorze ans plus tard, alors qu’il pourrait prendre une retraite bien méritée, Edouard Balladur reprend du service à la demande de son ex ministre afin de mener à bien la réforme des institutions territoriales.   

 

L’auteur du célèbre « je vous demande de vous arrêter » revient ponctuellement sur le devant de la scène en acceptant de mener la réforme de la démocratie locale. Lui qui avait essuyé un sérieux revers dans le cadre du CIP, lui qui apparait encore pour certains comme celui qui a trahi Jacques Chirac, lui qui avait échoué dans sa conquête de la Mairie de Paris en 2001, se met une fois de plus en « danger » en acceptant cette périlleuse mission. En effet si comme l’affirme Nicolas Sarkozy « l’appareil administratif et territorial est trop lourd » cette mission va bouleverser considérablement la structure politique existante. Ainsi les élections cantonales seraient remplacées par des élections territoriales, les élections municipales seraient modifiées, le calendrier électoral serait donc bouleversé ainsi que la composition du Sénat. Bref la donne de la démocratie locale se trouverait profondément transformée.

 

Deux options s’offrent à Edouard Balladur : la première est de privilégier la voix parlementaire afin de mener à bien ce projet et la deuxième est de passer par la voix référendaire, choix beaucoup moins risqué puisque les Français dans leur majorité sont partisans d’une modernisation de notre administration territoriale. Sans se fermer de porte, il semble que Edouard Balladur ait privilégié la première option qui apparaît comme beaucoup plus ardue. En effet dans une telle configuration l’ex premier ministre risque de devoir affronter le très puissant syndicat des élus, symbole de tous les conservatismes et qui bataillera fermement afin de préserver ses avantages acquis.

 

L’ex ami de 30 ans de Jacques Chirac qui pourrait profiter d’une retraite bien méritée met donc son expérience au service de son pays prouvant qu’il est un homme d’action et donnant tort à ceux qui l’avaient injustement surnommé « Ballamou ».        

 

 

La phrase de la semaine :

« Ce déficit de crise a vocation à se résorber de lui même. » de Eric Woerth Ministre du Budget à propos du déficit budgétaire.

 

rôme Boué